Il a seulement deux ans et demi. Et pourtant, depuis le début de sa toute jeune vie, Tiago n'a pas un quotidien facile. Tiago – un enfant plein de vie et de joie – est atteint de thalassémie. Une maladie génétique rare qui l'oblige à subir des transfusions sanguines toutes les trois semaines, et ce… jusqu'à la fin de sa vie. C'est pour sensibiliser à cette pathologie que sa maman, Stacy Soobratty a décidé de partager son histoire. Une histoire, une vie pour qui le don du sang est indispensable. En ce samedi 10 juin, où a lieu la grande collecte de don du sang de l'Établissement français de santé (EFS), il est utile de rappeler l'urgence vitale de ces dons (Photos : sly/www.imazpress.com)
C'est à l'âge de deux mois à peine, que la maladie de Tiago est décelée. Comme à chaque jeune maman, à la naissance de son fils on demande à Stacy Soobratty si elle souhaite faire le dépistage pour cinq maladies rares. Elle accepte. Deux mois après, le couperet tombe. Tiago est positif à l'une des maladies rares, sans savoir laquelle. La seule chose dont ont été informés les parents, c'est qu'ils devaient aller à l'hôpital pour consulter un spécialiste.
"Là on m'a informé qu'il avait la bêta-thalassémie majeure", indique sa maman. "Ils n'ont pas détaillé la maladie au premier rendez-vous. Mais après un test, ils m'ont rappelé le jour-même en me disant qu'il fallait venir aux urgences rapidement car Tiago avait besoin d'être transfusé dans l'urgence", nous confie Stacy Soobratty.
"Quand j'ai appris la maladie la première chose que je me suis dit c'est qu'est-ce que j'ai mal fait. On se pose des questions", dit-elle.
Tiago lors de ses transfusions lorsqu'il était bébé (Photo D.R.)
La maladie rend la production d'hémoglobine insuffisante voire nulle. Le corps n'est pas correctement alimenté en oxygène et en fer. Cela crée de fortes anémies.
"Pour survivre, Tiago doit se faire transfuser toutes les quatre à cinq semaines, voire toutes les trois semaines, et cela à vie", précise Stacy Soobratty. "Il y a eu beaucoup de nuits où on s'est renfermé, beaucoup de pleurs", nous dit-elle. "Mais mon fils Tiago est un bon vivant, quand on le regarde on ne voit pas la maladie et c'est grâce à mes enfants que je me suis dit qu'il fallait que je reste forte."
Mais, autre problème, ces transfusions peuvent créer une surcharge en fer. Tiago doit donc prendre chaque jour des comprimés. Des cachets que sa maman écrase dans les yaourts ou la compote pour qu'il ne les voient pas. "Il faut absolument respecter la prise de médicaments parce que sinon le taux de ferritine va augmenter et cela peut créer des dégâts comme des AVC ou des malformations", détaille la mère de famille.
Des cachets qui donnent leur lot d'effets secondaires. "De temps en temps il a mal au ventre, il digère mal."
- Une vie rythmée par la maladie -
Si au quotidien Tiago est un enfant comme les autres, ses journées, ses semaines ne sont pas les mêmes que celles des autres enfants de son âge.
Obligés de prendre des comprimés chaque jour et de se faire transfuser toutes les trois semaines, la fatigue parfois le guette. "Une semaine voire quinze jours avant la date fatidique de la transfusion, il perd de l'appétit et est plus essoufflé", raconte Stacy, sa maman.
L'enfant doit donc se rendre à l'hôpital pour ces transfusions obligatoires pour sa survie. "Tiago le sait car on lui met des patchs sur les mains. Souvent il me dit non maman je ne veux pas y aller, mais j'essaye de lui expliquer qu'il est fort, que c'est pour lui."
Des journées longues pour le petit garçon. Arrivé à 9 heures au CHU Nord, Tiago doit tout d'abord faire des tests, une prise de sang pour vérifier son taux de fer et ses résultats. Une fois les résultats arrivés, les médecins décident de la quantité de sang à transfuser. Mais la journée ne s'arrête pas là… Après, il faut attendre la poche de sang. "On sait quand on arrive mais jamais quand on va sortir", nous indique Stacy Soobratty.
Si pour le moment sa maman ne lui a pas encore expliqué sa maladie, "il sait qu'il va à l'hôpital, il sait qu'il y a une raison, il ne sait pas laquelle j'attends encore pour lui expliquer".
L'enfant va bientôt faire son entrée à l'école. Sa mère appréhende cette échéance. "Au regard des autres enfants, cela ne se voit pas physiquement, c'est une maladie invisible, mais Tiago tombe assez rapidement malade, son système immunitaire n'est pas comme tout le monde" dit-elle.
"J'en ai déjà informé l'école, la directrice et j'ai fait une demande de PAI (projet d'accueil individualisé)." Un document où la maman autorise l'école à donner des médicaments si besoin et où sont précisées les allergies et quel comportement adopter face à un enfant qui est pâle ou a de la fièvre.
