Dans l'ombre des géants de Ligue 1, des clubs amateurs ou semi-professionnels de foot cauchemardent face à la crise du coronavirus. Bùtir le futur budget procure des sueurs froides à ces institutions locales, dépendantes des collectivités, des sponsors et de la Fédération.
"Ce qui m'inquiĂšte le plus, ce n'est pas la fin de saison mais le dĂ©but de la prochaine". En peu de mots, l'entraĂźneur SĂ©bastien Meyer rĂ©sume un sentiment rĂ©pandu bien au delĂ du Sarreguemines FC, dernier de son groupe avant l'arrĂȘt du Championnat de National 3 (5e division).
A l'Est, à l'Ouest, au Nord et au Sud, tous les clubs interrogés par l'AFP disent leurs craintes pour boucler le budget de l'exercice suivant, incapables de mesurer les conséquences précises de la crise actuelle.
"La premiĂšre rentrĂ©e d'argent, pour un club amateur comme le nĂŽtre, c'est la subvention municipale. Or, Ă l'heure actuelle, les municipalitĂ©s sont toutes Ă l'arrĂȘt (...) et on ne sait pas comment elles vont s'en sortir", relĂšve Meyer.
Le club pourra toujours compter sur les cotisations des licenciĂ©s, mais peut-ĂȘtre moins sur les partenariats privĂ©s. "GĂ©nĂ©ralement, quand une entreprise est en difficultĂ©, la premiĂšre ligne de trĂ©sorerie qu'elle efface, c'est celle des dons aux associations", s'inquiĂšte l'entraĂźneur mosellan.
A Bourg-Péronnas, dans l'Ain, l'inquiétude est aussi forte pour le cinquiÚme de National (3e div.), relégué de Ligue 2 en 2018 et qui se bat pour conserver son statut professionnel.
Durant la crise, les sponsors habituels aussi "vont morfler" et pourraient "reporter le manque à gagner sur la saison prochaine", souffle le manager général Vincent Poupon. Dans ce cas, "on recule pour mieux sauter".
- "Proximité et compréhension" -
Le dirigeant mise néanmoins sur le "capital sympathie" qui entoure le club bleu et blanc, dont le budget de 3,5 millions d'euros repose quasiment pour un tiers sur les partenaires. "Les entreprises comprennent notre situation. Il y a une proximité et une compréhension dans l'écosystÚme du club", estime-t-il.
Si tous espĂšrent que le tissu local permettra d'adoucir la crise, celle-ci n'en reste pas moins brutale actuellement pour le monde amateur.
La Ligue MĂ©diterranĂ©e, qui s'Ă©tend de Nice Ă Marseille, a ainsi menĂ© une enquĂȘte auprĂšs de 169 de ses clubs amateurs la semaine derniĂšre pour mesure la profondeur du gouffre financier.
L'annulation des tournois de PĂąques notamment va coĂ»ter cher, alors que les clubs ont dĂ©jĂ engagĂ© quelque 300.000 euros de dĂ©penses pour ces rendez-vous traditionnels qui avaient rapportĂ© plus d'1,3 M EUR Ă la mĂȘme Ă©poque l'annĂ©e derniĂšre.
Le coup est "trÚs dur" par exemple pour le club des Arméniens de Marseille, EUGA Arzdiv (N3), au budget annuel de 350.000 euros. "On n'a presque plus de sorties (charges, ndlr), mais on n'a plus du tout de rentrées (d'argent)", résume auprÚs de l'AFP son président, Philippe Cazarian.
- Fonds de solidarité -
Le dirigeant se désole de ne pas pouvoir organiser le gala du club qui "représente un cinquiÚme du budget de l'année", ni les tournois. S'il se dit "habitué à souffrir et à avoir des comptes carrés", Cazarian s'inquiÚte en revanche pour d'autres clubs. "Ceux qui n'ont pas les reins solides vont difficilement tenir le choc", prédit-il.
La situation a poussĂ© le prĂ©sident de l'AS Saint-Priest, club emblĂ©matique du foot amateur lyonnais oĂč sont passĂ©s Youri Djorkaeff et Nabil Fekir notamment, Ă interpeller directement la FĂ©dĂ©ration française de football (FFF).
Sans aide, les clubs pourraient "licencier des salariĂ©s, perdre des sponsors, ne pas ĂȘtre en mesure de boucler le budget de la saison", voire "dĂ©poser le bilan", s'est alarmĂ© Patrick Gonzalez dans une tribune publiĂ©e le 27 mars.
Dans un entretien à l'AFP, le président de la FFF Noël Le Graët s'est voulu rassurant. "Pour la Fédération, le foot amateur est la priorité", comme en témoignent les "90 millions d'euros" alloués cette saison (le budget exact est de 86,2 M EUR en 2019-2020).
"L'ensemble des aides prĂ©vues seront distribuĂ©es, indĂ©pendamment de l'arrĂȘt des activitĂ©s sportives" et "des avances de trĂ©sorerie sont Ă©galement consenties pour rĂ©pondre aux urgences", a fait savoir la FFF vendredi dans un communiquĂ©.
Elle s'est par ailleurs engagée à débloquer dans les semaines à venir "un fonds exceptionnel de solidarité (...) pour venir en soutien des clubs amateurs parmi les plus impactés économiquement par les retombées de cette crise sanitaire".
 AFP


