Edouard Philippe et plusieurs ministres de poids vont officialiser jeudi matin une batterie de 23 mesures pour la Seine-Saint-Denis, un département qui cumule d'importantes difficultés, en insistant sur l'attractivité pour les fonctionnaires, la sécurité, la justice et l'éducation.
Parmi les dispositifs retenus par le gouvernement figurent une prime de 10.000 euros pour fidéliser les fonctionnaires, le recrutement de 150 policiers ou encore le renforcement des contrÎles des logements insalubres.
Ces annonces, trÚs attendues, seront passées au crible par les élus qui réclament à cors et à cri un rééquilibrage des politiques publiques dans un territoire rongé par la pauvreté et des carences structurelles.
L'exĂ©cutif cherche aussi la bonne frĂ©quence avec les quartiers populaires alors qu'Emmanuel Macron avait su trouver une rĂ©sonance lors de la campagne prĂ©sidentielle en promettant notamment de "lutter contre l'assignation Ă rĂ©sidence". Mais le plan Borloo de mai 2018, qui devait ĂȘtre un marqueur fort de sa stratĂ©gie, a Ă©tĂ© rapidement enterrĂ©.
Jeudi, le Premier ministre sera précédé sur le terrain par les ministres de l'Intérieur Christophe Castaner et Laurent Nunez et du Logement Julien Denormandie, en visite à La Courneuve, quand la garde des Sceaux Nicole Belloubet se rendra au tribunal de Bobigny, la ministre de la Santé AgnÚs Buzyn dans une association qui accueille les femmes malades du Sida à Saint-Denis et le ministre de l'Education Jean-Michel Blanquer à Bobigny auprÚs d'aspirants professeurs.
Un déploiement qui montre une certaine volonté d'agir aprÚs un rapport accablant remis par deux députés en mai 2018 et intitulé "La République en échec", une consultation des maires et parlementaires répartis en groupes de travail, puis une synthÚse du préfet en juillet 2019.
La mesure la plus marquante concerne probablement l'attribution d'une prime de 10.000 euros aux fonctionnaires Ă condition de rester au moins cinq ans en poste.
Car le rapport des dĂ©putĂ©s François Cornut-Gentille (LR) et Rodrigue Kokouendo (LREM) dresse un "constat trĂšs sĂ©vĂšre sur la gestion des ressources humaines de l'Etat", souligne-t-on Ă Matignon. "Il nous dit: attention, vous affectez en Seine-Saint-Denis des agents qui sont sur des premiers postes et en plus il y a un turn-over plus important", ajoute-t-on de mĂȘme source.
- 150 policiers supplémentaires -
L'objectif est donc de fidĂ©liser les quelque 39.000 agents du dĂ©partements mĂȘme si Matignon rĂ©flĂ©chit Ă Ă©tablir d'Ă©ventuelles "distinctions" d'ici Ă la mise en place de ce bonus "dans le courant du premier semestre 2020".
Dans cette optique, les primes octroyées aux fonctionnaires du département seront alignées sur celles données aux agents des administrations centrales (siÚges de ministÚres...) à Paris, afin d'attirer les meilleurs éléments.
Ce plan qui ne dit pas son nom - Matignon refuse d'évoquer une enveloppe globale - met l'accent sur le régalien. Ainsi, 50 policiers supplémentaires se répartiront dans deux quartiers, à Saint-Ouen et la Courneuve, dans le cadre de la police de sécurité du quotidien. Et d'ici à 2021, 100 postes d'officiers de police judiciaire seront déployés.
Par ailleurs, pour accélérer une chaßne judiciaire embolisée, 35 postes de greffiers et 12 de magistrats seront créés. Les commissariats d'Aulnay-sous-Bois et d'Epinay-sur-Seine seront rénovés d'ici 2023 avec un budget de 30 millions d'euros, tandis que le tribunal de Bobigny verra son extension réalisée à l'horizon 2026.
Mme Belloubet doit également prendre une circulaire de politique pénale pour "identifier les points-clés en matiÚre d'action de la police et de la justice", explique-t-on à Matignon, en citant en premier lieu le "trafic de stupéfiants".
Sur le volet Ă©ducation, 20 millions d'euros seront flĂ©chĂ©s par la rĂ©gion pour financer des investissements immobiliers. De mĂȘme, un dispositif de "prĂ©-recrutement" de 500 enseignants sera mis en place. Il s'agit de financer les Ă©tudes d'Ă©tudiants boursiers de Seine-Saint-Denis qui s'engagent en retour Ă travailler dans le dĂ©partement.
Sur l'aspect sanitaire - qui ne figurait pas dans le rapport parlementaire - cinq inspecteurs en charge du contrÎle des logements indignes seront recrutés. Seulement deux sont officiellement en poste actuellement, alors que "potentiellement, 10% de l'habitat est insalubre".
AFP

