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Tribune libre de la CGPER

La filière volaille en danger : qui a fait entrer le renard dans le poulailler ?

  • Publié le 7 juillet 2023 à 07:04
  • Actualisé le 7 juillet 2023 à 07:05
Jean Michel MOUTAMA

À la Cgper, nous sommes fermement convaincus que la promotion et la défense des productions agricoles locales est une ardente priorité et qu’elle doit reposer sur des actions concrètes et des engagements solides de la part de tous et notamment aussi du soutien des pouvoirs publics. (Photo Jean Michel MOUTAMA photo Sly imazpress)

De quoi parle-t-on dans la filière avicole pays :

Depuis  des  semaines,  les  éleveurs  font  la  grève  devant  l’abattoir  EVOLLYS,  URCOOPA  et  la  DAAF,  bloqué  par  une  vingtaine  d’éleveurs  de  volaille  d’une  des  deux  coopératives  avicoles  de  l’île,  en  raison d’un conflit entre ces producteurs et l’abattoir.

Les tentatives de conciliation et de médiation par l’État entre les différentes parties n’ont pas abouti  à un accord à ce stade.

Mais  pour  autant  les  éleveurs  restent  mobilisés  et  ils  le  doivent,  s’ils  veulent  obtenir  une  augmentation du prix du Kg de volaille commercialisé par une autre société qui dépend également de  l’actionnariat  d’EVOLLYS  et  leur  revendication  de  revoir  l’actionnariat  et  la  gouvernance  des  outils  d’abattage et de commercialisation de la production de volaille des éleveurs.
Nous disions  récemment dans notre prise de position contre l’importation d’orange d’Egypte à bas  prix  par  un grand groupe  privé,  que  des accords avaient été  trouvé  dans le  temps  pour  les  filières  viandes, avec l’ARIBEV et l’ARIV pour protéger ces filières des importations massives de l’Europe ou  d’Asie.

Il semblerait que ces temps soient maintenant révolus. Or, la production de volailles de chair de La  Réunion, la plus importante des DOM est une production de diversification qui se caractérise par la  taille réduite de ses exploitations avec des fermes de référence à 600 m².

Compte-tenu du contexte économique et de la situation préoccupante de l’emploi sur l’île, le modèle  de  développement  choisi,  basé  sur  une  exploitation  de  taille  familiale  a  permis  de  favoriser  la  création d’emplois. Mais il y a quelques temps, l’abattoir de volailles de Crête d’Or à Etang-Salé, mis  en service en 2014 a été vu à l’époque comme surdimensionné, s’est révélé être un gouffre financier comme le couvoir de Crête D’or.

Pour stopper l’hémorragie, l’Etat a mis la pression sur l’Abattoir Duchemann & Grondin installé dans  les hauts de Saint Joseph qui  s’en sortait trés bien à Jean Petit pour qu’il se rapproche de la SA Crête  d’Or  pour en  prendre  la gestion  de  l’abattoir. Il est à  noter  que tous  les  partenaires  de  la  filière  à signer le protocole pour  relancer la production et sécuriser les élevage en Préfecture en décembre  2017.

Ce que l’on pouvait craindre est arrivé par une reprise en main du groupe Crête d’or par la Holding de Ducheman-Grondin sous l’entreprise EVOLLYS production qui contrôle l’abattoir de l’Etang salé et  EVOLLYS Commercialisation qui contrôle la mise en marché de la totalité de la production de volaille  en  fillière  organisée  avec  les  deux  groupements  (AVIPOLE  et  CFS)  via  les  structures  sous  les  six marques commerciales suivantes : Ti’gayar, Crête d’Or, Grand Matin, Creolay, Fumet des Salazes, et  Kokoriko.

Personne ne s’est posé la question de la concentration d’un  tel pouvoir dans les mains d’un seul  acteur, pas même la Prefecture qui a insisté fortement pour que cette reprise se fasse pour sauver  la filière volaille à la réunion.

Aujourd’hui le renard ou le loup, peu importe est dans le poulailler !!!

- Est-ce cela le résultat de l’économie de marché ? 

- Les  services  de l’Etat en voulant  sauver la  coopération a  finalement  contribué à mettre en  place un monopole du poulet à La Réunion ?

- Qu’en pensent les consommateurs ?

On ne le sait pas vraiment, mais ils ont bien vu le prix de la volaille  flamber dans les  rayons !!! Les  éleveurs eux cependant n’ont pas reçu leur part de l’augmentation du prix de vente de la volaille. On  peut se poser la question où sont parti les marges commerciales, forcément une entreprise a profitée  ces  derniers mois  de  l’effets  « Ukraine,  augmentation  des matières  premières,  une  chose  est  sure  c’est  que  c’est  les  consommateurs  qui  paient  les  prix  forts  de  la  volaille  en  grande  surface notamment. 

