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Bras de fer social en Allemagne sur la semaine de 28 heures

  • PubliĂ© le 8 janvier 2018 Ă  14:00
  • ActualisĂ© le 8 janvier 2018 Ă  14:11
Des ouvriers de l'usine Bombardier brandissent des panneaux au logo du syndicat allemand de la métallurgie IG Metall, à Hennigsdorf prÚs de Berlin (nord-est), le 8 janvier 2018

Le puissant syndicat allemand de la métallurgie IG Metall donne lundi le coup d'envoi d'un bras de fer social qui s'annonce comme l'un des plus durs de ces derniÚres années en Allemagne.


Plusieurs dizaines de débrayages sont prévus dans tout le pays, en particulier dans le secteur automobile, pour soutenir des revendications portant notamment sur la réduction du temps de travail à 28 heures hebdomadaires.
ConformĂ©ment Ă  une stratĂ©gie bien huilĂ©e de montĂ©e progressive de la pression, les arrĂȘts de travail affecteront des entreprises bien choisies, Ă  l'ouest en RhĂ©nanie du Nord-Westphalie (avec 700.000 grĂ©vistes annoncĂ©s), dans le sud avec le Bade-Wurtemberg et Ă  l'est avec les rĂ©gions du Brandebourg, de Saxe et Berlin.
Le mouvement va durer au moins une semaine. Des premiÚres grÚves d'avertissement, trÚs localisées, ont déjà été organisées la semaine derniÚre, notamment chez Porsche.
Depuis octobre, le syndicat exige pour les 3,9 millions d'employés du secteur une augmentation salariale de 6%. La fédération patronale, Gesamtmetall propose 2%. Rien d'inhabituel. En général, les parties se retrouvent à mi-chemin.

- Semaine de 28 heures -

Mais le conflit porte surtout cette fois sur un aménagement inédit du temps de travail demandé par IG Metall: le passage de la semaine de travail de 35 à 28 heures pour ceux qui le souhaitent, avec compensation partielle du manque à gagner salarial par l'employeur.
La formule serait valable deux ans au maximum et l'employeur devrait garantir un retour Ă  un poste Ă  plein temps.
Le patronat du secteur la juge inadmissible et impraticable. Il estime que prĂšs des deux tiers des salariĂ©s seraient Ă©ligibles Ă  cet amĂ©nagement du temps de travail et redoute un casse-tĂȘte administratif et des ateliers dĂ©peuplĂ©s.
Les employeurs soulignent également le risque de discrimination en cas de mise en place de ce régime pour les employés travaillant déjà à temps partiel pour un salaire réduit d'autant.
Cette question a dĂ©jĂ  fait achopper des nĂ©gociations de branche Ă  l'automne. Si l'impasse se confirme, l'Ă©tape suivante pourrait ĂȘtre la grĂšve dure, une raretĂ© dans ce pays pĂ©tri de culture de la cogestion.
Sans avancĂ©e du patronat, il sera "extrĂȘmement difficile de ne mener cette nĂ©gociation salariale Ă  bien en se bornant Ă  des grĂšves d'avertissement", a prĂ©venu ce week-end un responsable d'IG Metall Roman Zitzelsberger.
Les débrayages accompagnent traditionnellement les négociations salariales en Allemagne. En revanche IG Metall n'a pas organisé de grÚve nationale et illimitée depuis 2003.
Gesamtmetall menace lui de porter l'affaire devant les tribunaux. Le ton est déjà trÚs ùpre entre partenaires sociaux, dans un pays qui s'était habitué ces derniÚres années à des négociations sociales plutÎt apaisées dans un contexte de bonne santé de l'économie.

- Economie florissante -

La menace d'un conflit à durée indéterminée dans des industries florissantes et clés pour l?Allemagne, comme l'automobile ou les machines-outils, inquiÚte les patrons du secteur.
"Les grÚves ne sont généralement pas un moyen approprié pour résoudre les conflits salariaux, elles nuisent à l'exportation, donc à l'entreprise et in fine aux employés", a prévenu Bertram Brossardt, le dirigeant du patronat bavarois de la métallurgie et de l'industrie électrique.
IG Metall arrive à la table des négociations en position de force, porté par une conjoncture au beau fixe. Tous les fondamentaux de l'économie allemande, emploi, exportations, inflation sont dans le vert.
AprÚs avoir exigé pendant des décennies la redistribution des fruits de la croissance, il apporte cette fois une revendication neuve dans le paysage syndical mondial.
Avec prÚs de 2,3 millions d'adhérents, IG Metall, qui défend les salariés toutes catégories confondues dans l'industrie (Siemens, Thyssenkrupp), la sidérurgie, l'automobile (VW, Daimler, Porsche), l'électronique ou encore le textile est le plus gros syndicat d'Europe.

- © 2018 AFP

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