- "La maladie, c'est toujours un peu tabou" -
Quelques mois après les premières transfusions de Tiago, Stacy Soobratty a découvert le site de l'association SOS Globi. "J'ai pris contact avec eux et là j'ai découvert une communauté alors que je me pensais toute seule", confie la maman.
"C'était de la bienveillance, on posait des questions, ils répondaient", ajoute-t-elle.
Une association dont – au niveau local – Stacy est devenue la vice-présidente en octobre 2022. "Il y a énormément de personnes qui se renferment, ne parlent pas de la maladie car c'est toujours un peu tabou." "De plus, "ce qu'on entend "ça fait pitié, c'est malheureux", on les entend assez. Nous on aimerait que les autres personnes au contraire veuillent participer, partager", ajoute la mère de Tiago.
"À nous de montrer l'exemple, pour que les personnes se disent si elle en parle pourquoi pas moi", dit-elle. "Plus on en parle, mieux on sera entendu."
Comme dit Stacy Soobratty, "soyez vos maux, exprimez vos mots".
Retrouvez la page de l'association ici.
- Une grande collecte pour en parler -
Ce samedi 10 et ce dimanche 11 juin 2023, à la Nordev à Saint-Denis, de 9 heures à 16 heures d'ailleurs, Stacy Soobratty est amenée à présenter l'association SOS Globi à l'ensemble des donneurs.
En effet, ce week-end a lieu la collecte nationale du don du sang, à l'occasion de la journée mondiale des donneurs de sang.
"On aura un stand d'information sur la maladie. Mais nous serons également présents pour remercier les donneurs. Sans eux, mon fils ne serait pas là aujourd'hui", déclare-t-elle. "C'est également l'occasion pour les donneurs de voir la personne qui pourrait recevoir leur sang et ça peut les motiver encore plus car ça aide les malades à avoir une vie normale, et survivre comme Tiago", ajoute Stacy Soobratty.
Des dons nécessaires pour Tiago, des dons pour sa survie. Tiago qui est de groupe 0+, un groupe pour lequel les dons sont rares.
Tiago qui n'est d'ailleurs pas le seul à avoir besoin de dons pour vivre. À La Réunion, ils sont 10.000 à recevoir des transfusions, nécessaires pour leur survie.
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- L'EFS en alerte -
Si cette journée mondiale est l'occasion pour les donneurs récurrents et les nouveaux de faire don de leur sang, il est important de rappeler que le don du sang n'a pas lieu que sur un week-end. C'est toute l'année qu'il faut donner.
Car donner "permet de sauver trois vies", tient à rappeler Idriss Delouane, directeur de l'EFS.
Globule, plaquette, plasma… Les globules sont à usage local et conservables 7 jours, tout comme les plaquettes, qui elles sont conservables 42 jours. Le plasma prélevé lui est envoyé en métropole pour être transformé, La Réunion n'ayant pas le laboratoire dédié. Le plasma utilisé à La Réunion provient lui du CHU du Bordeaux.
Des dons qui sont pourtant en baisse depuis plusieurs années. "Ça a toujours été compliqué, notamment pour les groupes 0", confie le directeur de l'EFS. "Et malgré la mobilisation, les besoins sont constants." Ce qui provoque un déséquilibre entre la capacité de collecte et les besoins des malades.
Au moment où nous posions nos questions au Docteur Idriss Delouane, pour le groupe 0, "la cible était de 5,5 jours alors qu'elle doit être supérieure à 12". Ce qui veut dire que l'EFS a du stock pour 5 jours et non pas 12.
"Difficile donc dans ce cas de répondre aux besoins normaux des malades. Et ce, sans compter les accidents."
"Pour répondre aux besoins, il faudrait prélever 120 donneurs par jour, mais désormais la moyenne est de 80 donneurs seulement, soit 30% de moins", précise le directeur de l'EFS.
Cette grande collecte est donc un bon moyen pour l'EFS "d'appréhender les semaines et les vacances qui arrivent". "Il nous faut une régularité dans le prélèvement."
Un moyen également d'échanger avec les personnes pour leur expliquer pourquoi on prélève. "Car les transfusions ne servent pas que pour les accidents de la route", note le directeur de l'EFS.
Les besoins de sang répondent à trois situations : soit on perd du sang (lors d'un accouchement, d'un accident ou encore d'une chirurgie), soit on a un problème de production – comme dans le cas de Tiago, et là c'est chronique, soit lors de traitements contre le cancer.
Il faut savoir que "l'EFS ne prélève pas pour prélever, si on prélève c'est pour répondre aux besoins, on aimerait un jour dire que l'on n'a pas besoin de prélever", indique Idriss Delouane.
Qui peut donner ?
Vous avez entre 18 et 70 ans révolus ? Vous pesez plus de 50 kilos ?
Vous pouvez donner jusqu’à 6 fois par an pour les hommes et jusqu’à 4 fois pour les femmes.
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ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com