La police a arrĂȘtĂ© samedi plus de 300 personnes Ă travers la Russie lors des rassemblements dans des dizaines de villes Ă l'appel de l'opposant AlexeĂŻ Navalny, pour exiger sa libĂ©ration. L'Ă©quipe du militant anti-corruption, victime d'un empoisonnement prĂ©sumĂ© cet Ă©tĂ©, a publiĂ© tout au long de la journĂ©e des vidĂ©os de ces manifestations, oĂč des foules de dizaines, de centaines ou de quelques milliers de personnes scandaient des slogans comme "Poutine voleur", "Navalny, on est avec toi" ou "libertĂ© pour les prisonniers politiques".
Cette contestation s'organise à quelques mois des législatives prévues à l'automne, sur fond de chute de popularité du parti au pouvoir Russie unie.
Les premiĂšres manifestations samedi dans l'ExtrĂȘme-Orient russe et en SibĂ©rie, notamment Ă Vladivostok, Khabarovsk, Novossibirsk et Tchita, ont fait face Ă d'importants effectifs de police. Et par endroit, la rĂ©pression a Ă©tĂ© brutale.
Plus d'une heure avant le dĂ©but officiel du rassemblement prĂ©vu Ă 11H00 GMT dans le centre de Moscou, les forces anti-Ă©meutes ont arrĂȘtĂ© et enfermĂ© dans des fourgons cellulaires plusieurs dizaines de personnes, selon des journalistes de l'AFP. Les forces de l'ordre moscovites avaient promis vendredi de "rĂ©primer sans dĂ©lai" tout rassemblement non autorisĂ©. En outre, la mairie a jugĂ© "inacceptable" toute manifestation Ă cause de la pandĂ©mie de Covid-19. Quelques centaines de personnes, dont beaucoup de jeunes, Ă©taient nĂ©anmoins rĂ©unis sur la place Pouchkine vers 10H50 GMT, scandant "Honte!" ou "LibertĂ©". De lĂ , les protestataires veulent dĂ©filer le long d'une rue centrale vers le Kremlin. Sur Instagram, la femme de M. Navalny, Ioulia, avait annoncĂ© son intention de manifester Ă Moscou.
A Saint-PĂ©tersbourg aussi, les premiers protestataires sortaient dans la rue. "J'aurais honte de rester Ă la maison. J'ai besoin de parler, j'ai besoin d'exprimer ma position", confie Galina Fedosseva, 50 ans. "Les gens sont fatiguĂ©s de Poutine, (il a Ă©tĂ© prĂ©sident) toute ma vie. Il est temps de faire de la place pour les autres. (...) Je ne veux pas vivre sous une dictature", dit AlexeĂŻ Skvortsov, 20 ans. A Iakoutsk, au sud du Cercle polaire, une centaine de protestataires ont bravĂ© le froid extrĂȘme en manifestant par - 50 degrĂ©s Celsius. PrĂšs de 330 protestataires avaient dĂ©jĂ Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s dans une vingtaine de villes russes vers 10H00 GMT, selon l'ONG OVD-info, spĂ©cialisĂ©e dans le suivi des interpellations lors de manifestations.
- Violences -
Les arrestations ont Ă©tĂ© particuliĂšrement violentes Ă Vladivostok, port russe sur l'ocĂ©an Pacifique, oĂč les policiers anti-Ă©meutes ont pourchassĂ© les manifestants et les ont frappĂ©s avec des matraque, selon une vidĂ©o de l'AFP. La police russe avait dĂ©jĂ interpellĂ© cette semaine, en amont des mobilisations, des alliĂ©s de premier plan d'AlexeĂŻ Navalny dont deux ont Ă©tĂ© condamnĂ©s vendredi Ă de courtes peines de prison. PlacĂ© en dĂ©tention jusqu'au 15 fĂ©vrier au moins et visĂ© par plusieurs procĂ©dures judiciaires, AlexeĂŻ Navalny, 44 ans, a Ă©tĂ© apprĂ©hendĂ© le 17 janvier, dĂšs son retour d'Allemagne, aprĂšs cinq mois de convalescence suite Ă un empoisonnement prĂ©sumĂ© dont il accuse le Kremlin.
Son appel Ă manifester, aprĂšs son incarcĂ©ration, a Ă©tĂ© accompagnĂ© d'une enquĂȘte vidĂ©o de deux heures dans laquelle il accuse Vladimir Poutine de s'ĂȘtre fait bĂątir pour un milliard d'euros une fastueuse demeure sur une immense propriĂ©tĂ© sur les rives de la mer Noire. Les autoritĂ©s rejettent l'ensemble des accusations d'empoisonnement et de corruption, qualifiant l'opposant et son entourage "d'escrocs" Ă la solde des Occidentaux. La vidĂ©o a nĂ©anmoins rencontrĂ© un succĂšs Ă©norme et a Ă©tĂ© visionnĂ©e prĂšs de 67 millions de fois depuis mardi sur YouTube.
- Pressions sur TikTok et YouTube -
DĂšs l'arrestation de l'opposant, condamnĂ©e par les puissances occidentales, des milliers d'appels Ă la protestation ont Ă©tĂ© relayĂ©es sur les rĂ©seaux sociaux, oĂč il jouit d'une visibilitĂ© importante, alors qu'il est largement ignorĂ© des grands mĂ©dias d'Etat russes. Le gendarme russe des tĂ©lĂ©communications Roskomnadzor a menacĂ© d'amendes les plateformes TikTok et Vkontakte (VK), l'Ă©quivalent russe de Facebook. Une enquĂȘte a Ă©tĂ© ouverte pour "incitation Ă des actes illĂ©gaux auprĂšs de mineurs" et le ministĂšre de l'Education a appelĂ© les parents Ă "empĂȘcher" leurs enfants de manifester.
AFP