Que peut-il bien se passer dans le vaste monde des daurades? Depuis trois semaines maintenant, c'est par milliers que ces poissons pĂ©lagiques (c'est-Ă -dire Ă©voluant en pleine mer) ont pris leurs quartiers dans les eaux allant des cĂŽtes rĂ©unionnaises aux eaux internationales. Aucun marin pĂȘcheur n'est en mesure d'expliquer ce soudain engouement des daurades pour notre zone. Pour sa part, le consommateur ne se pose pas de question et apprĂ©cie cette pĂȘche "miraculeuse". Et pour cause, le kilo de daurade est passĂ© de 18 euros Ă 12 euros
Le Let's go vient de s'amarrer Ă l'un des quais de la nouvelle darse de pĂȘche du port ouest au Port. Il revient de trois jours de pĂȘche en pleine mer. Ces cales dĂ©bordent de poissons. Surtout de daurades. Ă chaque rotation, le Let's go revient habituellement avec 10 unitĂ©s de ce poisson. Depuis trois semaines ce chiffre est multipliĂ© par 4, voire 5. Pascal Briand, patron pĂȘcheur, et Yannick Coeuret, marin pĂȘcheur, ne perdent pas de temps. Ils dĂ©chargent les cales et pĂšsent les pĂ©lagiques. Sur le quai FrĂ©dĂ©ric Gorlot, grossiste et porte parole de l'association interprofessionnelle de la pĂȘche et de l'aquaculture, attend Ă proximitĂ© de son camion frigorifique. "Les poissons sont pesĂ©s, embarquĂ©s dans le camion et immĂ©diatement livrĂ©s aux clients" note-t-il.Pas plus que les marins pĂȘcheurs, il ne peut expliquer l'afflux massif de daurades dans la zone. "Rien n'a changĂ© dans les techniques de pĂȘche, ni dans les zones de prĂ©lĂšvements et pourtant les daurades sont lĂ en masse" dit-il. Le phĂ©nomĂšne a Ă©tĂ© constatĂ© par tous les pĂȘcheurs, qu'ils soient cĂŽtiers ou en haute mer.
Le porte parole de l'interprofession ne veut pas parler de pĂȘche miraculeuse, car dit-il "je ne crois pas aux miracles", mais il souligne qu'il s'agit d'un fait aussi inexpliquĂ© qu'exceptionnel. "Du jamais vu de mĂ©moire de pĂȘcheur Ă La RĂ©union" n'hĂ©site pas Ă affirmer FrĂ©dĂ©ric Gorlot. Cette affluence est d'autant plus remarquable qu'elle a lieu Ă une pĂ©riode oĂč les daurades ne sont gĂ©nĂ©ralement pas prĂ©sentes dans la zone. "Elles sont plutĂŽt lĂ vers le mois d'aoĂ»t. En octobre, novembre, on pĂȘche plus du thon germon" indique FrĂ©dĂ©ric Gorlot
De la cale rĂ©frigĂ©rĂ©e du Let's go, Yannick Coeuret, dĂ©barque des dizaines de piĂšces. Pascal Briand officie Ă la pesĂ©e. Tous les poissons dĂ©passent tous les 10 kilos. "Et ils sont tous frais de chez frais" commente le porte parole de l'interprofession. Le but est d'ailleurs de faire en sorte que ces daurades arrivent Ă ĂȘtre Ă©coulĂ©e. "Il y en a une telle profusion qu'il devient de plus en plus difficile de les Ă©couler" note FrĂ©dĂ©ric Gorlot.
Pour que les marins pĂȘcheurs ne soient pas pĂ©nalisĂ©s, l'interprofession intervient, "ainsi les grossistes font un effort sur les prix d'achat et les revendeurs, de la petite poissonnerie Ă la grande surface, en font de mĂȘme. C'est une question de solidaritĂ© et une garantie de bon fonctionnement de la filiĂšre" souligne le porte parole de l'interprofession. Laquelle regroupe les marins pĂȘcheurs, les pĂȘcheurs cĂŽtiers, les transformateurs, les grossistes, les GIE (groupements d'intĂ©rĂȘts professionnels), les poissonneries et les aquaculteurs.
Le camion frigorifique de FrĂ©dĂ©ric Gorlot est plein. "Dans une demie heure le poisson est chez le client" se rĂ©jouit-il. Sur le quai un autre camion frigorifique s'installe Ă proximitĂ© du Let's go. Yannick Coeuret continue de dĂ©charger et Pascal Briand de peser. La pĂȘche "miraculeuse" devrait encore se poursuivre quelques jours.
Mahdia Benhamla pour











