Retards d’acheminement

Pièces mécaniques introuvables et automobilistes à l'arrêt : c'est la faute à l'absence de fret commercial

  • Publié le 7 mai 2025 à 14:11
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Les délais pour obtenir des pièces mécaniques à La Réunion sont souvent longs, voire très longs, pénalisant fortement les propriétaires de véhicules. En cause : l’absence de vols cargos réguliers, un fret aérien saturé, et des contraintes logistiques accrues. Décryptage d’un système à la recherche de solutions. (Photo: sly/www.imazpress.com)

Garée à Saint-Denis le 17 mars 2025, Valéry découvre son véhicule accidenté : pare-choc arraché, phare démonté, capteurs hors-service. Près de deux mois plus tard, sa voiture n’est toujours pas réparée.

Commandées seulement début avril, les pièces n’arriveront que fin du mois, après une attente de plus de six semaines. "À chaque appel, on me disait qu’il fallait patienter un mois", témoigne-t-elle.

Le 30 avril, les pièces sont enfin livrées. Mais avec les jours fériés de mai, elle devra attendre encore une dizaine de jours avant de reprendre le volant. L’affaire, banale sur le papier, révèle les lenteurs du système.

Une situation d’autant plus difficile à vivre, qu'en pareil cas, les assurances ne fournissent un véhicule de prêt que pour une durée très limitée.

- L’insularité à l'origine des retards d'acheminement -

Pour Philippe Alexandre Rebboah, président du Syndicat de l’importation et du commerce de La Réunion (SICR), la situation est structurelle : "On ne peut pas stocker toutes les pièces, notamment de carrosserie, faute d’espace et de volume de rotation."

Trois options d’acheminement existent : maritime, aérien classique, et express. Chacune avec ses contraintes. Le fret maritime, économique, impose 30 à 45 jours de délai.

Le fret express est rapide, 5 à 7 jours, mais coûteux. L’aérien classique offre un compromis théorique, autour de 10 jours, mais souffre de la saturation du fret commercial.

La situation s’est aggravée avec la fin des vols cargos réguliers d’Air France. Il y a une quinzaine d’années, deux avions cargos desservaient l’île chaque semaine, le mercredi et le samedi.

Aujourd’hui, plus aucun. Contactée, la compagnie Air France confirme que les vols cargos sont désormais possibles uniquement sur demande pour des envois spéciaux. C'est le cas des chevaux, par exemple, qui une à deux fois par an font l'objet d'un vol dédié.

Désormais, le fret est chargé dans les soutes des vols passagers, mais ces espaces sont limités et soumis à la priorité des bagages ou des denrées périssables.

Résultat : les pièces peuvent être débarquées à la dernière minute et réacheminées plus tard.

- Voitures électriques, même galère, mais moins de pannes en perspective -

Vincent Hoarau, responsable véhicules électriques du groupe Caillé, nuance l'impact sur les voitures électriques du fait qu'elles "tombent beaucoup moins en panne qu’un véhicule thermique."

Il concède néanmoins qu'en cas d’avarie, "les délais sont plus longs, notamment pour les batteries."

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Il insiste sur une réalité peu connue : un moteur électrique compte 200 fois moins de pièces qu’un moteur thermique. Le problème est donc moins fréquent mais plus long à résoudre.

Toutefois, la rareté du parc électrique – seulement 4 % du parc roulant – limite les possibilités de stockage de pièces spécifiques.

Et pour certaines pièces sensibles comme les batteries au lithium, le transport aérien est interdit, pour des raisons de sécurité. Il ne reste alors que le maritime, avec ses délais de plusieurs semaines.

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- Conflits géopolitiques et désorganisation mondiale -

Autre facteur aggravant : le contexte international. Le contournement du canal de Suez pour les navires commerciaux, causé par les tensions au Proche-Orient, allonge les trajets maritimes et perturbe les flux. 

Les concessions tentent de s’adapter mais restent contraintes par la géographie et la dépendance aux flux continentaux.

"En Europe, une commande passée avant midi est livrée le lendemain matin. À La Réunion, notre insularité rend cela quasi impossible", résume le président du SICR.

- CMA CGM : un espoir dans les airs -

Face à ces problématiques structurelles, des solutions émergent. CMA CGM, connu pour son fret maritime, développe depuis 2021 une division aérienne.

Le groupe marseillais, bien installé à La Réunion, vient de racheter la compagnie Air Belgium, mettant ainsi la main sur quatre avions cargos, ce qui porte sa flotte à neuf appareils.

Si aucun vol n’est encore programmé vers La Réunion, l’idée d’ouvrir une ligne dédiée n’est pas exclue. 

Reste à trouver un équilibre économique : "Un avion ne peut pas voler à vide. Il faut une demande au départ comme à l’arrivée. Pour l'instant, nous n'en sommes qu'à la phase de discussion", conclut Philippe Alexandre Rebboah.

pb/www.imazpress.com / redac@ipreunion.com

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4 Commentaires
Gimi974
Gimi974
4 mois

Et je ne parle même pas des pièces pour véhicules électriques !, LOL

Sucré-Salé
Sucré-Salé
4 mois

Sans compter que les concessionnaires ne font plus de stock, même les plus importants et prestigieux. Quand on va acheter une pièce ils vous disent...il faut commander...cela doit revenir moins cher que de gérer un stock de pièces variées, personnel permanent etc etc...parfois de banales pièces on vous dit "il faut commander" minimum 15 jours...quand tout va bien.

Alice
Alice
4 mois

Le SICR agit en notre defaveur. L'aérien coûte cher donc le client en SAV coûte cher. Faut il encore acheter un véhicule à la réunion??

marius
marius
4 mois

retard dans l'acheminement des pièces, pas de problème : vite on achète de l'électrique les ventes vont remonter. Il fallait y penser