Madame la Présidente, Madame la Première Ministre (Photo photo RB imazpress)
Mes collègues
Ce n’est pas sans une certaine émotion que je m’exprime aujourd’hui à la tribune de cet hémicycle. Emotion, parce que l’opportunité pour un Ultramarin de demander à ses collègues de faire tomber un gouvernement est très rare.
En faisant ce choix, la fi démontre très clairement son attachement aux peuples d’Outre-Mer. Mme la ministre, la casse en règle de tous les acquis des citoyens en France hexagonale, ont une puissance supérieure dans les Outre-Mer.
Alors nous vous disons : ARET TOTOCHE ANOU!
C’est la 4ème fois que vous faites le choix du passage en force. Et si le droit constitutionnel vous l’autorise, nous, nous avons le devoir de vous combattre. Notre motion de censure est une motion de défiance vis-à-vis de votre gouvernement. Et nous nous faisons les porte-paroles du peuple qui a montré qu’il ne vous faisait plus confiance.
La première fois, lors de la présidentielle où le candidat devenu président a été largement battu dans nos territoires. Et lors des législatives où votre camp a subi une nouvelle et sévère déroute.
Déroute qui se traduit par un groupe minoritaire ici, à l’Assemblée Nationale, qui essaye d’imposer une politique rejetée par la grande majorité des Françaises et des Français. Aujourd’hui, vous n’avez ni la légitimité populaire, ni la légitimité parlementaire.
Vous usez et abusez du 49.3 parce que vous n’aimez pas le débat, vous ne respectez pas la représentation nationale. Vous sortez un nouveau 49.3, alors que seuls les crédits de 5 missions sur 34 ont été débattus ! Soit seulement 15%.
Ainsi vous tirez un trait sur les attentes :
- D’1 million 200000 enseignants qui ne connaitront pas l’évolution de leurs effectifs et de leurs salaires
- Des 430.000 élèves en situation de handicap pour lesquels il manque d’AESH
- Des 13,5 millions de personnes qui perçoivent de faibles APL qui ne seront pas revalorisées.
- Des 34.968 communes confrontées à la suppression de la CVAE
- Des 16 millions de licenciés, de club sportif qui ne connaîtront pas les aides qui leur sont octroyées après deux années de COVID.
- Sur ces milliers d’enfants qui dorment dans la rue ou dans des hébergements précaires ;
L’absence de débat va vous permettre d’atteindre vos objectifs :
- Pas de retour de l’ISF, pas de taxe sur les superdividendes et des milliards d’aides sans condition pour vos amis les riches.
- Par contre toujours moins pour les plus pauvres, et notamment nos compatriotes ultramarins à qui vous avez sucré par le seul fait du prince 150 Millions d’euros pourtant débloqués par les votes d’une trentaine d’amendements de la NUPES.
Je pourrais continuer la liste de tout ce que vous avez mis à la poubelle pendant longtemps.
Cela démontre que votre conception de ce qu’est la vie des Françaises et des Français n’est pas la nôtre.
Oui, nos conceptions sont différentes :
Oui nous, nous sommes du côté du peuple en souffrance alors que vous êtes du côté des riches. Oui, nous, nous sommes pour des mesures pour relever le défi écologique, alors que vous vous avez été condamné pour inaction climatique. Nous : la prise en compte des besoins des peuples, Vous : le mépris.
Un mépris qui ne vous gêne pas car vous faites passer « l’équilibre budgétaire » avant la souffrance des gens. Nous c’est l’inverse, c’est le peuple avant la finance.
Voilà la grande différence entre nous.
Avec votre 49.3 vous balayez des avancées votées ici même dans cet hémicycleen faveur de l’urgence climatique, à savoir 12 milliards d’euros supplémentaires pour la rénovation énergétique des bâtiments ainsi que 3 milliards d’euros en faveur du fret ferroviaire.
Vous, vous réfugiez encore et toujours derrière votre maîtrise des dépenses publiques. Pourtant, nous avions proposé des solutions pour faire face à ces besoins : vous avez répondu niet.
Nous vous avons demandé de renoncer à la suppression de la CVAE qui pourrait rapporter 8 milliards d’euros d’économie par an. Nous vous avons demandé de taxer les super profits : cela pourrait rapporter près de 20 milliards d’euros. Mais vous avez fait le choix d’une politique anti écologique. Et antisociale.
Les amendements déposés par la NUPES et adoptés contre l’avis du gouvernement avec le soutien de tous les parlementaires d’Outre-Mer pour augmenter de plus de 200 millions le budget.
