Climat : la NorvĂšge dans le collimateur de la cour de Strasbourg

  • PubliĂ© le 28 octobre 2025 Ă  10:13
  • ActualisĂ© le 28 octobre 2025 Ă  10:17
La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) à Strasbourg, le 27 septembre 2023

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) décide mardi si la NorvÚge a failli à ses devoirs en matiÚre "d'atténuation du changement climatique" dans le cadre de la délivrance en 2016 de permis pétroliers dans l'Arctique.

L'institution, basée à Strasbourg, a été saisie il y a quatre ans par six militants norvégiens nés entre 1995 et 2001, ainsi que les branches locales des ONG de défense de l'environnement Greenpeace et Jeunes amis de la Terre.

Selon eux, l'Etat, avant d'accorder ces licences de production pétrogaziÚres, "n'a pas procédé à une étude d'impact environnemental des effets potentiels de l'extraction pétroliÚre sur les obligations de la NorvÚge en matiÚre d'atténuation du changement climatique", indique la Cour dans un communiqué.

En cela, le pays a omis Ă  leurs yeux de remplir son "obligation de protĂ©ger effectivement les individus contre les effets nĂ©fastes graves du changement climatique sur leur vie, leur santĂ©, leur bien-ĂȘtre et leur qualitĂ© de vie".

Premier producteur de pétrole et de gaz d'Europe occidentale, la NorvÚge est réguliÚrement mise en cause pour son exploitation des hydrocarbures, source à la fois de prospérité mais aussi de dérÚglement climatique.

Les plaignants invoquent en particulier les articles 2 (droit à la vie) et 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l'homme.

- Bras de fer judiciaire -

La décision de la CEDH sera le point d'orgue d'une longue bataille judiciaire.

Le 10 juin 2016, le ministĂšre du PĂ©trole et de l'Énergie norvĂ©gien accorde Ă  13 sociĂ©tĂ©s privĂ©es, parmi lesquelles le champion national Statoil, les amĂ©ricains Chevron et ConocoPhillips et le russe Lukoil, 10 licences d'exploration sur le plateau continental norvĂ©gien, en mer de Barents.

S'appuyant à l'époque sur l'Accord de Paris qui vise à limiter à moins de 2°C le réchauffement climatique, les ONG font appel à la justice locale, jugeant cette attribution contraire à l'article 112 de la Constitution garantissant à chacun le droit à un environnement sain. Elles réclament leur annulation.

A chaque fois, les tribunaux tranchent en faveur des autorités.

Dans son jugement en appel, la Cour suprĂȘme norvĂ©gienne estime en 2021 que l'attribution des permis n'est pas contraire Ă  la Convention europĂ©enne des droits de l'homme, parce qu'elle ne reprĂ©sente pas "un risque rĂ©el et immĂ©diat" pour la vie et l'intĂ©gritĂ© physique.

- Précédent suisse -

Les plaignants se tournent alors vers la CEDH, juridiction internationale dont la mission de protéger les droits humains en Europe.

"Les six militants, aux cÎtés de Greenpeace Nordic et Jeunes Amis de la Terre NorvÚge, espÚrent que la Cour européenne des droits de l'homme entendra leur cause et conclura que l'expansion pétroliÚre de la NorvÚge enfreint" les droits fondamentaux, avait indiqué Greenpeace à l'époque.

Entre-temps, aucun gisement de gaz potentiellement rentable n'ayant été découvert, les sociétés privées ont fini par restituer les licences, souligne la CEDH.

L'an passĂ©, la cour de Strasbourg a rendu un arrĂȘt historique en condamnant pour la premiĂšre fois un Etat pour son manque d'action face au changement climatique, en l'occurrence la Suisse.

Cette décision est appelée à faire jurisprudence dans les 46 Etats membres du Conseil de l'Europe.

Les plaignantes, l'association des Aßnées pour la protection du climat, dénonçaient des "manquements des autorités suisses pour atténuer les effets du changement climatique", qui ont des conséquences négatives sur leurs conditions de vie et leur santé.

La CEDH avait jugé qu'il y avait eu violation de l'article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) et de l'article 6 (accÚs à un tribunal) de la Convention européenne des droits de l'homme.

Elle avait ainsi affirmĂ© que l'article 8 consacrait aussi le droit Ă  une protection effective contre les consĂ©quences graves du changement climatique sur la vie, la santĂ© ou le bien-ĂȘtre.

AFP

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