L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) a dévoilé le jeudi 25 mai 2023 le chiffre inquiétant de nombre de mineurs ayant consulté des sites pornographiques en 2022. Il en ressort que la moitié des garçons de 12-13 ans consultent ces sites chaque mois. Nos ados sont-ils trop précoces ? Prennent-ils tout ce qu'ils voient pour argent comptant ? Faut-il les éduquer dès l'école ? Quoi qu'il en soit, ce qui est certain, c'est qu'il faut les protéger.
Alors que nous croisions de jeunes adolescentes et adolescentes dans les rues de Saint-Denis – tout droit sortis du collège et du lycée, nous leur posons une question : avez-vous déjà regardé des sites pornographiques à votre âge ?
Rires (parfois) gênée, joues rouges… si certains n'osent pas répondre, d'autre le dise, "oui on a déjà regardé". Mais à quel âge, leur demandent-on ? Certains répondent vers 15-16 ans, d'autres (moins nombreux), en avaient déjà consultés plus jeunes ou du moins été sur ces sites au moins une fois.
Une exposition que de nombreux parents ignorent ou ne veulent tout simplement pas voir.
- Des élèves exposés de plus en plus jeunes -
Selon une étude de l’Arcom, 51 % des garçons de 12 ans-13 ans fréquentent au moins une fois par mois un site pour adultes. Cette consommation du porno se fait "de plus en plus mixte et de plus en plus jeune", souligne Anne de Labouret, autrice de "Parlez du porno à vos enfants avant qu’Internet ne le fasse".
En plus des parents, c'est également à l'Éducation nationale de faire en sorte de protéger les enfants des sites pornographiques, tout du moins, de les sensibiliser. Car au cœur des établissements scolaires – souvent – ce sujet est cible d'échanges et de discussions entre les adolescents.
C'est d'ailleurs cette éducation à la sexualité qui avait été évoquée lors de la visite sur notre île du ministre de l'Éducation Pap Ndiaye. "Est-ce qu'il ne serait pas temps d'avoir de vrais cours d'éducation sexuelle, pour aborder les questions de consentement ?" l'interpellait un jeune. Ce à quoi le ministre avait répondu, "l’éducation à la sexualité est essentielle, pour des objectifs de santé publique : les grossesses précoces, les maladies sexuellement transmissibles... Mais aussi des enjeux pour l'égalité femme-homme, la lutte contre la haine anti-LGBT, la prévention des violences sexuelles et sexistes". "Nous allons faire ce que nous avons à faire" affirmait-il.
Des sujets sur la sexualité qu'abordent donc les professionnels de l'éducation nationale, face à des adolescents aux questions parfois très pointues.
"Le constat que nous faisons est que les élèves sont exposés dès le CM1/CM2 via le téléphone, internet ou TV par curiosité, pour faire comme les plus grands…", indique Elixabet Alfaro, infirmière scolaire.
"Certains sont exposés par "accident " au cours d'une recherche sur le web, par des images pornos, lors de visionnages de dessins animés, en streaming ou lors de jeux vidéo", ajoute-t-elle.
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L'Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) qui ajoute par ailleurs que 83 % des mineurs utilisent leur téléphone portable pour consulter ces sites. "Avant, il n’y avait qu’un seul ordinateur pour la famille, des téléphones à neuf touches, les ados avaient accès au porno vers 15 ans. Maintenant, la consultation commence en primaire, vers 9 ans", souligne Anne de Labouret. "Ils sont curieux, c’est naturel, mais ils vont tomber sur des images choquantes et inadaptées".
Pour cette pharmacienne de formation, qui participe à des ateliers de sensibilisation, il est crucial que les parents - qui sont souvent dans le déni sur ce sujet - fassent de la prévention "dès le plus jeune âge". Elle souhaite que "les parents prennent conscience" de l’importance du sujet malgré la difficulté d’en parler, car l’exposition à toutes les facettes du porno si jeune "a un impact sur le psychisme et les relations".
"Un enfant de moins de 12 ans, confronté à la sexualité de ses parents comme à la pornographie, peut en être bouleversé si des mots ne sont pas rapidement mis dessus", indique le Docteur David Goulois, psychologue clinicien.
"Lorsqu'un psychotraumatisme se créé (c'est-à-dire que le psychisme n'avait pas préparé la survenue de l'événement ou comment il allait se dérouler), l'enfant peut par la suite conduire deux types de comportements : la fuite de tout ce qui est intime ; la compulsion permettant l'apaisement de l'angoisse." "Ainsi dans la deuxième option, s'y trouve la masturbation addictive ou encore le passage à l'acte sans consentement de l'autre - on se donne l'illusion de contrôler ce qui par le passé a été imposé, en créant la situation en question et donc en l'anticipant", ajoute le Docteur David Goulois.
Il est donc essentiel que les parents aient la main sur le réseau social, sur l'accès internet de leur enfant. "On ne peut échapper au visionnage auprès d'autres jeunes (comme cela se passe au collège) mais en conservant la main sur le visionnage à la maison, on fait passer le message que la sexualité ne puisse être un simple objet de consommation. De même, avoir une discussion sur la sexualité, de manière sérieuse (respect de l'autre, contraception...), minimise le risque de dérapage ultérieur", conclut le psychologue clinicien.
