Cap Requins, Valorequin, vigies requins... Si tous ces dispositifs, programmes, études tardent à donner leurs résultats ou à se déployer, les choses progressent dans la gestion du risque à La Réunion. Et la perspective de sites sécurisés sur le littoral ouest se précise. "Il faut laisser passer l'hiver austral et dans quelques mois on pourra remettre en place des activités nautiques", espère le président de la ligue de surf Éric Sparton. L'optimisme est également de retour du côté de Saint-Leu, où "on commence à voir le bout du tunnel", selon le conseiller municipal Christophe Mulquin. Il estime ainsi "qu'au plus tard dans un an on aura un site sécurisé".
Trois semaines après la dernière attaque de requin à Saint-Leu, des dizaines de surfeurs bravent encore chaque jour l’interdiction de pratiquer des activités nautiques en dehors du lagon et des zones surveillées, mais surtout le danger représenté par le pic de présence des squales en cette période d’hiver austral. Et ce ne sont pas les quelques verbalisations épisodiques qui vont les en dissuader.
"Aux mois de mai-juin, il y avait une quarantaine de surfeurs à l’eau tous les jours. Les surfeurs iront toujours à l’eau, cet arrêté préfectoral ne marche pas et ne marchera jamais. C’est un arrêté-parapluie", juge Christophe Mulquin, conseiller municipal à la mairie de Saint-Leu. De son côté, le président de la ligue réunionnaise de surf, Eric Sparton, ne peut que constater ce même état de fait. "On fait de la prévention, on passe le message, mais après les gens assument leurs responsabilités. On ne peut pas contrôler tous les surfeurs", confie-t-il.
Si la ligue de surf préconise de ne pas se mettre à l’eau, Eric Sparton reconnaît que résister à la tentation de la glisse n’est pas tous les jours facile. "C’est vrai qu’à Saint-Leu il y a des vagues parfaites à cette période. Parfois, ça me fait mal au ventre de ne pas y aller. Je peux comprendre que ce soit difficile quand il y a des conditions parfaites comme ça...", avoue-t-il.
Cap Requins : Saint-Gilles puis Saint-Leu
Mais comme beaucoup de pratiquants, le président de la ligue de surf prend son mal en patience et veut croire que la sortie de crise n’est plus si loin. "On en voit presque le bout. Cela fait maintenant un an que les choses avancent et toutes les communes concernées travaillent d’arrache-pied pour ça. Il faut laisser passer l’hiver austral, et dans quelques mois on pourra remettre en place des activités nautique", prédit-il.
À Saint-Leu, où l’on a compris l’atout que représente la fameuse "gauche", la municipalité se veut en pointe dans ce dossier. "Le député-maire s’est engagé à sécuriser le spot de surf en lançant un appel d’offres pour nommer un bureau d’étude. On doit avoir ce mardi les conclusions de la première phase avec la présentation du diagnostic, puis la mise en place d’ateliers pour voir quels peuvent être les dispositifs les plus adaptés", précise Christophe Mulquin, qui ne peut guère donner plus de détails à ce stade : "Il y a eu plusieurs propositions de faites, disparates et complémentaires. Nous voulons un dispositif pérenne et efficace." Mais l’élu saint-leusien l’assure : "On pense qu’au plus tard dans un an on aura un site sécurisé."
Car si d’aucuns peuvent trouver le temps long, les dispositifs de réduction du risque avancent. Après une première phase en baie de Saint-Paul, le programme Cap Requins doit se déployer prochainement en zone récifale au large de Boucan Canot et des Roches Noires, avant de s’étendre encore dans le grand Ouest dans cinq ou six mois. "Concernant les drumlines, nous avons validé l’installation de quatre engins en baie de Saint-Leu, entre la Pointe des Châteaux et la Pointe au Sel. Il y aura ensuite des concertations avec les usagers pour définir leur positionnement dans la baie", confirme Christophe Mulquin.
"Les mentalités ont changé"
Quant aux vigies requins, "l’évaluation est terminée, on attend les rendus de l’IRD qui ont été transmis au muséum d’histoire naturelle à Paris", confie Eric Sparton. "On est suspendu à ces rendus, car c’est la survie du surf qui est en jeu", ajoute-t-il. "Les vigies sont un des éléments qui vont relancer la pratique", abonde le conseiller municipal de Saint-Leu. "Elles n’auront pas un rôle que pour une école ou pour le pôle espoir, mais il va y avoir des cessions sécurisées ouvertes au plus grand nombre", insiste-t-il.
Reste l’étude Valorequins, prolongement de Ciguatera 2, qui tarde encore à donner ses résultats. "Ciguatera 1 avait prouvé qu’il n’y avait pas de toxines sur les requins de La Réunion, donc on est confiant pour cette deuxième cession. Cela prend du temps car il faut que l’ensemble des spécimens soient pêchés sur tout le pourtour de l’île pour obtenir un échantillon significatif", explique Christophe Mulquin.
L’élu de Saint-Leu comme le président de la ligue de surf restent encore très prudents sur ces avancées. Mais tous deux semblent croire qu’une page a bel et bien été tournée. "Les mentalités ont changé et on commence à avoir une idée de ce pourraient être des sites sécurisés", affirme Eric Sparton. "Ce n’est que trois ans après la crise que l’Etat en prend enfin la pleine mesure. On travaille de façon plus étroite avec les collectivités. Aujourd’hui, Saint-Paul, Trois-Bassins, Saint-Leu et la Région travaillent de concert, ce qui n’était pas le cas avant. On commence à voir le bout du tunnel", souffle de son côté Christophe Mulquin, espérant que les heures les plus sombres de la crise requin sont désormais derrière La Réunion : "On sait que ce sera long, mais on y arrivera, j’en suis persuadé."
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