Moins souvent recyclés

Déchets ménagers : près de 600 kg collectés par personne à La Réunion

  • Publié le 4 juin 2025 à 15:46
  • Actualisé le 4 juin 2025 à 15:48

En 2021, 595 kg de déchets par personne ont été collectés à La Réunion. L'île se situe au 29ème rang des départements français qui collectent le plus de déchets ménagers. Cependant, ce constat est lié principalement à la quantité importante de déchets verts générés par le climat tropical. Sans ces déchets, l’île se positionnerait au 65ème rang. Comme dans l’Hexagone, la poubelle ordinaire ou "tout venant", dédiée aux déchets non triés, recueille 45 % de l’ensemble des déchets ménagers. Nous publions ci-dessous le communiqué de l'Insee (Photo : rb/www.imazpress.com)

Sur l’île, l’enfouissement demeure la principale destination des déchets et la collecte des matériaux recyclables reste limitée. Par ailleurs, de nombreux déchets triés ne peuvent être recyclés localement, et doivent être exportés ou enfouis. La collecte en porte-à-porte est plus développée que dans les autres territoires, au détriment des déchetteries qui connaissent pourtant un essor important en dix ans.

Entre 2011 et 2021, la quantité d’ordures collectées dans les poubelles ordinaires diminue et la collecte de matériaux recyclables progresse. Cependant, comme dans le reste du pays, cette progression est lente au regard des objectifs fixés par la loi.

- Des poubelles ordinaires bien remplies -

Comme dans l’Hexagone, près de la moitié (45 %) des déchets réunionnais sont constitués d’ordures ménagères résiduelles, collectées dans les poubelles ordinaires et ensuite enfouies sur l’île. Elles représentent 270 kg d’ordures collectées par personne, soit 25 kg de plus que dans l’Hexagone.

Depuis la loi de 2015 portant sur la Nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), la gestion des déchets ménagers est une compétence des intercommunalités, qui doivent établir des plans locaux de prévention. Ceux-ci peuvent se traduire par la mise en place d’une tarification incitative qui lie le montant payé par les usagers à la quantité de déchets qu’ils produisent. Son objectif est d’encourager les habitants à modifier leurs comportements afin qu’ils réduisent la quantité de leurs déchets, augmentent le tri et adoptent un mode de consommation plus responsable.

À La Réunion, les cinq intercommunalités ont délégué le traitement des déchets à deux syndicats mixtes. Aucun d’entre eux n’a instauré la tarification incitative. La mise en place de ce dispositif pourrait d’ailleurs poser des difficultés spécifiques sur l’île. En particulier, les dépôts sauvages sont une véritable problématique, avec des impacts sanitaires et environnementaux importants.

En effet, ils induisent la prolifération des moustiques vecteurs de maladies, la pollution des sols et des eaux, ainsi que des risques pour la faune locale [PRPGD, 2024].

Par ailleurs, l’adoption d’une tarification incitative pourrait s’avérer difficile dans une région où la pauvreté est importante : elle constituerait une charge financière supplémentaire pesant sur les ménages les plus modestes.

- Peu de recyclage à La Réunion -

À La Réunion, les matériaux recyclables (papiers, cartons, verre, métaux, plastiques, etc.) représentent 12 % du volume des déchets ménagers collectés, soit 69 kg/pers. 

À La Réunion, 77 % des déchets ménagers collectés en 2021 le sont en porte-à-porte: 45 % dans les poubelles ordinaires et 32 % dans les poubelles jaunes. Les points d’apports collectifs, comme les bornes à verre, recueillent 5 % des déchets.

Le reste des déchets sont déposés dans une déchetterie (18 %), une part bien moindre qu’au niveau national (34 %). En effet, à La Réunion, le réseau des déchetteries est plus récent et les collectes en porte-à-porte plus fréquentes, tant pour les ordures ménagères résiduelles que pour les encombrants et les déchets verts .

