Tribune libre de Joé Bédier

A propos du port de Bois Rouge

  • Publié le 10 octobre 2016 à 14:33
Joé Bedier

J'ai eu l'occasion à plusieurs reprises d'exprimer publiquement ma position sur les démarches locales pour un grand port maritime à Saint-André - Bois-Rouge. Je ne parle pas de " projet " pour une raison simple : il s'agit d'un équipement de statut national et jusqu'à preuve du contraire l'Etat n'a pas aujourd'hui de projet sur Bois-Rouge.

Personne ne peut aller contre tout ce qui peut contribuer au développement et à un aménagement équilibré du territoire et si cela passe par un second port en eau profonde, pourquoi pas. En tout cas il y a nécessité à Saint-André, et cela fait partie des propositions de mon mouvement pour la ville, d’une grande zone d’activités industrielles qui fait défaut aujourd’hui, de même que le besoin d’espaces d’accueil pour les entreprises artisanales. Ce que je critique, mais absolument pas dans le but d’empêcher, ce sont les conditions dans lesquelles ce dossier est traité aujourd’hui.

D’abord le fait qu’une démarche  soit  engagée  sans que les principaux intéressés n’y soient associés, l’Etablissement public gérant le grand port maritime et l’Etat. On ne demande qu’à comprendre,   s’agissant tout de même d’une situation  assez curieuse,  sans précédent  et  qui n’est pas sans conséquences pour tout le monde et d’abord pour les contribuables locaux. Voilà en effet un équipement d’Etat pour lequel on est en train d’exposer des dépenses importantes en études et autres structures aux seuls frais des collectivités locales. Il est donc temps que l’Etat se positionne, soit en participant aux études nécessaires, notamment sur le plan financier, soit en arrêtant les frais afin d’éviter des dépenses en pure perte, en temps, en énergie et en impôts  pour les Réunionnais.

Car les obstacles que doit franchir  un tel projet sont loin d’être négligeables. A commencer par la protection forte dont bénéficie sur le plan environnemental le site, classé zone prioritaire d’acquisition du conservatoire du littoral, inventorié ZNIEFF 1 et 2 (zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique)  et désigné au SAR comme espace remarquable du littoral ne pouvant permettre  de nouvelles  installations et activités industrielles. Tous ces classements n’ont pas été faits à la légère. Il faut ajouter que le site est en zone rouge (aléa fort) pour la protection contre les inondations. Plus que d’obstacles, il s’agit d’intérêts qui ne sont pas moins légitimes, respectables et sérieux que d’autres.

Il y a ensuite l’esprit dans lequel la démarche est conduite. On a un projet d’aménagement (port et zone industrielle) et il doit aboutir coûte que coûte, quitte à tout bousculer sur son passage, à fouler aux pieds les lois et règlements et les principes élémentaires du débat démocratique. Les sorties violentes de Jean-Paul Virapoullé au conseil municipal du 6 octobre constituent à cet égard un sommet d’arrogance et de mépris pour nos institutions et lois républicaines. Jugez-en : " l’autorité environnementale, je m’en fous "… " Ce ne sont pas les services de l’Etat qui commandent mais ceux qui ont reçu l’onction populaire " (comprenez que dans son esprit " l’onction " populaire  relève plus du droit divin que de la légitimité démocratique)… " Rien ne m’empêchera de faire le port " (entendez : " mon port ")…On ne peut mieux signifier à qui veut l’entendre que l’on est au-dessus des lois et de tous ceux qui ont mission de les faire appliquer ! Ce n’est pas ainsi que je conçois la responsabilité en politique.

Joé Bédier
Conseiller régional
Conseiller municipal de Saint-André
Président de l’UDSA

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