Rarement le monde sportif a été paralysé à ce point

Coronavirus: un jour, le sport reprendra et les stades seront pleins

  • PubliĂ© le 5 avril 2020 Ă  12:12
  • ActualisĂ© le 5 avril 2020 Ă  12:20
Des supporters bordelais lors d'une rencontre de Ligue 1 opposant Bordeaux à Nßmes le 3 décembre 2019.

Championnats majeurs et amateurs arrĂȘtĂ©s, compĂ©titions reportĂ©es... Rarement le monde sportif a Ă©tĂ© paralysĂ© Ă  ce point. Un jour pourtant, aprĂšs la pandĂ©mie de coronavirus, les Ă©preuves reprendront. Et les stades de football et d'autres disciplines pourraient ĂȘtre bondĂ©s, estiment des experts.

"On a un besoin inaliénable de sport. Et ce besoin remplira les stades", prédit JérÎme Boissel, enseignant-chercheur en sciences de gestion à La Rochelle. "On aura besoin de revivre des émotions individuelles mais aussi de communion sociale. Or, le seul lieu de communion sociale, c'est le stade."

"Oui, aujourd'hui on souffre parce qu'on est en manque. Mais lorsque les compétitions reprendront, il y aura sans doute un élan de joie, d'euphorie, de solidarité. Le sevrage aura été tellement important que les stades ou les salles vont afficher complets", pressent ce spécialiste des consommateurs.

Dans le passé, le sport a souvent montré ses vertus salvatrices et de reconstruction. Ainsi, aprÚs les deux guerres mondiales, l'idée prégnante a toujours été "profitons-en", constatent des historiens du sport.

Le "retour Ă  la normalitĂ© se fera en fonction de l'importance du sport dans chaque pays", prĂ©cise Fabien Archambault, maĂźtre de confĂ©rence Ă  Limoges, prenant l'exemple de l'Italie en 1946, oĂč la reprise du football avait Ă©tĂ© saluĂ©e avec cette formule lyrique: "Des parenthĂšses de soleil enchantĂ©".

- Un esprit "Années folles" -

En France, Ă  la LibĂ©ration, la passion s'Ă©tait portĂ©e sur les exploits de Marcel Cerdan. Autour des postes de radios, les Français avaient accompagnĂ© le boxeur dans "sa conquĂȘte de l'AmĂ©rique" dĂšs 1946, puis vers son titre mondial des poids moyens contre l'AmĂ©ricain Tony Zale, le "Roi du KO", le 21 septembre 1948, jusqu'Ă  sa mort en octobre 1949.

"Cerdan, c'était la preuve que la France restait un pays fort", insiste Yves MoralÚs, historien au Cresco (centre de recherches sports et corps) de Toulouse. Il rappelle que le général De Gaulle "s'était beaucoup servi des champions et des équipes" pour accompagner "le retour du prestige national".

Cette crise sanitaire "va générer des frustrations", complÚte le sociologue Philippe Terral, directeur du Cresco. Sans faire de prospective, il imagine que dans "notre société de loisirs", les manques vont occasionner "des besoins de jouissance, de consommation" et pourraient ramener à l'esprit "des Années folles" (1920-1929).

"Plus la période (de confinement, NDLR) sera longue et douloureuse, plus les événements qui en symboliseront la fin seront importants", augure Yves MoralÚs, alors que pour les économistes, les modifications de calendriers, avec des rencontres en juillet, pourraient se poser comme un autre facteur bénéfiques.

- Résilience française -

"Il va y avoir des matches en Ă©tĂ©, Ă  des dates habituellement oĂč les Ă©quipes ne jouent pas. Ça peut attirer un nouveau public. D'un point de vue sociologique, on peut avoir vraiment des gens qui ne sont jamais allĂ©s au stade", fait valoir JĂ©rĂŽme Boissel.

Le sociologue Cyrille Rougier et l'économiste Christophe Lepetit tempÚrent cependant cet optimisme. Pour deux raisons. Selon ces deux chargés d'études du Centre de droit et d'économie du sport (CDES) à Limoges, il apparait compliqué de prévoir "le comportement du spectateur" alors qu'une crise économique se profile et les risques sanitaires pourraient continuer de peser en fin de confinement.

"Des catégories seront plus affectées que d'autres", craint Cyrille Rougier. "Je me souviens de la résilience française aprÚs les attentats. Je pense que c'est cet état d'esprit qui va prévaloir quand les compétitions vont reprendre", répond JérÎme Boissel.

Le président du Groupement National des circuits automobiles Jean-Pierre Mougin croit lui aussi à une embellie de spectateurs "assez intéressante". Mais il s'inquiÚte de "la concurrence des événements", conséquence de la "multiplicité des compétitions" dans une période limitée.

"On va avoir un calendrier extrĂȘmement bousculĂ©, extrĂȘmement chargĂ© (...) sur le 2e semestre", prĂ©voit-il, craignant que ces embouteillages ne limitent la reprise espĂ©rĂ©e.

AFP

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