De violents combats font rage jeudi dans et autour des plus grandes villes de la bande Gaza, dans la guerre opposant l'armée israélienne et le mouvement islamiste palestinien Hamas entrée dans son troisième mois.
Le bilan des victimes, dans le petit territoire palestinien surpeuplé où les paysages de ruines s'étendent, dépasse à présent 16.200 personnes, à 70% des femmes et des moins de 18 ans, selon le ministère de la santé du Hamas.
L'armée israélienne resserre l'étau autour des principaux centres urbains deux mois exactement après l'attaque sans précédent perpétrée par le Hamas depuis la bande de Gaza.
Elle a fait 1.200 morts en Israël, essentiellement des civils, et il reste 138 otages à Gaza sur environ 240 enlevés et emmenés à Gaza, selon les autorités israéliennes.
Des dizaines de chars et véhicules blindés israéliens ont pénétré dans la vieille ville de Gaza. A Khan Younès, plus grande ville du sud du territoire palestinien, l'armée dit avoir "tué des terroristes du Hamas et frappé des dizaines de cibles terroristes".
Elle déplore au total 87 soldats tués depuis le début de son offensive à Gaza.
Le Hamas, classé organisation terroriste par Israël mais aussi les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l'Union européenne, entre autres, a quant à lui diffusé des vidéos mercredi soir affirmant avoir tiré une salve roquettes depuis la bande Gaza en direction d’Israël et montrant des combats de rue enragés.
Plus de 11.000 roquettes ont été lancées vers Israël depuis la bande de Gaza en deux mois de conflit, la plupart interceptées.
- Prier et pleurer -
A l'hôpital Al-Aqsa, dans la ville de Gaza, 115 corps sont arrivés ces dernières 24 heures, dépassant désormais le nombre de blessés, d'après Médecins Sans Frontières (MSF).
Dans la morgue de l'hôpital al-Najjar, à Rafah, une vingtaine de cadavres enveloppés de plastique blanc, dont ceux, tous petits, de beaucoup d'enfants, étaient allongés par terre, leurs proches priant et pleurant.
L'ONG israélienne de défense des droits humains B'Tselem dénonce une crise humanitaire directement "voulue" par Israël, comme "moyen de faire pression sur le Hamas".
La population civile est poussée à se déplacer vers un périmètre de plus en plus exigu à Rafah.
Des milliers de Palestiniens qui s'y sont réfugiés, fuyant les combats, installent des camps de fortunes, tentant de survivre dans le plus grand dénuement.
Abdullah Abou Daqqa, de Khan Younès, et désormais à Rafah, est à bout: "depuis deux mois, on bouge d’un endroit à un autre, c'était les deux mois les plus durs. Nous avons beaucoup perdu (...): de l’argent, des enfants et nous nous sommes perdus nous-mêmes".
Il implore: "ce n'est dans l'intérêt de personne de prolonger cette guerre, et nous sommes très fatigués, nous dormons dans la rue".
Egalement à Rafah, et originaire du camp de Chati à Gaza City, Ahmad Hajjaj, décrie une situation "de pire en pire, il n’y a pas de solution politique, pas de nourriture pour vivre".
- Secteur médical "à genoux" -
Des appels internationaux s'élèvent une fois de plus pour exhorter Israël à mieux protéger les civils.
Prédisant un "effondrement total de l'ordre public bientôt" à Gaza, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a de nouveau appelé à un cessez-le-feu humanitaire.
"Le mandat de Guterres est un danger pour la paix mondiale", a rétorqué sur X (ex-Twitter) le chef de la diplomatie israélienne Eli Cohen, estimant que l'activation de l'article 99 et l'appel à un cessez-le-feu "constituent un soutien à l'organisation terroriste Hamas".
Jeudi, le chef de l'ONU a toutefois été soutenu par le directeur général de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), qui a évoqué sur Twitter un système de santé gazaoui "à genoux".
Le gouvernement israélien a cependant autorisé la livraison d'un "supplément minimal" de carburant à Gaza pour éviter un "effondrement humanitaire" et des épidémies, deux jours après un appel en ce sens des Etats-Unis, son principal allié.
Selon l'ONU, 1,9 million de personnes, soit environ de 85% la population, ont été déplacées par la guerre dans la bande de Gaza où plus de la moitié des habitations sont détruites ou endommagées par les bombardements israéliens.
La ville de Rafah, à la frontière avec l'Egypte, est le seul endroit où de l'aide humanitaire est encore distribuée, en quantité limitée, selon l'ONU.
Mercredi, 80 camions transportant des vivres et du carburant y ont accédé, contre 170 par jour en moyenne pendant la trêve en vigueur du 24 au 30 novembre et 500 avant le 7 octobre, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (Ocha) dans son point quotidien.
"Nous essayons d'augmenter l'aide humanitaire", assure pour sa part la Cogat, organise du ministère israélien de la Défense supervisant les activités civile dans les Territoires palestiniens.
Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a déclaré mercredi soir que les forces israéliennes "encerclaient la maison de (Yahya) Sinouar", le chef du Hamas dans la bande de Gaza, à Khan Younès, et considéré comme l'architecte de l'attaque du 7 octobre.
"Sinouar se cache sous terre", a affirmé ensuite Daniel Hagari, un porte-parole de l'armée, en allusion aux tunnels du Hamas sous Gaza.
L'armée israélienne a par ailleurs annoncé mercredi la découverte dans le nord du territoire, "au cœur de la population civile", près d'une clinique et d'une école, "d'un dépôt d'armes très important". Elle a aussi dit avoir tué à ce jour "la moitié des commandants" du Hamas.
