Le tribunal administratif de La Réunion a été saisi ce jeudi 27 avril 2023 sur un référé-liberté déposé contre l'opération de décasage de Majicavo, à Mayotte. 80 familles, habitant sur place, sont représentées par l'association "Prêt à tout pour le bien-être". L'opération a déjà été suspendue par le tribunal judiciaire de Mamoudzou. La justice a en effet ordonné "de cesser toute opération d’évacuation et de démolition des habitats visés", estimant que cela mettrait "en péril la sécurité" des autres habitants du bidonville, dont les logements seraient fragilisés. Les familles espèrent désormais faire annuler l'arrêté préfectoral dans son ensemble. La décision du tribunal administratif a été mise en délibéré (Photo sly/www.imazpress.com)
Si le tribunal judiciaire de Mayotte a déjà tranché, la préfecture a annoncé son intention de faire appel de cette décision. C'est dans ce contexte que les avocats des familles menacées d'expulsion ont déposé ce référé-liberté. Une procédure dénoncée par la défense de la préfecture de Mayotte, représentée par Maître Alain Rapady et Maître Olivier Tamil.
"Nous sommes dans une hystérisation juridictionnelle collective. Nous avons demandé au président du tribunal administratif de ramener de l'ordre dans tout cela, que tout le monde se calme" a en effet dénoncé Maître Alain Rapady. Ecoutez :
Du côté des avocats des réquerants, on estime que cette procédure est nécessaire pour annuler définitivement l'arrêté préfectoral portant sur la destruction des habitations de Talus 2. "Le tribunal judiciaire est contraint dans ses compétences, celles du tribunal administratif sont différentes. On ne peut pas dire qu'il n'y a rien à juger" a estimé Me Jean-Marie Biju-Duval.
Les réquerants ont longuement dénoncé "le caractère illégal" et les "atteintes aux droits fondamentaux" de l'arrêté préfectoral. "Le tribunal judiciaire de Mayotte reconnait la violation d'un droit fondamental, le tribunal administratif ne peut être indifférent à cette décision" a déclaré Me Jean-Marie Biju-Duval.
"Si le tribunal administratif a accepté cette audience, c'est qu'il reconnait le caractère urgent de notre demande. Aujourd'hui, nous demandons l'annulation de l'arrêté dans sa totalité" a ajouté Maître Marjam Ghaem, dénonçant elle aussi "l'illégalité" de cet arrêté.
"La préfecture a manqué à ses devoirs. Elle prétend par exemple que lors d'une évaluation du domicile d'une famille, celle-ci n'était pas présente au moment des faits. Chose impossible car le couple est parent de cinq enfants, dont quatre handicapés. Deux d'entre eux sont allités, il y a toujours quelqu'un présent, et pourtant la préfecture assure ne pas avoir pu procéder à l'évaluation" ont expliqué les requérants. "On peut aussi citer l'exemple de cette famille dont la mère est Française, mais dont les parents sont Comoriens et en situation de handicap. Encore une fois, la préfecture ne porte aucun intérêt à ce qu'il se passe" ont-ils ajouté.
"Nous avons assisté aux catalogues habituels sur les droits fondamentaux, mais il faut dresser un constat : aujourd'hui la situation, s'agissant de Talus 2, est gelée, et le préfet de Mayotte a exécuté cette ordonnance jusqu'à la décision de la cour d'appel" a estimé de son côté Me Alain Rapady. "On peut s'interroger légitiment sur l'intérêt de saisir à nouveau le président d'une juridiction alors qu'une autre juridiction a déjà statué dans le même sens, et que ce sont les mêmes demandes qui sont présentées" a-t-il ajouté.
Il a appelé à "arrêter de dénaturer la procédure" et que "chacun tienne son rôle". Dans ce contexte, la défense à demander le rejet de la demande de référé-liberté. La décision sera rendue sous 48 heures.
En attendant, les avocats de la préfecture prépare la demande d'appel concernant la suspension de la destruction des habitations de Talus 2 décidée par le tribunal judiciaire de Mayotte. Une autre audience est aussi programmée pour le 2 mai concernant l'annulation d'un arrêté préfectoral publié en février, portant lui aussi sur la destruction d'habitats.
as/www.imazpress.com / redac@ipreunion.com