[Photos - vidéos] Didier Debals, la mémoire vive du syndicalisme réunionnais

  • Publié le 17 septembre 2025 à 14:18
didier debals saiper

À 68 ans, il continue de parler de luttes avec la même ferveur que dans ses jeunes années. Figure incontournable du syndicalisme enseignant à La Réunion, il a côtoyé des générations de militants et participé à l'histoire sociale de l'île par ses engagements, toujours assumés, toujours passionnés. Rencontre avec Didier Debals du Saiper (Photos sly/www.imazpress.com)

Né en 1957 à Albi, dans le Tarn, il grandit à Carmaux dans une cité minière façonnée par la mémoire ouvrière et la figure de Jean Jaurès. "Je suis fils de mineur mais je suis de ceux qui ont bénéficié de l'école républicaine. Ce qui m'a permis de faire partie de la classe moyenne aujourd'hui". Son engagement, il le doit notamment à son éducation. Écoutez.

"Je suis tombé dans la marmite très tôt". Le jeune Didier se tourne vers le syndicalisme. Ses premiers pas, il les fait à l'Union nationale des étudiants de France (Unef), lorsqu'il est étudiant en FAC d'Histoire, ensuite il adhère au Syndicat national des enseignements de second degré (Snes). Puis, Didier Debals fait un passage à Paris, entre l’Insee et le ministère des finances au Louvres et Bercy, où il est à la CGT. 

- Co-fondateur du Snuipp-Fsu et du Saiper -

Après des premières vacances à La Réunion en 1985, avec sa compagne de l'époque originaire du Tampon, le couple s'installe sur l'île en 1991. Didier Debals exerce comme professeur des écoles, puis comme directeur d’école. 

Quelques années plus tard, il fait partie des fondateurs du Syndicat National Unitaire des Instituteurs, Professeurs des Écoles et PEGC (Snuipp) affilié à la Fédération syndicale unitaire (FSU) à La Réunion mais le poids politique du Parti communiste réunionnais est trop important et il quitte l'organisation syndicale avec son ex-compagne. 

- La non-violence active -

Tous les deux créent ensuite le Syndicat alternatif et indépendant du personnel de l'éducation de La Réunion (Saiper) et posent les bases d’un fonctionnement original, inspiré des situationnistes et de la "non-violence active". "Je crois au pouvoir de l’autogestion et aux décisions prises ensemble". Il cite Rosa Luxembourg parmi ses influences : "Contrairement au dirigisme qui est reproché à Lénine, elle pensait que les ouvriers, les salariés, devaient décider par eux-mêmes".

En 2002-2003, la grande grève des enseignants marque un tournant et le Saiper devient la première organisation syndicale du premier degré à La Réunion. 

Si les années et les luttes passent, Debals reste avant tout un homme de terrain, attaché à la réalité sociale réunionnaise. Les chiffres, il les connaît : 17,5 % de chômage, une jeunesse en quête de perspectives, un système de santé en souffrance. "On impose une fiscalité qui écrase les classes populaires et moyennes, et derrière, on ose dire que l’État fait des économies. C’est insupportable".

- Faire payer les ultra-riches -

S’il devait faire passer une loi, "elle concernerait les taxes aux plus riches", tranche Didier Debals sans détour. Pour lui, l’urgence est claire : rétablir une justice fiscale dans un système qu’il juge profondément inégalitaire.

"Les grandes fortunes n’ont jamais été aussi prospères, pendant que les classes populaires s’appauvrissent et que les travailleurs peinent à boucler leurs fins de mois", insiste-t-il.

Le syndicaliste rappelle que les richesses produites "doivent bénéficier à ceux qui les créent, pas seulement à ceux qui les accumulent". À ses yeux, taxer davantage les plus aisés n’est pas seulement une mesure économique, c’est aussi une question de dignité et de solidarité envers ceux qui tiennent le pays debout. Regardez.

Sur la question des violences policières, Didier Debals ne mâche pas ses mots. "Quand des jeunes descendent dans la rue pour crier leur colère, on leur oppose des matraques et des gaz lacrymogènes", dénonce-t-il. Pour le syndicaliste, cette réponse répressive traduit l’incapacité du pouvoir à entendre le malaise social.

