Robert Badinter, l'artisan de l'abolition de la peine de mort en France, entre jeudi soir au Panthéon, 20 mois après son décès, lors d'une cérémonie solennelle présidée par Emmanuel Macron.
Prévue de longue date, cette cinquième panthéonisation sous ses mandats sera une parenthèse en pleine crise politique pour le président Macron, qui doit décider quoi faire pour sortir le pays de l'impasse.
L'hommage à l'ancien avocat et garde des Sceaux a débuté mercredi soir par une veillée funèbre au Conseil constitutionnel qu'il présida de 1986 à 1995, parmi les nombreux engagements de sa vie.
A 17H00 (15H00 GMT) jeudi, le cercueil portant le nom de Robert Badinter, décédé en février 2024 à l'âge de 95 ans, doit être transporté vers l'ancienne église, au centre de Paris, pour une cérémonie d'environ une heure.
En présence d'un public que l'Elysée espère nombreux grâce à une "scénographie adaptée", la cérémonie suivra le "scénario traditionnel": remontée de la rue Soufflot, accueil du cercueil sous la nef du Panthéon par le président de la République, qui prononcera un discours "court et percutant", puis installation dans le caveau "des révolutionnaires de 1789", où reposent Condorcet, l'abbé Grégoire et Gaspard Monge depuis le bicentenaire de la Révolution.
A l'honneur, le combat pour la justice de Robert Badinter, "qui incarne ce qu'est l'Etat de droit", souligne la présidence. Et surtout l'abolition de la peine de mort, "un saut civilisationnel majeur dans l'histoire de la justice de notre pays", a estimé un conseiller d'Emmanuel Macron.
Parmi les temps forts, Julien Clerc viendra interpréter sa chanson "L'assassin assassiné" consacrée en 1980 à la lutte pour l'abolition du châtiment suprême.
- "Universalisme républicain" -
Des textes seront également lus, dont des plaidoiries de l'avocat qui sauva plusieurs condamnés de la guillotine. Mais aussi des discours de l'homme politique qui, nommé ministre de la Justice par François Mitterrand, demanda à la tribune de l'Assemblée nationale le 17 septembre 1981, et obtint "l'abolition de la peine de mort en France", conformément à un engagement du président socialiste à rebours de l'opinion de l'époque.
Le comédien Guillaume Gallienne lira un texte de Victor Hugo, précurseur dans ce même combat.
Ce texte, comme d'autres, a été choisi par la veuve de l'homme de droit. La philosophe Elisabeth Badinter a été associée de très près aux préparatifs, encore lundi avec le chef de l'Etat lors d'une discrète visite au monument funéraire portant sur son fronton la devise "Aux grands hommes, la patrie reconnaissante".
Emmanuel Macron a déjà fait entrer dans la nécropole républicaine Simone Veil, rescapée d'Auschwitz et auteure de la loi sur l'interruption volontaire de grossesse, l'écrivain chroniqueur de l'horreur des tranchées de la Première Guerre mondiale Maurice Genevoix, la star du music-hall, résistante et militante antiraciste franco-américaine Joséphine Baker, et le résistant communiste d'origine arménienne Missak Manouchian.
L'historien et résistant Marc Bloch sera à son tour panthéonisé mi-juin, 82 ans après son exécution par la Gestapo en 1944.
Pour l'historien Denis Peschanski, le fil conducteur de ces choix présidentiels est l'"universalisme républicain". "C'est la France des Lumières, qu'incarnait Robert Badinter à travers son combat abolitionniste mais aussi sa défense acharnée des victimes et sa lutte pour les droits".
L'universalisme qui "se retrouve dans Joséphine Baker, qui ne pouvait pas accepter ce qui se passait aux Etats-Unis et est devenue française", ou dans la "défense des droits des femmes" chez Simone Veil, ajoute ce spécialiste de la mémoire. Ou chez Missak Manouchian, et "tous ces résistants étrangers qui ont manifesté un attachement très fort à la France des Lumières, patrie des droits de l'homme".