Le mode de collecte dépend du type de déchets. Les ordures ménagères résiduelles vont dans les poubelles ordinaires, tandis que les déchets recyclables (hors verre et métaux) sont principalement collectés dans les poubelles jaunes. Les déchets verts et les objets encombrants sont pris en charge via plusieurs canaux : le porte-à-porte, les déchetteries ou les collectes ponctuelles. Le verre est collecté exclusivement en bornes, une partie étant récupérée localement et réutilisée directement (notamment pour certaines boissons produites localement). Les métaux sont principalement collectés en déchetterie. Les déchets dangereux des ménages sont majoritairement collectés directement par les producteurs des filières à responsabilité élargie du producteur (REP). Une partie de ces déchets sont néanmoins collectés en déchetterie ou, en raison d’erreurs de tri des particuliers, se retrouvent dans les poubelles.

La Réunion dispose de 47 déchetteries, soit une pour 18 000 personnes, contre une pour 14 000 dans l’Hexagone. Entre 2011 et 2021, ce réseau s’est fortement renforcé et leur fréquentation a plus que doublé, passant de 0,4 à 0,9 visites en moyenne par an et par personne. Malgré cela, elle reste bien inférieure à celle observée dans l’Hexagone (2,2 visites par an et par personne).

En 2021, à La Réunion, le coût moyen de la collecte des déchets ménagers s’élève à 175 € par personne, contre moins de 120 € dans l’Hexagone. Ces coûts sont largement financés par la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, due par les propriétaires soumis à la taxe foncière et souvent répercutée dans les loyers ainsi que, depuis 2021, par la redevance spéciale appliquée aux entreprises utilisant le service public pour la gestion de leurs déchets.

Des marges de manœuvre existent pour que le recyclage progresse à La Réunion. En 2021, 20 % des matériaux recyclables collectés ne sont pas recyclés du fait des refus de tri ou faute de filière locale adaptée. En revanche, le verre et les métaux collectés sur l’île sont entièrement recyclés.

Par ailleurs, tout le contenu des poubelles ordinaires est enfoui alors qu’elles contiennent 25 % de matériaux recyclables
qui auraient dû être jetés dans les poubelles jaunes. Avec l’extension de la consigne de tri prévue à La Réunion en 2026, cette part pourrait atteindre 36 %. Dansl’Hexagone, où cette mesure est généralisée depuis 2023, tous les emballages peuvent être déposés dans la poubelle jaune au lieu de finir dans la poubelle ordinaire. En plus des matériaux recyclables, la poubelle "tout
venant" contient des déchets alimentaires et d’autres déchets naturels biodégradables : ces biodéchets constituent 38 % du contenu des poubelles ordinaires à La Réunion. Leur collecte à la source est devenue obligatoire en 2024. Trier ces biodéchets et les orienter vers le compostage ou d’autres formes de valorisation organique est un enjeu majeur. Cela nécessite l’organisation de leur collecte en porte-à- porte ou en point d’apport volontaire et le changement des comportements de tri des ménages.

Le recyclage est aussi rare pour les objets encombrants, qui représentent 16 % du volume de déchets collecté en 2021, soit 95 kg/pers, contre 77 kg/pers dans l’Hexagone. Seuls 8 % des encombrants collectés sur l’île sont réellement recyclés, la grande majorité d’entre eux finissant enfouis [PRPGD, 2024]. Pourtant, 65 % de ces encombrants collectés sont orientés vers le tri, mais les refus de tri sont fréquents : certains matériaux ne peuvent pas être séparés correctement ou sont dans un trop mauvais état, comme certains meubles ou gros électroménagers, et ne peuvent donc être envoyés vers les filières de recyclage. Pourtant, une part plus importante pourrait être valorisée : 30 % des encombrants réunionnais contiennent des matériaux réutilisables ou recyclables, comme les métaux, les grands cartons ou les équipements électriques et électroniques [Ademe, 2020].

Les déchets dangereux (équipements électriques et électroniques, batteries et piles, huiles usagées, véhicules hors d’usage,
peintures, solvants et produits chimiques, ampoules, etc.) et les autres déchets non dangereux (pneus usagés, textiles, etc.) représentent 2 % des déchets ménagers collectés en 2021 à La Réunion. Une partie de ces déchets dépendent des filières à responsabilité élargie du producteur (REP), financées et organisées par les fabricants, les importateurs et les distributeurs. Pour la plupart d’entre elles, il n’existe pas de structure locale de traitement faute d’un volume suffisant de déchets. À l’exception d’une partie des pneus et des déchets électroniques et électriques, traités localement, ces déchets sont donc exportés.