- Venu voir "où ma fille est morte" -
Deux mois après l'attaque du 7 octobre, s'est ouverte jeudi au public à Tel-Aviv une exposition temporaire consacrée à la mémoire des 364 personnes abattues par des combattants du Hamas alors qu'elles participaient à un festival de musique dans le sud d'Israël.
Mercredi soir, les proches de victimes ont déambulé silencieusement dans cette reproduction à l'identique du site du festival Supernova.
Parmi les parents endeuillés, Amit Zender, 63 ans, vêtu d'un tee-shirt affichant la photo de sa fille Noa et les dates "2000-2023".
"Je suis venu voir à quoi ressemble ce festival où ma fille est morte", confie-t-il, réclamant un "musée permanent".
AFP

HALTE A LA GUERRE D'ISRAEL CONTRE LE PEUPLE PALESTINIEN !
La trêve à Gaza n’aura duré qu’une semaine, le temps d’échanger 80 des otages israéliens enlevés par le Hamas contre 210 des milliers de prisonniers palestiniens détenus par Israël.
Après avoir détruit et occupé le nord, tuant 15 000 personnes et chassant 1,7 million d’habitants, l’armée israélienne se lance désormais contre le sud. Sous prétexte « d’éliminer le Hamas » et de « poursuivre la guerre jusqu’à la victoire », Netanyahou et ses ministres d’extrême droite semblent prêts à anéantir Gaza.
Ils sont lancés dans une fuite en avant meurtrière contre les Palestiniens. À Gaza ceux-ci sont écrasés sous les bombes. En Cisjordanie, ils sont livrés à l’arbitraire des colons israéliens qui les chassent de leurs terres, coupent les routes d’accès à leurs villages, quand ils ne les abattent pas froidement. À Jérusalem Est, l’armée traque ceux qui affichent leur solidarité avec Gaza. Les quartiers arabes sont bouclés, leurs commerces fermés, leurs maisons souvent détruites.
La violence et les humiliations quotidiennes de cette occupation coloniale nourrissent une révolte légitime. Depuis le 7 octobre, et faute d’autres perspectives politiques, le Hamas apparaît comme le champion de la cause palestinienne. Mais c’est l’armée israélienne qui fait naître dans toute la Palestine des générations de révoltés, prêts à se battre et à mourir pour ne plus subir un enfermement à perpétuité, en l’absence de toute perspective.
Pour justifier le massacre commis à Gaza, Netanyahou, ses chefs militaires et leurs parrains occidentaux n’ont que la sécurité d’Israël à la bouche. Mais la population juive israélienne n’aura ni paix ni sécurité tant qu’elle restera complice de l’oppression des Palestiniens. Sa jeunesse passe ses meilleures années sous l’uniforme et se salit en participant à l’oppression coloniale. L’extrême droite et les colons les plus extrémistes pèsent de plus en plus sur la vie politique et sur les libertés.
De Macron à Biden, les dirigeants des grandes puissances « regrettent la rupture de la trêve » et exhortent Netanyahou à faire « moins de morts civils au sud qu’au nord ». Quelle hypocrisie ! Sans le soutien inconditionnel des États-Unis, sans les quatre milliards de dollars d’aides militaires versées chaque année, les dirigeants israéliens n’auraient pas l’armée la plus puissante du Moyen-Orient. Ils n’auraient pas pu déverser 40 000 tonnes de bombes sur Gaza en 45 jours.
Pour contrôler cette région stratégique et ses richesses, la France, la Grande-Bretagne puis les États-Unis n’ont cessé de dresser un peuple contre un autre, de tracer des frontières arbitraires, d’installer des régimes dévoués, d’abattre ceux qui n’étaient pas assez obéissants au prix de guerres sanglantes.
Pour faire diversion, les dirigeants américains reparlent d’une « solution à deux États ». Il faut un cynisme sans limite pour ressortir cette formule quand Gaza est un champ de ruines et la Cisjordanie morcelée par les colonies. Depuis 75 ans, ils ont laissé tous les gouvernants israéliens empêcher la formation d’un État palestinien en annexant ou colonisant des régions entières. Même l’Autorité palestinienne, créée après les accords d’Oslo, a été réduite à une force de police.
Pendant que les morts s’accumulent, les tractations se déroulent pour savoir quel appareil répressif encadrera les Palestiniens. Tous les protagonistes de ces marchandages, du Hamas à Israël, de l’Arabie saoudite à l’Égypte, en passant par le Qatar, la Turquie ou l’Iran, ont le plus grand mépris pour la population palestinienne. Pour eux, Gaza n’est qu’une arène pour accroître leur influence dans un Moyen-Orient transformé en poudrière par les grandes puissances.
Les États arabes, tout comme le Hamas, ne sont pas en lutte contre l’ordre impérialiste qui opprime les peuples, ils veulent s’y faire une place ! Il ne pourra pas y avoir d’issue pour les Palestiniens tant que les grands groupes industriels et bancaires imposeront leur loi du profit à la planète.
Ici en France, les politiciens au service de ces grands bourgeois et leurs médias utilisent le conflit en Palestine pour attiser les divisions entre travailleurs comme ils le font après chaque meurtre ou attentat. Ils présentent tous ceux qu’indigne le sort des Palestiniens comme des antisémites et inventent un choc de civilisation.
C’est une propagande révoltante qui ne peut qu’attiser la haine. C’est un piège dans lequel il ne faut pas tomber car cette division est un moyen de mieux nous exploiter aujourd’hui et de nous embrigader demain sur les champs de bataille.
Par-delà les frontières nationales, leurs origines ou leur religion, les travailleurs subissent partout le même système capitaliste, un système qui nous enfonce dans la barbarie et qu’il faut se préparer à renverser.
Nathalie Arthaud - porte parole nationale de Lutte ouvrière