La présentation de saison du second semestre 2024 a été l’occasion d’un entretien avec Thierry Boyer qui évoque sa - presque - première année à la tête des Téats départementaux marquée par plus de démocratisation pour capter un large public et une ouverture sur la zone océan Indien pour davantage de diversité et de mutualisation de la programmation. (Photo Téat Champ Fleuri photo Sly imazpress )
À l’aube de cette première année à la tête des Téats départementaux, quel bilan dressez-vous ?
Avant tout, beaucoup de plaisir. Je m’étais fixé différents caps à savoir l’excellence de la programmation, l’ouverture tous azimuts en termes de public et l’amélioration de la fréquentation qui avoisine les 90%. Et je peux dire que sur ces points-là, j’ai été comblé.
Lorsque je me promène dans les travées, entendre quelqu’un dire que c’est la première fois qu’il vient au théâtre me comble, comme ce fut le cas récemment avec 250 jeunes dionysiens du quartier Vauban venus voir Olivié Araste et les Space Galvachers.
Toucher un très large public à travers une programmation riche et diversifiée me tient particulièrement à cœur. Je n’aime pas vraiment le terme trop galvaudé de démocratisation, je préfère davantage celui d’ouverture qui colle parfaitement à la mission de service public propre aux Téats départementaux qui sont par ailleurs très investis dans la notion d’échanges, notamment avec l’océan Indien, et qui se reflètera dans la programmation de ce second semestre 2024.
Les six premiers mois ont été ponctués d’événements marquants à l’image de « Jazz en l’air » notamment… Y-a-t-il selon vous des choses à perfectionner mais avec toujours cette optique de continuer à faire briller La Réunion et ses artistes ?
Oui, et la programmation de ce second semestre en est pour moi une parfaite illustration, marquée par des collaborations avec la région océan Indien autour de trois axes importants : avoir des programmations communes comme ce fut le cas sur le festival "Jazz en l’air" et l’an prochain il y aura de très grosses pointures via le MAMA Jazz et d’autres festivals sud-africains.
Le 2e axe est de pouvoir exporter nos artistes vers ces pays et le 3e volet est de s’abreuver de tout ce qui est proposé dans ces différents festivals pour pouvoir faire écho à La Réunion.
En gros, miser sur la mutualisation de la programmation en ne perdant pas de vue l’ouverture à soi et aux autres encore et toujours et qui constitue la colonne vertébrale de notre projet artistique.
Justement, parlons du second semestre, quels en seront les temps forts ?
Comme nous l’avons fait avec des événements qui rythment la vie culturelle de La Réunion tels que Komidi, Souffle O-I, Sept Soleils-Sept Lunes, Opus Pocus ou les Francofolies, nous ouvrirons la porte au festival Blues Marron au Téat Plein Air le 15 novembre, au festival des Arts de la marge auquel je suis très attaché car il offre la possibilité aux personnes porteuses de handicap - porteuses de normalité comme elles disent - professionnelles ou amateurs, de pouvoir s’exprimer.
Autre gros temps fort, le festival Do Moon qui met en avant des propositions venant de l’océan Indien. Également deux grosses productions "tionales pour ne pas dire internationales : le Malandain Ballet Biarritz qui nous revient avec "L’oiseau de feu & le Sacre du printemps "et mon coup de cœur théâtral, « Dans la mesure de l’impossible » de Tiago Rodrigues, par ailleurs directeur général du Festival d’Avignon. Sans oublier les 70 ans de René Lacaille, Francis Cabrel, Manu Payet,
Aurus que j’adore, et un petit plus qui s’est ajouté au dernier moment et qui n’apparaît pas dans la programmation : le théâtre Vollard qui redonnera des extraits de ses trois opéras (Maraina, Chin et Fridom) avec l’ORR, le 13 novembre à Champ Fleuri. Enfin, une belle rencontre entre Caroline Sageman et Jacqueline Farreyrol pour clôturer l’année à Champ Fleuri ; et l’autre au TPA avec Christine Salem et un projet exclusivement féminin.
Au-delà de la diffusion des spectacles, vous menez également d’autres missions. Pouvez-vous nous en dire davantage ?