Par ailleurs, les filières de collecte des produits chimiques utilisés par les ménages (peintures, solvants, etc.) ne se mettent en place que depuis 2022 ; de fait, ceux-ci se retrouvent parfois dans les poubelles classiques.

De manière générale, certains déchets des filières REP sont parfois déposés par erreur dans les poubelles des ménages, et sont finalement enfouis : à La Réunion, 9 % du contenu de la poubelle ordinaire et 4 % du contenu de la poubelle jaune sont constitués de déchets dangereux ou d’autres déchets qui auraient dû être collectés séparément.

- La moitié des déchets ménagers sont destinés à être enfouis -

Au total, à La Réunion, l’enfouissement est la principale destination des déchets ménagers : 50 % des déchets collectés sont directement enfouis sans passer par un centre de tri. En pratique, 13 % de déchets supplémentaires, destinés initialement à être recyclés ou compostés, sont refusés après passage dans un centre de tri et sont eux aussi enfouis. Au final, la part des déchets effectivement enfouis atteint 63 % en 2021.

La Réunion est encore loin de l’objectif fixé par la loi de 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC), qui vise seulement 10 % de déchets enfouis d’ici 2035. Elle n’est néanmoins pas un cas isolé : la part de déchets enfouis directement sans passer par un centre de tri est supérieure à 50 % dans huit départements de l’Hexagone et atteint 60 % en Corse.

En outre, les deux centres d’enfouissement de l’île, situés à Sainte-Suzanne et à Saint-Pierre, sont proches de la saturation. L’installation de nouveaux centres de traitement ou de collecte se heurte à la problématique du foncier, au regard notamment des contraintes induites par la croissance démographique et du peu d’espace urbanisable.

Comme ailleurs, s’y ajoute la crainte des habitants face à ce type d’installations, comme en témoigne les polémiques autour de la création d’un nouveau centre prévu pour 2028. L’incinération des déchets ménagers est quant à elle inexistante à La Réunion, alors qu’elle concerne 34 % des déchets au niveau national. Cependant, deux centres de valorisation énergétique à partir de combustibles solides de récupération seront mis en service sur l’île en 2026.

En 2021, à La Réunion, 28 % des déchets ménagers sont destinés aux filières de valorisation matière, telles que le recyclage, qui consiste à transformer les matériaux usagés pour fabriquer de nouveaux produits, et le réemploi, qui permet de réutiliser les objets tels quels sans transformation. Par ailleurs, 18 % des déchets sont dirigés vers les filières de valorisation organique comme le compostage. Ainsi, 46 % des tonnages collectés à La Réunion ont vocation à être réutilisés (contre 48 % dans l’Hexagone).

Toutefois, du fait des refus de tri, la part des déchets effectivement recyclés ou valorisés est plus faible : 37 % seulement en 2021. C’est loin des 65 % visés pour 2025 par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de 2015 (LTECV). 

De plus, certains types de déchets sont collectés en quantités trop faibles pour justifier l’implantation de filières locales adaptées de recyclage. Ainsi, les structures existant sur le territoire ne permettent pas de traiter l’ensemble des matériaux recyclables collectés. Une partie d’entre eux sont donc exportés, notamment vers l’Inde et l’Hexagone. Ces exportations alourdissent l’empreinte carbone du traitement ainsi que les coûts associés, notamment avec la hausse des tarifs du fret maritime depuis la crise de la Covid-19.

Cette dépendance soulève aussi des enjeux de débouchés, les déchets dangereux ne pouvant plus être exportés hors de l’Union européenne. Par ailleurs, certains déchets qui pourraient être recyclés sont pourtant enfouis à La Réunion. C’est le cas par exemple
des emballages liquides alimentaires, comme les briques de lait vides qui, sur l’île, doivent être jetées dans les poubelles ordinaires et sont donc enfouies. En effet, il n’existe pas d’installation locale pour leur traitement.

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1 Commentaires
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2 jours

Y a encore du boulot