"Plutôt que de dialoguer, on criminalise la contestation. Mais à force de cogner sur le peuple, on creuse le fossé entre l’État et les citoyens". Une fracture qu’il juge particulièrement inquiétante à La Réunion, où le sentiment d’abandon se double d’une défiance croissante envers les institutions. Écoutez.

Pour le syndicaliste, l’état du système de santé illustre cruellement le recul des acquis sociaux. "On remet en cause des droits fondamentaux : les remboursements reculent, l’accès aux soins devient un luxe pour certains", regrette-t-il. Il rappelle qu’à La Réunion comme ailleurs, les délais pour obtenir un rendez-vous médical s’allongent et que les hôpitaux manquent de moyens. "On fragilise ce qui devrait être un pilier de solidarité nationale. La santé n’est pas une marchandise, c’est un droit".

- S'ouvrir vers l'Asie -

Son regard sur l’évolution du monde n’est pas tendre. Il souligne la chute de l'occident comme puissance économique et les dérives autoritaires d’une démocratie française "de plus en plus fragilisée". Pour le syndicaliste, il est important que La Réunion se tourne vers l'Océan Indien et vers l'Asie, forte de son développement démographique et technologique.

Didier Debals ne cache pas son inquiétude face à ce qu’il appelle "l’effritement de la conscience ouvrière". Selon lui, le déclin de la classe ouvrière en Occident a profondément bouleversé le rapport de force social et explique en grande partie l’essoufflement des mobilisations.

"Pendant longtemps, les luttes étaient portées par une classe organisée, structurée autour des usines, des mines, des grands bastions syndicaux. Aujourd’hui, cette base a quasiment disparu.

Il est beaucoup plus difficile de construire des mouvements d’ampleur", déplore-t-il. Pour le syndicaliste, cette mutation économique et sociale a fragilisé la capacité collective à résister et à s’imposer dans le débat public. Regardez.

- Aux jeunes de prendre la relève -

Pourtant, loin du désenchantement, Didier Debals continue de croire à l’engagement citoyen et aux alternatives locales. "Ce sont les jeunes, aujourd’hui, qui doivent s’emparer des luttes. Rien n’est jamais écrit d’avance.

On peut toujours changer la vie, même à petite échelle". Le 10 septembre dernier, il était dans la rue. "C'était une petite mobilisation mais c'était sympa. Ça a permis de créer une dynamique locale". Écoutez.

À l’heure où beaucoup de figures syndicales passent la main, Debals, lui, reste fidèle à sa conviction : l’action collective reste le meilleur levier pour transformer la société. Et même s’il a quitté la première ligne, sa voix continue de résonner, mémoire vivante d’un demi-siècle de combats.

vg/www.imazpress.com / redac@ipreunion.com

 

guest
9 Commentaires
Benji
Benji
2 semaines

Le syndicalisme c est la lutte pour les conditions de travail des ouvriers .tout le monde vous reprochera de n avoir pas fait ca oubien ca. J aimerai parler avec ce monssieur. Lèss a zot pensé

53 % ca fait des jaloux
53 % ca fait des jaloux
2 semaines

Les 53 % apparement ça fait des jaloux.
Triste sire

Echo des quartiers
Echo des quartiers
2 semaines

La structuration des travailleurs etait fortement porté par le communisme que tu sembles avoir rejeté en créant le Saiper....

Jean-Noël Fortier
Jean-Noël Fortier
2 semaines

A beaucoup plus milité pour la défense de la surrémunération des fonctionnaires, que pour le recul de l'illettrisme...
La preuve ? Les 53 % sont toujours là et les analphabètes toujours plus nombreux...

norbert
norbert
2 semaines

il a milité pour tout et milite encore, il n'est pas personnel comme tout les autres syndicats

Ofly
Ofly
2 semaines

Le concours est ouvert à tout le monde jalou, faut il en être capable....

Missouk
Missouk
2 semaines

superbe portrait

Patricia
Patricia
2 semaines

Intéressant.

Un vrai syndicaliste
Un vrai syndicaliste
2 semaines

Un vrai syndicaliste.
Cela nous change de ceux qui font du syndicaliste (supprimé pour injures - Modérateur). Il y en a qques uns (unes).