Il y a en effet tout ce qui constitue la partie invisible à laquelle je souhaite rendre hommage. À savoir les spectacles à destination des scolaires, les actions éducatives en milieu scolaire en lien avec le rectorat, et le travail avec le territoire pour lequel j’ai déjà rencontré quasiment la moitié des maires afin de mettre en œuvre des conventions.
Nous menons déjà des actions toute l’année avec les villes de Saint-Paul et de Saint-Denis, mais aussi avec les 5 communes du Territoire de l’Ouest, sans oublier Saint-Joseph ou encore Sainte-Rose… Mon rêve, et j’y travaille, est de collaborer avec toutes les commune de La Réunion et de développer au maximum les partenariats avec les autres salles, types Kerveguen, Bisik, Luc Donat…
Vous disiez l’an dernier que dans la culture, le rapport à l’émotion était source de motivation, un moyen d’accéder à l’humain, de trouver son joyau, son identité, ce qu’il y a de bien en nous, sa place dans le monde. Est-ce toujours le cas ?
Plus que jamais et je suis toujours en phase avec ça. C’est peut-être le bénéfice de l’âge mais ce qui me motive et me procure un immense bonheur, c’est d’offrir aux gens par la sensibilité, quelque chose auquel ils n’ont pas accès. C’est ce qui me fait vibrer sinon je ne ferais pas ce métier-là.
Quid des travaux de rénovation des deux salles, sont-ils toujours d’actualité ?
Initialement prévus l’année prochaine, ils sont finalement reportés au premier semestre 2026 pour le Téat Plein Air et 2e semestre pour Champ Fleuri. Ce réajustement me convient parce qu’il nous permet de poursuivre nos actions, de faire une césure en milieu de mandat pour poursuivre avec des équipements neufs.
- Les grandes lignes sur la programmation -
Ce second semestre, une fois encore, donne la part belle aux artistes locaux qui constituent 60% de la programmation tant sur les grandes scènes que sur les petites que sont Karo Kann (Champ Fleuri) et les Badamiers (TPA). Pêle-mêle, musique, danse, humour, fonnkèr, magie, théâtre, classique… Pas moins d’une trentaine de propositions artistiques à déguster d’août à décembre.
- Coté artistes locaux, citons Danse en l’R, Sergio Grondin, René Lacaille, Vincent Fontano, Marie-Alice Sinaman, Ligue d’improvisation réunionnaise, Eric Lauret, l’ORR, Danyèl Waro, Compagnie Lolita Monga, Komkifo, Manu Payet, Nicole Dambreville, Votia, la Nouvelle Vague, Aurus, Vadrame Clair, Jacqueline Farreyrol, Christine Salem, le Groupe folklorique de La Réunion, Didier Boutiana, Cie Sakidi… S’agissant des artistes de l’océan Indien, saluons la venue de Boubacar Traoré (Mali), Baco & Urban Plant (Mayotte et Maurice), Jaojoby (Madagascar), Niladri Kumar (Inde), Nextart Factory (Maurice).
- Après « Jazz en l’air », premier gros événement du premier semestre, place à « Do Moon », festival de musique, danse et théâtre durant 5 soirées (du 2 au 6 octobre) avec des artistes de La Réunion, Maurice, Mayotte, Inde et Madagascar. Puis à la Battle de l’Ouest en novembre, durant laquelle B-Boys et B-Girls devront rivaliser de talent, d’endurance et de créativité pour convaincre le jury.
- Eux nous viennent du péi déor : les virtuoses de la trompette et du saxo, Paolo Fresu (Italie) et Kenny Garrett (États-Unis) se produiront dans le cadre d’Opus Pocus les 24 et 25 août ; la pianiste Caroline Sageman ; Francis Cabrel fera une halte de 5 dates au Téat Plein Air - qui affichent déjà complet - dans le cadre de sa tournée Trobador Tour ; le Malandain Ballet Biarritz avec sur scène une vingtaine de danseurs et danseuses pour « L’oiseau de feu » et « Le sacre du printemps », une double soirée dédiée au compositeur russe Igor Stravinsky ; et enfin le metteur en scène et dramaturge Tiago Rodrigues nous parlera d’humanité avec sa création « Dans la mesure de l’impossible".
Plus de détails et toutes les dates sur ce lien. La billetterie est d’ores et déjà ouverte.
vw/www.imazpress.com/[email protected]