Comme dans toute la France

A La Réunion, l'accès aux sites pornographiques est toujours largement possible pour les mineurs

  • Publié le 6 août 2025 à 16:19
  • Actualisé le 6 août 2025 à 16:45
adolescent et porno internet

Malgré des lois, des arrêtés et des blocages annoncés en grande pompe, l’accès aux sites pornographiques reste largement ouvert aux mineurs. En France comme à La Réunion, il suffit encore de quelques clics pour accéder à des contenus explicites, sans aucun contrôle réel. Une hypocrisie numérique alors que 2,3 millions de jeunes continuent de fréquenter chaque mois ces plateformes. Décryptage (Photo sly/www.imazpress.com)

Depuis plus d’un an, la France affirme haut et fort sa volonté de protéger les mineurs de l’exposition à la pornographie. Entre lois, décrets, mises en demeure et décisions judiciaires, le pays se veut exemplaire. Pourtant, la réalité est tout autre : aujourd’hui encore, n'importe quel enfant ayant accès à internet peut, en deux clics, visionner des milliers de vidéos explicites, sans aucune vérification sérieuse concernant son âge, y compris à La Réunion sur des sites X péi.

Pourtant, par la loi du 21 mai 2024 visant à sécuriser et à réguler l’espace numériquele gouvernement a imposé à certains services diffusant ce type de contenus de mettre en place un système de vérification de l’âge des utilisateurs.

Objectif, protéger les plus jeunes de l’exposition à la pornographie.

En février 2025, un arrêté a d'ailleurs désigné plusieurs sites pornographiques établis dans d'autres États membres de l'Union européenne afin de les contraindre à respecter la loi nationale. 

- En finir avec les accès "en libre-service" -

Certaines plateformes ont alors fait le choix de bloquer leurs accès en France et d'engager une bataille juridique en faisant suspendre cet arrêté. Mais très vite,  moins d'un mois après leur recours devant le tribunal administratif, une décision rendue le 15 juillet 2025 par le Conseil d'État a confirmé l'application immédiate de l'arrêté.

Cette décision  a marqué une étape dans la protection des mineurs en ligne. En effet, selon les données de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), le gendarme des médias français, plus de deux millions de mineurs en France visitent des sites pornographiques chaque mois. La moitié des mineurs de 12 ans ont déjà eu accès à des contenus X.

- Bras de fer entre l’Etat et l’industrie pornographique 

17 sites pornographiques, dont Youporn et Pornhub, directement visés par l'arrêté ont donc été soumis à l'obligation immédiate de mettre en place des dispositifs de vérification d'âge "robustes et protecteurs des données personnelles", pour empêcher les mineurs d'accéder à ces contenus. Avec à la clé des procédures de sanction pour ceux qui refuseraient de se soumettre à  cette obligation (mises en demeure, sanctions financières, blocage ou déréférencement de leur site) pour en finir avec les entrées "en libre-service" sur des plateformes comme Pornhub, Xvideos, Tukif ou YouPorn.

En juin, puis le 15 juillet 2025, coup de théâtre. Aylo, maison-mère de Pornhub, RedTube et YouPorn et chef de file de l'industrie du porno domicilié à Chypre, décide de bloquer volontairement l’accès à ses sites… tout en accusant directement l’État français : "Votre gouvernement propose que nous vérifiions votre âge à chaque fois que vous visitez notre site. La dure réalité : cette mesure ne protège pas les mineurs, elle met en péril la vie privée de chacun et met les enfants en danger, car elle conduit le trafic vers des milliers de sites qui contournent délibérément les réglementations".

17 plateformes pornographiques ont actuellement restreint volontairement l’accès aux internautes français, préférant suspendre leur service plutôt que d’appliquer une procédure de vérification jugée "irréaliste ou intrusive".

- Rien n'a changé, un clic suffit, vraiment

Malgré les blocages, rien n’a changé. Les chiffres ne baissent pas. Les jeunes savent contourner. Ils passent par d’autres sites, par des moteurs alternatifs, ou utilisent un VPN en quelques secondes. La pornographie n’a jamais été aussi disponible.
 
Pire. Même sans effort technique particulier, des centaines de contenus pornos restent accessibles en France. Certains proposent exactement le même catalogue que les sites bloqués, il suffit de cliquer sur le coutumier bouton "J’ai plus de 18 ans", purement déclaratif.

D'autres surgissent chaque semaine, hébergés à l’étranger, et hors d’atteinte des autorités françaises. Il semble que la barrière voulue comme infranchissable soit un rideau de fumée numérique. Le mineur qui souhaite visionner du contenu pornographique y parvient toujours sans entrave.

 - Une hypocrisie bien organisée (pour l'instant) -

Dans un communiqué daté du 14 juillet 2025, l'Arcom se félicite "de l’adoption, par la Commission européenne, des lignes directrices sur la protection des mineurs en ligne". De son côté, le gouvernement communique sur sa victoire, défend la rigueur de sa loi, et salue la décision du Conseil d’État qui a validé le principe du blocage. Mais tout cela relève plus du symbole que de l’efficacité réelle.

La protection des mineurs est brandie comme un étendard, mais les moyens mis en place restent insuffisants. Aucun système national de contrôle simple et universel n’a, pour l'heure, été adopté. Les outils évoqués sont encore à l’étude. Et aucune grande campagne éducative n’a vu le jour depuis la mise en œuvre de la loi.

Pendant qu’on bloque des pages d’accueil, la réalité numérique continue d’avancer. L’âge moyen du premier contact avec la pornographie est estimé entre 11 et 13 ans. Une grande partie des contenus visionnés montre des scènes de domination, de rapports non consentis simulés ou de violences normalisées. Les répercussions sur la construction psychique, les rapports filles-garçons et la vision des relations sexuelles sont bien connues.

