Mondial-2018

L'élégant Herr Löw a raté son rendez-vous avec l'histoire

  • Publié le 27 juin 2018 à 22:21
  • Actualisé le 28 juin 2018 à 05:38

En poste depuis 2006, prolongé récemment jusqu'à 2022, l'élégant et flegmatique sélectionneur de la Mannschaft, Joachim Löw, aurait pu entrer dans l'histoire du foot en remportant une deuxième Coupe du monde consécutive. C'est complétement raté.

Le technicien allemand de 58 ans, sacré champion du monde en 2014 au Brésil, pouvait devenir en Russie le premier coach depuis la Seconde guerre mondiale à remporter deux Coupes du monde d'affilée. Le seul à l'avoir fait avant lui est l'Italien Vittorio Pozzo, en 1934 et 1938. Une autre époque, mais ce record tient donc toujours puisque l'Allemagne a quitté le Mondial-2018 en Russie mercredi au premier tour...

Des observateurs avisés avaient prévenu de la difficulté de l'entreprise. "Gagner une deuxième Coupe du monde de suite est probablement la chose la plus difficile que vous pouvez imaginer. Quand vous êtes assez chanceux d'en gagner déjà une, vous avez besoin d'une faim énorme, d'une réelle détermination" lançait ainsi auprès de l'AFP Jürgen Klinsmann, l'ancien "boss" de Löw à la tête de la "Mannschaft".

Au minimum en demi-finale depuis 2002, l'Allemagne faisait pourtant encore une fois figure de grand favori en arrivant en Russie...
Löw aurait pu tirer sa révérence le 13 juillet 2014, après la victoire à l'arrachée de son équipe contre l'Argentine (1-0, après prolongation) en finale du Mondial à Rio.

Après avoir remis l'Allemagne sur le toit du monde, 24 ans après son dernier sacre en Italie, en ayant amené son pays dans le dernier carré de toutes les compétitions majeures disputées, Löw n'avait plus grand chose à prouver.

- Séances de yoga -

Véritable star dans son pays, sa renommée a depuis longtemps dépassé le cadre sportif. Löw est une sorte d'icône glamour, entre pubs pour des cosmétiques et tenues vestimentaires scrutées, au point que le pull bleu à col en V qu'il portait lors de la Coupe du monde 2010 sud-africaine ou sa chemise cintrée de 2014 ont été rapidement en rupture de stock au pays.

Il est aussi très apprécié pour le calme olympien qu'il conserve en toutes circonstances. Il n'a pas dérogé à cette attitude après avoir été humilié par la Corée du Sud mercredi à Kazan (défaite 2-0). Interrogé par la ZDF pour savoir s'il comptait rester en poste après une telle désillusion, l'intéressé à la frange impeccable a déclaré sur un ton mesuré qu'il était "trop tôt" pour répondre à cette question. "Il faut quelques heures pour y voir clair, la déception est très profonde en moi (?) on va devoir mener des discussions demain (jeudi), on verra comment ça continue", a-t-il-dit de son accent souabe.

Cette placidité en toute circonstance s'est traduite dans la gestion de la Mannschaft. Il a ainsi introduit le yoga dans ses entraînements en sélection. Pourtant, sous cette sérénité apparente, la soif de titres de "Jogi", surnom hérité des séances de yoga, était loin d'être étanchée.

- Au Qatar en 2022 ? -

Attaquant assez quelconque pendant sa carrière de joueur, Löw n'aime rien tant que les défis. Propulsé entraîneur de Stuttgart par intérim quelques jours seulement avant le début de la saison 1996-97, il remporte la Coupe d'Allemagne, avant d'emmener le club souabe en finale de Coupe des coupes perdue en 1998.

Il confirmera ses capacités en Turquie (troisième en 1999 avec Fenerbahçe) ou en Autriche (champion d'Autriche 2002 avec le FC Tirol Innsbrück).
C'est alors que Jürgen Klinsmann, rencontré lors d'une formation, pense à lui à l'été 2004 pour devenir son adjoint à la tête d'une équipe d'Allemagne en perdition après une élimination au premier tour de l'Euro-2004, à deux ans de "son" Mondial.

Ensemble, mais bien aidés par l'émergence d'une génération douée techniquement et surtout moins stéréotypée athlétiquement ou tactiquement que les précédentes, ils vont entamer une mue dans la philosophie de jeu allemande qui permet à l'Allemagne de terminer troisième de sa Coupe du monde en 2006.

Klinsmann s'efface alors et c'est logiquement que la fédération demande à Löw de continuer à creuser son sillon, fait d'ambition dans le jeu, de confiance aux jeunes mais aussi de fidélité aux cadres, ce qui lui a été reproché en Russie. La question de son éventuel départ va évidemment revenir dans les prochains jours au sujet de ce technicien qu'on dit constamment sollicité par les plus grands clubs. Restera-t-il au contraire pour mener sa sélection jusqu'au Mondial-2022 au Qatar?

- © 2018 AFP

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