L’inscription du Dipavali au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO n’est pas seulement une reconnaissance. Pour moi, c’est un retour à la source. Une source que j’ai vue, touchée, vécue enfant, élève de l’école Tamij de Saint-Paul (Photo : sly/www.imazpress.com)
Je me souviens de cette époque comme d’un sanctuaire.
Nous avons mis en place notre première pièce de théâtre en tamoul, nous avons participé au premier Jour de l’An tamoul à Saint-Denis et au premier Dipavali à Saint-André, sans mesurer que nous marchions déjà sur un chemin historique.
En revoyant ces anciennes photos, je comprends mieux que tout ce que nous vivions portait en lui le symbolisme de cet art de vivre qu’est le Sanātana Dharma, parfois même sans que nous en ayons conscience.
Dans ces gestes simples, je vois aujourd’hui :
la pureté de Ganga,
qui lave l’intention avant l’action ;
la lumière d’Agni,
qui transforme le simple en sacré ;
l’offrande de Lakshmi,
qui rappelle que la prospérité commence dans le cœur ;
la nature de Bhumi Devi,
qui nous ancre dans l’humilité ;
la force de Shiva,
qui détruit l’ignorance pour révéler la vérité.
Sur ces photos d’autrefois, les mains qui broient, les corps qui dansent, les enfants qui apprennent , je retrouve le cycle hindou tout entier : la création, la transmission, la préservation.
Nous étions loin des grandes scènes, loin des projecteurs.
Mais nous étions proches de l’essentiel.
Chaque feuille tressée, chaque rythme joué, chaque mouvement de danse, chaque flamme allumée avait un sens cosmique.
C’était un Dipavali vivant, incarné, habité, presque brut et pourtant profondément spirituel.
Et derrière tout cela, je vois aujourd’hui la présence de nos ancêtres engagés.
Eux qui ont apporté ces gestes, ces couleurs, ces prières dans la traversée.
Eux qui ont gardé les mantras vivants dans leur mémoire, même quand tout semblait vouloir les effacer.
Eux qui ont transmis, non pas par obligation, mais par devoir sacré.
La lumière que nous allumions enfants n’était pas qu’une lampe.
C’était le feu qu’ils nous avaient laissé.
Alors oui, voir le Dipavali inscrit à l’UNESCO est une immense fierté.
Mais pour moi, cette reconnaissance n’appartient pas aux institutions.
Elle appartient :
à celles et ceux qui ont tressé, broyé, chanté, prié ;
à nos ancêtres qui ont porté la tradition dans leurs mains calleuses ;
à nos enseignants qui nous ont transmis la beauté des symboles ;
à ces moments simples qui, à l’époque, nous paraissaient déjà grandioses.
Aujourd’hui, je réalise que nous étions les enfants d’une lumière bien plus vaste que nous.
Une lumière qui revient désormais au monde entier.
Dipavali n’est pas uniquement une fête.
C’est un héritage, une offrande, un chemin.
Et aujourd’hui, il éclaire la planète entière.
Comme il est écrit dans la Bhagavad Gītā :
TAMASO MĀ JYOTIR GAMAYA
De l’obscurité, conduis-moi vers la lumière.
Que cette lumière continue d’éclairer nos vies, nos cultures et nos héritages.
Isabelle Latchimy
