Attendu depuis le mois de juin puis reporté à maintes reprises, le comité interministériel des outre-mer (CIOM) doit enfin se tenir ce mardi 18 juillet 2023 à Matignon. Ce comité – qui réunit des élus ultramarins et les ministres d'Élisabeth Borne – doit permettre de rendre plus efficace l’action des collectivités ultramarines en actant un certain nombre de mesures législatives ou réglementaires. Doit-on s'attendre à de vraies annonces ou (une fois encore) à un simple bla-bla : si les élus ultramarins espèrent voir leurs revendications prises en compte, ils ne se font pas d'illusions (Photo photo Sly/www.imazpress.com)
"Normalement on devrait en attendre beaucoup car c'est un événement assez rare, mais après on ne se fait pas d'illusions", note Perceval Gaillard, député de la 7ème circonscription.
"La forme en dit long", selon lui. "Il y a eu déjà plusieurs reports sans que l'on sache pourquoi. Ce n'est pas très sérieux", dit-il. "On a même la sensation qu'ils ne sont pas prêts."
Sur l'octroi de mer "il n'y a pas d'idée claire, ils parlent de réforme sans rentrer dans les détails, la fiscalité non plus, rien n'est clair", indique Perceval Gaillard.
De même que sur le pouvoir d'achat, "à part le BQP, il n'y a pas de réflexion sérieuse sur la limite des monopoles, la concurrence, le blocage des prix".
"Il faudrait quelques annonces surprises très positives pour que l'on change d'avis, mais il y a peu de chances que cela arrive", note le député.
"Le CIOM est la réponse par le gouvernement Borne de l'appel de Fort de France, formulé et porté par lescollectivités territoriales des divers territoires ultramarins" souligne Frédéric Maillot, député de la sixième circonscription.
"Ces derniers appelèrent à changer de modèle de gouvernance et notamment à changer la politique des aides versées aux péiy d'Outremer. Ce qui me donne l’occasionde saluer cette initiative inédite de voir les péi d’outre mer faire corps etparler d’une seule et même voix à un gouvernement" remarque le député
Frédéric Maillot indique que "ce Comité ne concerne que les ministres et non les députésqui n’ont assisté qu’à des réunions d’informations et non de travail ou de contribution".
Il retient que l'idée d'une refonte de l'octroi de mer a été émisé par Jean-Farnçois Carenco, car "le gouvernement tient pour seul etunique responsable de la vie chère en Outre-Mer Or, les travaux de laCommission d'enquête parlementaire dédiée à ce fléau dans lesquels je mesuis investi, montre que le problème est bien plus complexe que cela".
Frédéric Maillot note ensuite qu'en "s'attaquant à l'octroi de mer, le gouvernement risque de plomber leprincipal mode de financement des collectivités d'outremer, et cela n'est pasenvisageable. J’ai exprimé toute mon opposition à cette idée de réforme et jecontinuerai à m’y opposer, pour une refonte plus juste du système fiscal dans lesoutre-mer (où), la situation n'est plus acceptable".
Il ajoute : "on attend un réel changement de paradigme de la part du pouvoir en placevis-à-vis de nos territoires d'Outremer : des solutions adaptées à nosspécificités ultramarines telles que la raréfaction du foncier ou le taux dechômage bien plus important que dans l'hexagone, outre la problématiqueglobale de la vie chère"
- "Mieux vaut se préparer à la déception" -
Du côté des syndicats, même sentiment. "Comme souvent dans ces cas-là, il vaut mieux se préparer à être déçu.es", note Mare-Hélène Dor de la FSU. "Des machins (Assises, États généraux…) qui prétendent s'intéresser aux problématiques ultra-marines ont en a connu beaucoup qui ont souvent débouché sur pas grand-chose."
"Du reste, nous avons une sorte de "sous-ministère" de l'outre-mer qui ne produit rien, est un triomphe de médiocrité et de bavardages stériles lance la syndicaliste.
"Si mon jugement est sévère c'est d'abord parce que tout cela représente un gaspillage d'argent public mais surtout parce que les sujets et les enjeux sont considérables en matière d'emploi, de services publics, de logement, de pouvoir d'achat, de salaires, de retraites, d'éducation... et à l'égard desquels les outremers et donc La Réunion souffrent de retards considérables", ajoute-t-elle.
"Ces dossiers méritent des mesures ambitieuses qui ne viendront pas : classement de toute l'académie en éducation prioritaire, transparence sur la formation des prix, lutte contre les situations de monopole - ou de concentration - de fait (grande distribution, carburants, tout particulièrement), créations de postes dans la Fonction Publique, augmentation des salaires, allocations, minima sociaux et pensions (ne serait-ce que pour compenser la vie chère), lutte contre la précarité des emplois, développement de l'enseignement de la langue régionale, investissement massif dans la transition écologique", dit encore Marie-Hélène Dor.