AFP
RELEXION
LA LIBRE.BE Publié le 18-04-2011 à 04h15
Badinter tacle "la France des droits de l'homme"
Robert Badinter a donné, le 15 mars 2011, une conférence sur "La France et la Cour européenne des droits de l'homme" promise à son ami Jean-Pierre Costa, président de la juridiction strasbourgeoise. Si l'ancien garde des sceaux de François Mitterrand avoue avoir pour la Cour "les yeux de Chimène", il n'y est pas allé par quatre chemins pour fustiger son pays : "lorsque la France se targue d'être la patrie des droits de l'homme, c'est une figure de style, a-t-il asséné, elle est la patrie de la déclaration des droits de l'homme, aller plus loin relève de la CECITE HISTORIQUE."
Pays fondateur du Conseil de l'Europe en 1949*, celle-ci a en effet longtemps traîné les pieds pour ratifier la Convention européenne des droits de l'homme (1950) à l'élaboration de laquelle elle collabora pourtant activement. Convention qui fut à l'origine de la création de la Cour du même nom en 1959. Pourquoi cette réticence qui dura près d'un quart de siècle ? Officiellement pour des raisons multiples. Dans les faits, "à partir de 1956, ce sont surtout la guerre d'Algérie ainsi que ses abominables lois d'exception" qui ont empêché "la France de se mettre à la portée d'une juridiction internationale". Et si la ratification n'est pas intervenue après la fin du conflit, en 1962, c'est "parce qu'il aurait alors fallu modifier les statuts de l'ORTF (NdlR : office de radiodiffusion télévision française) et supprimer le ministère de l'information", a poursuivi l'orateur tout en évoquant un argument qui, à l'époque, l'avait fait tomber des nues : la prééminence de concepts anglo-saxons dans la Convention.
Le paraphe de Paris ne sera finalement apposé que le 3 mai 1974, "PRESQUE FURTIVEMENT , pendant l'intérim assuré par ALAIN POHER entre la mort de Georges Pompidou et l'élection de Valery Giscard d'Estaing". "Une décision formelle mais vidée de sa substance, précise Robert Badinter, puisque la France n'avait pas souscrit à l'article 25 qui ouvrait aux individus le recours à la Cour européenne des droits de l'homme".
Pour cela, il faudra attendre 1981, année-même de l'abolition de la peine de mort dont Robert Badinter fut l'artisan. Depuis, et jusqu'au 1er janvier 2009, la France a fait l'objet de 17805 requêtes et 773 arrêts dont 576 condamnations………..
EXTRAIT :Discours de Robert Badinter à l'Assemblée nationale, le 17 septembre 1981 Discussion du projet de loi portant abolition de la peine de mort - Texte intégral -
Mais si l'on considère l'histoire de notre pays, on remarquera que l'abolition, en tant que telle, a toujours été une des grandes causes de la GAUCHE FRANCAISE . Quand je dis gauche, comprenez-moi, j'entends forces de changement, forces de progrès, parfois forces de révolution, celles qui, en tout cas, font avancer l'histoire. (Applaudissements sur les bancs des socialistes, sur de nombreux bancs des communistes et sur quelques bancs de l'union pour la démocratie française.) EXAMINEZ SIMPLEMENT CE QUI EST LA VERITE .
Regardez-la. J'ai rappelé 1791, la première Constituante, la grande Constituante. Certes elle n'a pas aboli, mais elle a posé la question, audace prodigieuse en Europe à cette époque. Elle a réduit le champ de la peine de mort plus que partout ailleurs en Europe. La première assemblée républicaine que la France ait connue, la grande Convention, le 4 brumaire an IV de la République, a proclamé que la peine de mort était abolie en France à DATER DE L'INSTANT OU LA PAIX GENERALE SERAIT RETABLIE.
--------------------------
Aujourd'hui ce grand Homme que penserait-il de nos fraudeurs au dessus des lois..........