Pourtant, pour eux le prix des intrants a augmenté !! le prix de la nourriture, les soins à apporter  pour protéger leurs élevages ont redoublés, la main d’œuvre est toujours difficile à trouver. 

Ils subissent ainsi de plein fouet, la crise et l’inflation,  alors que le prix de la volaille a augmenté dans  les rayons, ils ne perçoivent eux qu’un faible revenu qui ne leur permet plus de vivre décemment de  leur métier.

Leurs revendications sont donc légitimes et on ne sortira pas de cette crise sans se mettre autour de  la table pour prendre en compte les intérêts des éleveurs, qu’ils soient indépendants,  en coopérative ou qu’ils dépendent d’une société privé.

Mais voilà, nous sommes confrontés à deux modèles qui s’opposent du moins dans sa conception et  dans sa logique économique : « Jouer collectif » ou « Jouer personnel ». 

Manifestement l’organisation de la filière volaille a perdu ce point de vue important qui a présidé à  sa  naissance  et  à  son  développement :  « Le  jouer  collectif »  pour  une  Réunion  qui  gagne  et  ou  chaque  éleveur  quel  que  soit  la  taille  de  son  exploitation  perçoit  une  juste  rémunération  de  son  travail.

Aujourd’hui  c’est  un  Homme,  une  société  qui  décide  des  prix,  de  l’avenir  des  éleveurs  et  qui  monopolise tous les maillons de la filières : l’abattage, la commercialisation, demain la production de  poussins et les  bénéfices.  L’acquis  philosophique  de la  coopération, « un  homme,  une voix » a été  passé doucement à la trappe !!!

Il ne s’agit donc plus de s’insurger ou de déplorer, mais bien d’agir pour que ces deux conceptions  de  l’élevage  puissent  discuter  entre  eux  et  trouver  le  bon  tempo :  Celui  d’empêcher  que  la  production locale ne s’effondre ou soit destabilisé par la mésentente.

Finalement qui en profiterait, sinon les importateurs et la grande distribution qui s’empressera de  faire entrer à la Réunion, les produits de dégagement de l’Europe, et on peut se poser la question  sur un groupe Mauricien qui vient de prendre possession d’une chaîne de magasin à la Réunion qui  pourrait demain inonder le marché Réunion de volaille ?

Le pompier d’hier, celui la même qui a fait entrer le renard dans la bergerie, crie au Feu…aujourd’hui. La filière serait en danger, et elle risque de ne plus percevoir les aides de l’Europe… 

La  filière  organisée  regroupait  150  producteurs  en  2020,  au  sein  de  deux  coopératives  :  AVI-POLE  Réunion et la Coopérative des Fermiers du Sud  (CFS), managée ou non par l’un des acteurs devenu  hégémonique depuis qu’il est entré dans le poulailler. 

Ces deux coopératives sont aujourd’hui désunies mais représentées dans l’interprofession ARIV par  l’Association des Éleveurs de Volailles de La Réunion (AEVR).

Nos  filières  agricoles  locales  soutenues  depuis  plus  de  trente  ans  par  les  politiques  agricoles  publiques doivent pouvoir faire face à cette situation nouvelle et paradoxale, pour la défense de nos  agriculteurs contre la grande distribution et contre l’hégémonie du capital, sur la coopération. 

Quand à la CGPER nous disons cela, nous n’oublions pas les indépendants qui œuvrent et travaillent  également à garantir un produit de qualité. Ils n’ont jamais vraiment été considérés et pris toute leur  part dans ces discussions avec l’Etat et les collectivités locales.

Mettons  toutes les cartes sur  table et sortons par le haut de cette crise. Il est nécessaire que nous  débattions  avec  les  deux  sociétés  l’abattoir  Evolys  et  la  société  Duchemann  et  Grondin  qui  commercialise toutes les volailles produites à la Réunion.

Il nous faut trouver un modèle autre qui associerait les coopératives, les sociétés privées, les éleveurs  indépendant et protéger les filières de production locales.

Si  l’ARIV  souhaite  mettre  en  place  une  table  ronde  avec  tous  les  partenaires  professionnels  et  syndicaux  pour  évoquer  ces  sujets  et  trouver  des  solutions  pour  permettre  aux  agriculteurs  et  éleveurs de sortir par le haut du conflit qui oppose deux modèles de développement, alors la CGPER  prendra toute sa part à la discussion et aidera, j’en suis certain à trouver les meilleures solutions.

Nous  en  avons  les  moyens,  par  un  plus  stricte  contrôle  des  services  de  l’Etat  pour  notamment favoriser une meilleure distribution des profits de la filière Volaille, empêcher la main mise d’un privé  sur  un  outil  collectif,    financé  par  l’argent  public. Il  en  va  de  la  pérénité  des  éleveurs  qui  ont  beaucoup investis ces dernières années dans la filière.

Si nous en avons la volonté,  nous pourrons sortir par le haut de cette crise. 

Jean Michel Moutama
Président de la CGPER

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