- Vers une meilleure prise en compte des spécificités locales ? -
Depuis mai 2022, les présidents des régions de Guadeloupe, Réunion, Mayotte, Martinique, Saint-Martin et Guyane, signataires de l'appel de Fort-de-France, demandent à rencontrer le président de la République pour discuter d'un "changement profond de politique" vis-à-vis de l'aide au développement des territoires touchés par la pauvreté et pour trouver des solutions aux problématiques spécifiques des Français d'outre-mer, voire envisager une réforme constitutionnelle.
La réunion du Comité interministériel des Outre-mer (CIOM) est l’occasion pour le Gouvernement de présenter ses priorités et ses orientations pour améliorer la vie quotidienne des habitants des territoires ultramarins. Et les demandes sont nombreuses. Vie chère, octroi de mer, continuité territoriales…
Sur les milliers de retours qui ont été faits aux ministères, une centaine auraient été retenues.
Les parlementaires et présidents de collectivités qui participeront à cette réunion du mardi 18 juillet espèrent obtenir une feuille de route détaillée avec un calendrier précis, des actions concrètes et des investissements adaptés à chaque territoire.
Des actions concrètes sont attendues, d'autant que l'Insee a dévoilé le mardi 11 juillet, que les prix sont plus élevés de 9 % à La Réunion par rapport à l'Hexagone. De plus, dans l'alimentaire cette différence est de 37%.
Le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a déjà annoncé qu'il proposera une réforme "en profondeur" de l'octroi de mer, qui est un mécanisme de protection tarifaire appliqué aux produits importés dans les outre-mer, lors de ce Comité interministériel des Outre-mer, le 8 juin dernier.
"Je ne suis pas favorable à une suppression, mais je ne suis pas favorable non plus au statu quo", a-t-il précisé. Il a fait part de son intention de procéder "produit par produit", en conservant "un dispositif de protection tarifaire […] pour les produits qui sont réalisés sur ces territoires et lever en revanche toutes les taxes sur les produits qui ne sont pas disponibles sur ces territoires".
Pour rappel, une partie du montant de l'octroi de mer est reversé aux collectivités locales pour financer en partie leurs budget sde fonctionnement
Le 8 juin, et toujours à l’Assemblée nationale, le ministre délégué chargé des outre-mer, Jean-François Carenco, indiquait qu’y sera également étudiée une révision de l’aide à la continuité territoriale. "Dans le cadre du Ciom, nous devons réfléchir à faire évoluer l’équilibre des paramètres, notamment le seuil d’éligibilité, le montant et les bénéficiaires. J’y travaille", a-t-il assuré.
- Un comité qui intervient plus de 10 ans après le premier -
Le premier Conseil interministériel de l’Outre-mer - et non Comité, car celui-ci a été placé sous l’autorité directe du président de la République Nicolas Sarkozy et non sous celle du Premier ministre - s’est tenu en 2009.
Il avait été réuni en réaction à la crise sociale aux Antilles et à une grève générale contre la vie chère de plusieurs semaines. "L'avenir des collectivités ultramarines n'est pas l'affaire du seul ministre en charge de l'Outre-mer, estimait à l’époque Nicolas Sarkozy. Chaque membre du gouvernement doit se sentir concerné et doit s'y impliquer personnellement."
Il faudra attendre dix ans pour qu'un nouveau CIOM soit réuni par le Premier ministre de l'époque, Edouard Phillipe, en février 2019. De la création d'un réseau de "lycées de la mer" - des lycées professionnels dédiés aux métiers marins - en passant par la promotion du "plurilinguisme", les thématiques abordées lors du CIOM de 2019 étaient très vastes.
Il s'agissait de "donner des objectifs aux ministres concernés", selon les mots d'Edouard Philippe. Mais si les objectifs ont été fixés, difficile de dire s'ils ont été atteints.
La synthèse des travaux du CIOM de 2019 indiquait par ailleurs qu’il "sera réuni chaque semestre". Un vœu pieux. Si une autre réunion a bien eu lieu en septembre 2019, depuis, plus rien...
Alors 10 ans après et de reports en reports successifs, faut-il voir dans ce retard l'ambition de vraies annonces pour La Réunion et pour les Outre-mer ? Espérer n'est pas interdit pas aucune loi...
ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com
Ce qui est formidable avec ce gouvernement,comme avec MACRON,on sait par avance que ce qu'il annoncera ne sera que de l'enfumage. C'est quand même une situation où l'on n' attend finalement plus rien de ceux qui nous gouvernent. Combien de temps encore les français vont-ils être dupes de celà?