Vous les avez purement et simplement, jetés à la poubelle !
Or, même si c’était largement insuffisant, ces moyens permettaient de garantir le droit à l’eau ;
D’améliorer le droit au logement ;
De mettre en place un plan d’urgence sociale contre la vie chère ou de lutter contre l’érosion côtière.
Quel mépris alors que ces derniers mois, des signaux politiques majeurs ont été envoyés depuis les Outre-Mer. Que Je les qualifie moi d’historiques.
17 mai : l’appel de Fort de France. Un appel solennel à l’Etat pour un changement profond de la politique dans les Outre-Mer et une réorientation des relations entre Paris et les territoires ultramarins.
09 juillet : le ministre des Outre-Mer et le ministre délégué ont promis un Oudinot de la vie chère.
20 juillet : conférence de presse commune à l’assemblée nationale des députés OM pour dénoncer l’abandon des Outre-Mer.
07 septembre : réunion de travail entre le président de la République et les élus ultramarin.
Macron à l’Elysée s’est engagé pour le plein emploi en Outre-Mer, il s’est dit prêt à faire bouger les normes et à les adapter aux territoires. Il s’est prononcé pour une mise à plat de notre modèle économique qui entraine cherté de la vie et pauvreté.
Mais force est de constater que votre comportement illustre parfaitement que ces belles paroles n’étaient que du pipeau. Vous muselez les débats confirmant ainsi votre mépris et votre abandon des Outre-Mer. Le sénateur visionnaire Paul Verges disait au sénat en 2016 :
La Réunion – et les outre-mer doivent tourner le dos au modèle actuel ; nous devons ouvrir la voie à un développement durable, fondé notamment sur l’objectif stratégique de l’autonomie énergétique. A un codéveloppement durable. La condition pour ouvrir cette nouvelle voie, c’est que Paris prenne conscience de l’urgence ….., de la rapidité de l’aggravation de la crise, de la nécessité de réformer. Ce nouveau modèle de développement, tournant le dos au système actuel doit briser le système politique post colonial.
Si, par manque de courage ……, on laisse pourrir cette situation, les conditions sont créées pour une implosion sociale. Il s’agit de réformer sur 15 ou 20 ans, mais de commencer tout de suite.
Malgré cette alerte, les gouvernements successifs persistent dans l’ignorance.
Vous essayez de vous draper dans une ouverture d’esprit. La réalité est toute autre : 80% des amendements retenus pour ce budget sont de vous mais pas de nous.
Aussi mes chers collègues, j’appelle solennellement à la solidarité de tous les parlementaires. Il ne doit pas avoir d’opposition de façade. Aucun d’entre nous ne doit servir de bouée de sauvetage à ce gouvernement. Car il manque à ce budget un élément capital.
Et je cite Aimé Césaire qui de la place ou je me trouve prononçait ceci:« il lui manque de ne pas laisser entrevoir que si la différence existe, toutes les différences ne sont pas pour autant égales entre elles. Il manque à votre projet, en somme, de n’avoir pas voulu, si je puis dire, différencier la différence ». Fin de citation.
Les peuples d’Outre-Mer ne demandent pas la charité. Nous sommes des Français, autant que vous.
Nous réclamons reconnaissance, respect, solidarité et égalité.
N’oubliez jamais : sans les Outre-Mer que serait la France ? Un pays continental c’est tout. Avec les Outre-Mer vous avez ce rayonnement planétaire vous apportant de la richesse à tous les niveaux.
Alors mes chers collègues, les Ultramarins vous regardent : allez-vous être complices de cette politique néfaste, catastrophique pour les français d’une façon générale et encore plus pour les Outre-Mer ?
Votez cette motion de censure.
N’ayez pas peur du chantage à la dissolution. Au contraire, ce sera l’occasion de redonner la parole aux citoyens. Car nous, nous n’avons pas peur du peuple.
Nous le fréquentons et nous l’écoutons. Le temps d’un choix clair est venu : un autre monde est possible ! Il est à portée de vote.
Nous avons rendez-vous avec l’histoire. Je vous le dis avec gravité, et avec émotion, Ne ratez pas ce rendez-vous. En conclusion, Laurent VERGES avait déclaré dans cet hémicycle le 19 octobre 1987:
Nou la pa plis, nou lé pa moins, respektanou.
Je le dédie a mon ami et frère Carlos Martens Bilingo….
Je vous remercie.