 - Des technologies de (vrai) contrôle émergent -

Notons que le sujet est désormais européen, puisque Bruxelles a présenté, lundi 14 juillet 2025, ses lignes directrices sur la protection des mineurs, entérinant l’obligation pour les sites pornographiques et tous les éditeurs de services réservés aux adultes de vérifier l’âge de leurs utilisateurs. À terme, plusieurs pays de l’Union européenne pourraient proposer des outils permettant aux internautes européens de prouver qu’ils ont plus de 18 ans.

Plusieurs technologies émergent. Parmi elles, l’analyse des traits du visage à partir d’une photo permet d’estimer l’âge d’un utilisateur. Le leader mondial en la matière, Yoti, est basé au Royaume-Uni, un pays en avance sur ces questions.

D’autres méthodes pourraient s'appuyer sur les données des banques ou des opérateurs téléphoniques, pour confirmer la majorité de l’usager. Il existe également des systèmes analysant l’ancienneté d’une adresse e-mail pour évaluer s’il s’agit d’un compte adulte.

Enfin, certaines solutions pourraient demander à l’utilisateur de fournir un document d’identité ou un selfie, que des algorithmes seraient ensuite chargés d'analyser pour estimer l’âge.

is/www.imazpress.com / redac@ipreunion.com

 

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8 Commentaires
Laurence
Laurence
2 mois

Comme d'habitude big brother de l'état donneurs de leçons. Les jeunes ? Oui c'est normal mais aussi un bon moyen de contrôler les gens . Une plaisanterie de l'état

Pierrot 974
Pierrot 974
2 mois

Si des sites X péi existent, il ne doit pas être très difficile de les localiser et de demander aux proprios pourquoi ils ne contrôlent pas l'âge des visiteurs ?

Et l'affaire SPL Estval
Et l'affaire SPL Estval
2 mois

Et les parents ?
Toujours aux autres de s'en occuper ?

1984
1984
2 mois

Souvent en accord avec vous, mais là vous prenez les choses à l'envers. C'est un contrôle parental qu'il faut obligatoire, sur toutes les machines, et sanctionner les parents. Le contrôle d'identité que vous prônez est digne des pires dystopies fascistes. Un ministre Anglais a déclaré que ceux qui sont contre ce système sont pour la pédophilie, on est dans l'outrance et l'ère de la post vérité. Au Royaume-Uni, Wikipedia est en train de lutter pour ne pas être classé comme "site pour adulte", un exemple parmi tant d'autres. Tout contenu gay, ou de prévention contre les MST aussi. Une manière de contrôler ce que les gens voient sur internet. Les soit-disants "tiers de confiance", au moindre piratage (il y en a tous les jours) exposeront vos données, et s'ils ne sont pas piratés, un gouvernement d'extrême droite. vous sanctionnera pénalement si vous soutenez la Palestine ou que vous souhaitez avorter, comme aux USA en ce moment. L'Europe et la Suisse prennent le même chemin et veulent généraliser cela dès octobre et instaurer un mouchard sur nos logiciels de messagerie (whatsapp, messenger, telegram, signal...) pour lutter contre la pedopornographie. Cela s'appelle "Chat control". Comme en Chine, comme en Russie. On commence ça, puis on vous dit ce qu'il faut penser, puis on supprime les sites politiques, puis on contrôle les livres. Aucun expert sérieux ou chercheur en cybersécurité n'approuve cette solution. Je ne parle même pas des libertés publiques. La surveillance généralisée. George Orwell n'aurait pas fait mieux pour contrôler la population. Encore une fois, il suffit de forcer le contrôle parental et d'imposer aux parents de le faire. Pas de nous rendre tous suspects.

Toto
Toto
2 mois

Oohhh le pauvre petit fifils à sa papa maman. Le pauvre malheureux. Qui pourra pas regarder son porno habituel. Snif snif

1984
1984
2 mois

Vous n'avez pas lu, pas compris ou pas voulu comprendre ce que j'ai écrit, et encore moins la solution proposée. C'est un biais cognitif frequent. Quand vous serez obligé de scanner votre identité pour aller sur imazpress, youtube, lemonde, doctissimo, un forum de réparation de voitures ou autre, sous prétexte que ça peut être dangereux pour les enfants, vous comprendrez. Faîtes attention à la musique que vous écoutez aussi, certaines paroles pourraient se retourner contre vous.

MARIMAR
MARIMAR
2 mois

Les parents d'un enfant mineur sont donc dorénavant les protecteurs de « sa sécurité, sa santé, sa vie privée et sa moralité », chacune de ces composantes étant à présent mises sur le même plan. Le droit au respect de la vie privée a été inséré par la loi du 17 juillet 197013 à l'article 9 du Code civil.
Cet article à lui seul résume tout.
Hier, vers 19 heures, route de St Philippe, un mineur âgé d'à peine six ans, sur une trottinette sans aucun éclairage, vêtu de sombre, évité de justesse, où sont les parents ?
Pour revenir à l'accès à un peu de tout et n'importe quoi si les parents étaient plus présents et inculquaient à leurs enfants les notions de respect et de choix à faire, cela résoudrait une partie des problèmes, ne perdons pas de vue que les interdits attirent.
Avant, on parlait de faire grandir nos enfants, maintenant on les laisse livrer à eux-mêmes et c'est bien triste !

Jose
Jose
2 mois

Comme toujours, au lieu de les éduquer, on supprime le "problème" !