41 % des espèces sont aujourd'hui menacées contre 30 % en 2010. C'est en tout ce qui ressort de la liste rouge de la flore menacée de La Réunion. Une liste datant de 2010, actualisée par le Conservatoire Botanique National de Mascarin (CBN-CPIE Mascarin), avec le soutien scientifique et technique du Comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), de l’Office français de la biodiversité (OFB) et du Muséum national d'Histoire naturelle,. Treize ans après le premier bilan, l’état de la flore de l’île de La Réunion fait apparaître une situation très préoccupante (Photo d'illustration : www.imazpress.com)
Les connaissances sur le patrimoine végétal de l’île se sont significativement améliorées depuis cette date, mais les mesures de conservation déployées ne portent pas encore leurs fruits et ont besoin d’être renforcées.
Reconnue pour la richesse et l’originalité de sa flore, l’île de La Réunion abrite de nombreuses espèces qui n'existent nulle part ailleurs au monde. L’état des lieux réalisé a porté sur l’ensemble de la flore vasculaire réunionnaise (orchidées, arbres et autres plantes à fleurs, fougères et plantes alliées), soit au total 962 espèces indigènes.
Au terme des analyses, les résultats montrent que 395 espèces sont menacées et 31 autres quasi menacées, tandis que 41 espèces ont déjà disparu. Le bilan dressé met en évidence les pressions croissantes qui pèsent sur la flore de l’île.
- Les espèces exotiques envahissantes : l’ennemi n°1 -
Comme dans la plupart des îles océaniques, les invasions biologiques par des espèces introduites constituent une cause majeure d’érosion de la biodiversité. À tous les étages de la végétation, les plantes exotiques envahissantes représentent la principale menace pour la flore native de La Réunion : la Liane papillon (Hiptage benghalensis), d’origine indo-malaisienne, étouffe par exemple les vestiges de la forêt sèche et les derniers pieds du très rare Bois puant (Foetidia mauritiana), classé "En danger critique", tandis que l’Ajonc d’Europe (Ulex europaeus) prend le dessus sur les plantes de haute montagne comme le Petit Tamarin des hauts (Sophora denudata), classé "En danger".
Les animaux introduits menacent également la flore locale en consommant les plantes et leurs semences. C’est le cas de l'Achatine (Lissachatina fulica), un grand escargot d'origine africaine, ou des rats (Rattus spp.), qui mettent sous pression des espèces comme le Bois d’ortie (Obetia ficifolia) et le Mazambron marron (Aloe macra), tous deux classés "En danger".
- Destruction des habitats naturels, prélèvements d’espèces et perte de fonctionnalité des écosystèmes -
La destruction et la dégradation des habitats naturels dues à l’urbanisation et au développement agricole entraînent la disparition progressive de nombreuses espèces, en particulier dans les zones littorales et de basse altitude. Cette menace marquée concerne par exemple le Bois de lait (Tabernaemontana persicariifolia) et la Mauve (Abutilon exstipulare), inféodés à des milieux secs et classés "En danger critique".
En raison de leur intérêt ornemental ou de leur usage dans la pharmacopée traditionnelle, d'autres espèces sont soumises à une forte pression de prélèvement. C’est le cas du remarquable Phajus tétragone (Phaius tetragonus), une orchidée "Quasi menacée", ou de la Cadoque blanche (Strongylodon lucidus), victime des propriétés médicinales qui lui sont prêtées et désormais "Vulnérable".
Enfin, le déclin et la disparition des animaux assurant la dispersion des semences et la pollinisation des fleurs entravent la régénération de nombreuses espèces. L’extrême fragmentation des milieux due à la déforestation, à l’agriculture et à l’urbanisation entraîne l’isolement de certaines populations de plantes, ce qui altère la capacité des espèces à se reproduire lorsque les individus se retrouvent éloignés les uns des autres. C’est le cas du Bois de senteur blanc (Ruizia cordata), classé "En danger critique". Cette perte de la fonctionnalité des écosystèmes risque de poser de grands problèmes de conservation dans le futur.
- Amélioration des connaissances et aggravation de la situation -
Depuis le premier état des lieux réalisé en 2010, les connaissances sur la flore de l’île ont nettement progressé, grâce aux programmes d’inventaires et aux prospections déployées sur le terrain par des professionnels et des amateurs. Parmi les bonnes nouvelles, quelques espèces présumées disparues comme la Lobélie petite (Lobelia parva) ont pu être retrouvées. Cependant, de nombreuses espèces au statut de conservation auparavant inconnu, classées dans la catégorie "Données insuffisantes", se révèlent finalement menacées.
Dans cette actualisation de la Liste rouge, l’un des faits les plus marquants est que 95 espèces voient leur situation s’aggraver parmi les 97 connaissant un véritable changement de leur statut de conservation. C’est notamment le cas de l’Oecéoclade versicolore (Oeceoclades versicolor), une espèce endémique de La Réunion dont la situation s’est dégradée en raison des prélèvements, des défrichements et des espèces exotiques envahissantes, passant en 13 ans de "En danger" à "En danger critique".
- Enjeux pour l’avenir -
Face à ces menaces, des actions de conservation importantes ont été mises en place. Des habitats naturels sont en cours de restauration, la lutte contre les espèces exotiques envahissantes s’accentue dans les milieux prioritaires, et des espèces patrimoniales bénéficient de réintroduction ou de plans nationaux d'actions.
Cependant, ces programmes n’apparaissent pas suffisants et beaucoup ne portent pas encore leurs fruits, car ils concernent principalement des plantes ligneuses qui présentent des temps de régénération longs. La préservation de ces espèces nécessite la poursuite des efforts engagés pour observer de réelles améliorations.
L’état des lieux de 2010 avait déjà permis d’identifier des priorités d’actions, d’orienter les stratégies de connaissance et de conservation et d’étendre la liste des espèces protégées de l’île. Face aux menaces croissantes, les nouveaux résultats de la Liste rouge appellent à renforcer significativement les actions de préservation, pour enrayer les pressions et sauvegarder l’exceptionnelle diversité de la flore de La Réunion. Ils incitent également à une prise de conscience collective et à un changement indispensable de nos pratiques au quotidien pour stopper et inverser la perte de notre patrimoine naturel.
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Je suis pas sûr que le phalaenopsis soit le bon choix pour illustrer l’article 😄
Et l'utilisation des intrants dans l'agriculture y est-elle pour quelque chose ?
Je pense au prolongement de l'utilisation du Glyphosate....
Et d'ajouter à ce funeste tableau :
https://data.footprintnetwork.org/?_ga=2.31071158.8...#/
(le site semble avoir une panne dans l'affichage des données)
Classement des 10 zones à la plus faible capacité biologique (%) en 2020 (l’empreinte écologique de Singapour est ainsi égale à 99,5 fois la biocapacité que son territoire lui permet.)
La Réunion est sur le 3ème marche du podium du pire ! https://climate.selectra.com/fr/empreinte-carbone/pays-pollueurs