- Porno en deux clics, quelle éducation sexuelle au collège -
Face à ce constat, il est primordial d'instaurer un échange. Que cela soit avec les parents (même si ce n'est pas forcément simple) ou avec les personnels de l'éducation nationale et notamment les infirmiers.ères scolaires.
"Les infirmières scolaires mènent des séances d'éducation à la santé collective dès le 1er degré", nous indique Elixabet Alfaro, infirmière scolaire et membre de syndicat SA SNICS/FSU.
"À partir du primaire, des séances d'éducation à la sexualité sont menées. Très régulièrement, en cm1/cm2 la thématique du porno est apportée par les élèves", dit-elle. "Ce qui nous amène à faire de la prévention dès cet âge." "Il en est de même au collège lors des séances d'éducation à la sexualité", ajoute l'infirmière.
Elixabet Alfaro précise même que "dès le primaire, voire la maternelle, nous travaillons avec les équipes sur des projets concernant les écrans, l'utilisation raisonnée et les contenus". La prévention se fait donc de manière individuelle et collective. "Le travail consiste aussi à déconstruire tout ce qui est véhiculé par le porno", précise la syndicaliste.
Même les parents ont le droit à des cours – car en tant que parents, il n'est jamais simple d'aborder ce sujet "tabou" avec son enfant. "Les parents sont conviés à des cafés parents durant lesquels le sujet du porno, la prévention, comment les protéger, comment en parler, est discuté", indique-t-elle.
Une éducation à la sexualité que confirme le Rectorat. Dans le cadre de l'éducation à la sexualité, les thèmes suivants peuvent être abordés dès l'école élémentaire: l'étude et le respect du corps et le respect de soi et des autres, la notion d'intimité et de respect de la vie privée, la prévention des violences sexistes et sexuelles et l'égalité femmes-hommes.
Au collège et au lycée, les thèmes abordés sont plus poussés : "liberté, responsabilité et respect face aux choix personnels (réseaux sociaux, internet, cyberharcèlement, pornographie..) et prévention des violences sexistes et sexuelles et de nouveau l'égalité femmes-hommes.
"Cette éducation vise à la connaissance, au respect de soi, de son corps et au respect d'autrui, sans dimension sexuelle stricto sensu à l'école élémentaire", indique l'Académie de La Réunion. "Elle est complétée à l'adolescence par une compréhension de la sexualité et des comportements sexuels dans le respect de l'autre et de son corps."
"Bien entendu cette éducation à la sexualité se fait de manière transversale (par plusieurs acteurs de l’éducation nationale formés dont les infirmières font partie), en lien avec les contenus d'enseignement ou par des séances dédiées (3 séances/an par classe d'âge homogène) et progressive en lien avec la maturité de l'élève", ajoute le Rectorat.
- Mais alors, que font les sites pornographiques ? -
51 % des garçons de 12 ans-13 ans fréquentent au moins une fois par mois un site pour adultes. Ce chiffre vertigineux vient souligner l’échec récurrent de la mise en place d’une barrière efficace à l’entrée des sites pornographiques.
Car si les sites sont en principe tenus de réserver leur accès aux seuls adultes, dans les faits, la plupart se contentent de demander aux internautes de cliquer sur une case pour certifier qu'ils ont plus de 18 ans.
Saisie par des associations, l'Arcom a mis en demeure 15 sites pour qu'ils instaurent un vrai contrôle d'âge, et a saisi la justice pour obtenir le blocage de sept d'entre eux, dont Pornhub. Le tribunal judiciaire de Paris doit se prononcer sur ce dossier le 7 juillet.
Ces "chiffres effrayants" montrent "l'urgence à agir", a réagi dans un communiqué le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, car les contenus porno font "le lit d'une société qui banalise la violence envers les femmes et participent à la hausse des violences sexistes et sexuelles".
"Qu'attendons-nous pour nous attaquer à ce problème de santé publique ?", a demandé de son côté l'association Osez le féminisme! "Nous exigeons que le gouvernement fasse enfin appliquer la loi", a-t-elle ajouté.
Le gouvernement a justement présenté le 10 mai un projet de loi visant à "sécuriser et réguler" internet. Ce texte confie à l'Arcom le pouvoir de bloquer et déréférencer les sites porno qui ne respectent pas la loi.
Pour aider les parents d'ailleurs, il existe plusieurs numéros. Le 3018, le numéro national pour les enfants, les adolescents et les parents sur toutes les questions liées aux usages numériques des jeunes, permet de passer un appel gratuit, anonyme et confidentiel pour discuter de sujets comme la sexualité avec un conseiller. Le numéro est ouvert 7 jours sur 7, de 9 à 23 heures.
Vous pouvez également joindre le Fil Santé jeunes, de façon gratuite et anonyme au 0800 235 236 entre 9h et 23h. Le ministère de la Santé a également mis en place le 0 800 08 11 11, du lundi au samedi de 9h à 20h, pour obtenir des conseils en matière de sexualité et de contraception.
ma.m/www.imazpress.com/[email protected]

Il fut un temps où les parents pouvaient bloquer ce type de sites. Aujourd'hui, nos gamins en savent bien plus que nous sur le fonctionnement des ordinateurs, et sont donc capables de contourner tous les verrous!
Ndiaye S'il pouvait donner, conformément à l'emploi du temps, des cours de français de math, chiche.... et ne pas supprimer les cours de technologie chiche..... pour le reste à 12-13 ans les marmailles ont souscrit à un abonnement internet ?