Une thèse réfutée par le comité des pêches et certains scientifiques

Crise requins : les récifs artificiels montrés du doigt

  • Publié le 3 décembre 2013 à 05:00

L'installation de récifs artificiels le long de la côte ouest serait-elle en partie responsable de la répétition des attaques de requins ? C'est l'accusation que porte l'association Protégez nos enfants, s'appuyant sur un arrêté préfectoral datant de juillet 2012 mentionnant les risques d'impact sur le comportement des gros poissons prédateurs, et notamment des requins bouledogues. Selon le comité régional des pêches, il s'agit là d'une interprétation fallacieuse d'un texte visant au contraire à mieux encadrer ces récifs artificiels. Et d'après Michaël Rard, président de l'Observatoire marin de La Réunion, lier la présence des requins à ces installations n'aurait "aucune base scientifique".

"Nous sommes tombés sur les fesses en lisant ce qui était écrit noir sur blanc sur cet arrêté préfectoral", affirme Hervé Flament, président de l’association Protégez nos enfants, faisant allusion à un texte daté du 11 juillet 2012 relatif au programme "Corail Réunion" lancé en 2008 et faisant état de six récifs artificiels (quatre à la Possession, un au Port Ouest et un à Saint-Leu) et prévoyant l’installation de huit autres (cinq en baie de Saint-Paul, deux aux Avirons et un autre à Saint-Leu).

Ce qui choque et étonne Hervé Flament, c’est surtout un passage mentionnant que "l’effet concentrateur des récifs artificiels sur les petits poissons pélagiques peut éventuellement conduire (...) à la concentration des prédateurs naturels de ces espèces, comme les grosses carangues et les requins côtiers". Le texte indique également que "la sédentarisation de gros requins côtiers (notamment les requins bouledogues) du fait de la présence de récifs artificiels, augmentant ainsi potentiellement le risque requins pour les activités nautiques humaines alentours, doit être particulièrement étudiée dans le contexte actuel réunionnais".

Soulignant que ce texte date d’avant les dernières attaques de requins, le président de Protégez nos enfants y voit "un véritable aveu des autorités sur la corrélation probable entre récifs artificiels près des côtes et attaques de requins bouledogues". Il ajoute : "Nous pensons que l’installation de récifs artificiels sur la côte ouest a particulièrement modifié le comportement des requins bouledogues, en les rendant encore plus agressifs et territoriaux."

"Il y a des récifs artificiels marrons depuis des années"

Or, le comité régional des pêches – à l’initiative du projet "Corail Réunion" – réfute totalement cette interprétation. "Tout d’abord, il ne s’agit pas d’un arrêté préfectoral, mais d’une déclaration loi sur l’eau du comité des pêches", explique David Guyomard, chargé de mission au sein du comité. "Il s’agit au contraire d’une démarche de transparence et d’officialisation de ces aménagements qui existent depuis 30 ans, car il y a des récifs artificiels marrons depuis des années", poursuit-il.

"Avant, les pêcheurs le faisaient là où ils le voulaient. Nous avons souhaité mettre en place un suivi et essayer de les installer le plus loin possible des zones d’activité nautiques", ajoute encore David Guyomard, dénonçant "ces gens qui cherchent des boucs-émissaires". Selon lui, loin d’augmenter les risques, le but de ce texte serait au contraire de les limiter.

De plus, selon Michaël Rard, président de l’Observatoire marin de La Réunion (OMAR), lier la présence des récifs artificiels à l’augmentation des attaques de requins n’a "aucune base scientifique". Selon lui, "les récifs artificiels tels qu’ils sont positionnés à La Réunion n’entraînent pas de manière significative une augmentation du nombre de requins". Il souligne d’ailleurs que "les récifs artificiels à La Réunion ne fonctionnent pas très bien".

Hervé Flament s’appuie de son côté sur les photos publiées sur le site de "Corail Réunion" comme preuve "d’augmentation de la biomasse". "On a levé un lièvre et on se pose des questions, je pense qu’il faudrait une enquête là-dessus", confie-t-il. "Immerger ce type de récifs artificiels (...), n’est-ce pas jouer aux apprentis sorciers avec la nature ? N’est-ce pas au final vraiment de la mise en danger de la vie d’autrui ?", s’interroge ainsi l’association Protégez nos enfants, qui a déjà déposé une plainte contre X en ce sens suite à la dernière attaque de squale contre le jeune Tanguy à l’Etang-Salé, le 26 octobre dernier.

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2 Commentaires
Zblax
Zblax
11 ans

A côté de ça, on sait très bien qu'Huguette Bello est contre le projet de récif artificiel dans la baie de Saint-Paul de l'association Nautilus. Reste à savoir pour quelle raison...

Franck
Franck
11 ans

Je trouve pour le moins étonnant la rapidité de la réaction des comités des peches et de la préfecture sur cette question. D'autant plus étonnant que le comité des pêches ne cesse de critiquer les scientifiques à longueur de temps comme quoi ils les empêchant de pêcher les derniers poissons de la réserve.......et puis là soudain, les scientifiques sont une caution indépassable!!!!!?

Les pêcheurs réunionnais parce qu'ils sont réunionnais bénéfieraint-ils de passe droit ..qui conduisent tout droit nos enfants dans la gueulle des requins? Les surfeurs et autre qui se font attaquer ne comptent-ils pas juste parce qu'ils majoritairement zorey?

Il ne peut y avoir de préférence créole sur cette question. La mer n'est pas une chasse gardée de la réunion ou des réunionnais. Nous aussi nous fréquentons la mer et nous courrons en premier les risques!
Merci à "protegez nos enfants" et à "rend a nous la mer" d'empêcher que la maffia local n'enterre ( ne coule?) cette affaire!