L'annonce par le gouvernement d'un "plan grand ùge" pour janvier est accueilli avec un optimisme prudent par les acteurs du secteur qui insistent sur l'importance de trancher rapidement la question du financement de la dépendance.
Que prévoit le plan?
Ce plan "doit permettre de définir" les réponses à apporter aux "personnes en perte d'autonomie", a souligné la ministre déléguée chargée des Personnes handicapées Charlotte Parmentier-Lecocq mercredi au Sénat.
Il s'agira également d'aborder "les mesures de financement, puisque cela réinterroge complÚtement la solidarité intergénérationnelle et intragénérationnelle pour notre pays", a-t-elle ajouté.
A travers ce plan, il sera question de "repenser l'habitat, l'accompagnement, l'aide à domicile, la prévention, la santé, etc.", a détaillé son cabinet, et d'avoir un état des lieux des besoins d'ici à 2050 département par département.
Précision de taille, le plan ouvrira le débat sur les scénarios de financement du grand ùge sur le long terme - qui financera les dépenses de demain? quelle prise en charge individuelle? Quelle solidarité entre les retraités ? - mais ne prévoit pas de trancher la question.
Quel est le contexte?
Ce plan intervient dans un contexte de vieillissement de la population française. Début 2024, les plus de 60 ans représentaient plus d'une personne sur quatre (27,7%) contre 19,6% en 1994. Les plus de 75 ans devraient quant à eux passer de 10,4% de la population à 16,4% en 2050, selon l'Insee.
Le nombre de personnes ĂągĂ©es en situation de perte d'autonomie - ayant besoin d'aide pour s'habiller, se laver, manger, se dĂ©placer ou Ă©tant sujettes Ă une altĂ©ration des fonctions mentales - suit la mĂȘme trajectoire. Leur nombre devrait atteindre prĂšs de 4 millions en 2050, contre un peu plus de deux millions en 2015.
En 2021, la Cour des comptes avait tiré la sonnette d'alarme, appelant les pouvoirs publics à agir pour rattraper le retard de la France en matiÚre de vieillissement en bonne santé. Les magistrats financiers avaient notamment pointé une dispersion des acteurs de la prévention et des interventions concurrentes.
Quid de la loi "grand Ăąge"?
Depuis des dĂ©cennies, les acteurs du secteur rĂ©clament une loi "grand Ăąge" de programmation pluriannuelle, Ă l'image de ce qui se fait notamment pour les armĂ©es, seule Ă mĂȘme Ă leurs yeux de rĂ©pondre aux enjeux.
Mais cette loi est devenue l'arlésienne de la présidence Macron - qui l'avait promise au début de son premier quinquennat mais qui n'a in fine jamais vu le jour, se heurtant à la question notamment financiÚre.
Or le temps presse, martÚlent les spécialistes. Le coût de la dépendance des personnes ùgées est évalué à 30 milliards d'euros - soit 1,4 point du PIB - chaque année en moyenne. Avec le nombre croissant de personnes ùgées, le coût global devrait sans surprise s'envoler dans les prochaines décennies.
Selon une Ă©tude de la Drees de 2017, la dĂ©pense publique devrait augmenter trĂšs fortement dâici Ă 2060 pour atteindre 2,07 points de PIB, et la dĂ©pense totale doublerait quant Ă elle presque, Ă 2,78 points de PIB.
Qu'en disent les acteurs du secteur?
Principal syndicat des Ehpad (établissements d'hébergement pour personnes ùgées dépendantes, ndlr) privés, le Synerpa dit "accueillir avec attention" l'annonce de ce plan grand ùge mais prévient qu'il attend "désormais des mesures fortes".
Parmi ces mesures, figurent "la simplification des procĂ©dures et de la rĂ©glementation, une loi de programmation budgĂ©taire pour avoir une visibilitĂ© pluriannuelle des financements, ainsi que le respect du principe dâĂ©quitĂ© de traitement entre tous les diffĂ©rents statuts", liste son prĂ©sident Jean-Christophe Amarantinis.
"Ce plan doit également prendre en compte l'urgence du chantier de l'attractivité des métiers", prévient-il.
De son cÎté, la Fédération des entreprises de services à la personne (FESP) se dit "plutÎt trÚs optimiste", saluant "l'investissement" de Charlotte Parmentier-Lecocq sur la question. Elle pointe toutefois "beaucoup d'inconnues", notamment budgétaires.
Or "s'il n'y a pas plus de ressources, on n'aura pas véritablement de politique de l'autonomie", indique Catherine Lopez, directrice générale de la Fédération. "Une véritable politique de l'autonomie, ça veut dire qu'il faut avoir des financements et qu'il faut programmer des choses sur du moyen et plus long terme".
Autre crainte, "l'articulation de ce plan avec le projet de loi sur la décentralisation" dont les grands axes seront dévoilés le 17 décembre. La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) "doit garder un rÎle central et conserver un budget conséquent", insiste-t-elle.
AFP
