Tribune libre de Giovanni Payet

Économies budgétaires : le sacrifice des vivants au profit des marchés

  • Publié le 16 juillet 2025 à 08:21
  • Actualisé le 16 juillet 2025 à 08:23
La fête internationale du travail face au changement climatique.

François Bayrou a rendu publiques ses propositions pour réaliser 40 milliards d’euros d’économies budgétaires. Sous couvert de rigueur et de rationalité, ce plan s’inscrit dans une logique de soumission intégrale aux dogmes ultralibéraux, faisant payer aux citoyens les choix d’un système à bout de souffle, incapable de répondre aux défis du siècle.

Derrière les “économies”, un projet de société inacceptable

Ce plan propose de s’attaquer aux services publics, aux dépenses sociales, aux collectivités locales... mais pas un mot sur les superprofits, les dividendes records ou les privilèges fiscaux des plus riches.

Il s’agit, ni plus ni moins, de protéger les intérêts des marchés en détricotant ce qu’il reste du modèle social français : hôpitaux, écoles, solidarité, culture, logement.

Parmi les propositions les plus aberrantes figure la suppression de jours fériés, comme si l’on pouvait résoudre les déséquilibres budgétaires en volant aux travailleurs leurs temps de repos, leurs fêtes civiles ou religieuses, leurs temps de respiration. C’est une attaque symbolique forte contre la dignité du travail, contre nos repères culturels, contre le droit au répit.

Climat et vivant : les grands sacrifiés

Dans un monde en feu, frappé de plein fouet par les effets du dérèglement climatique, cette logique de coupes budgétaires et de croissance sans frein ignore volontairement l’effondrement du vivant.

Elle hypothèque toute capacité d’adaptation des territoires, alors même que les investissements dans la transition écologique, l’agriculture locale, la rénovation énergétique ou la mobilité durable sont urgents et massifs.

Des milliards pour les entreprises, des sacrifices pour les citoyens ?

Cette politique est d’autant plus indéfendable que le rapport du Sénat publié en 2025 met en lumière l’ampleur des aides publiques accordées aux entreprises : plus de 150 milliards d’euros chaque année, souvent sans aucun contrôle ni condition. Des exonérations fiscales, des subventions et des crédits d’impôt dont l’efficacité économique est largement contestée… mais qui ne sont jamais remis en question.

L’État serre la vis aux citoyens, mais continue à ouvrir les vannes aux groupes privés. Où est la cohérence ? Où est la justice ?

Les Outre-mer une fois de plus relégués

À La Réunion, territoire frappé de plein fouet par les injustices sociales, les inégalités territoriales et les risques climatiques, ce projet est une gifle supplémentaire. Comment oser parler de "rationalisation" quand près d’un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté, que le chômage des jeunes reste massif, que les services publics sont en tension permanente ? À Saint-Denis, les habitants des quartiers populaires voient chaque jour les conséquences du désengagement de l’État : écoles saturées, désertification des services, précarité du logement, insécurité alimentaire.

Et on voudrait maintenant leur faire croire qu’en supprimant des jours fériés ou en réduisant encore les moyens des communes, on “sauvera” la République ?

Nous refusons ce chantage. Une autre voie est possible. La Voix Citoyenne appelle à une bifurcation politique profonde :

- Conditionner toutes les aides aux entreprises à des engagements clairs sur l’emploi, l’écologie, la transparence.
- Lutter contre l’évasion et l’optimisation fiscales, qui coûtent des dizaines de milliards chaque année.
- Investir massivement dans la transition écologique et la justice sociale, en particulier dans les Outre-mer.
- Protéger le droit au repos, à la culture, au lien social, symbolisé par les jours fériés et les temps communs.

Nous ne voulons pas d’une société où l’on sacrifie les humains et la nature pour rassurer les agences de notation.

Nous voulons une République du soin, de la solidarité, de l’émancipation. Et cela commence par refuser cette prétendue “réforme de bon sens” qui n’est qu’un habillage technocratique d’une vieille logique de domination.

Giovanni Payet - Président de la voix citoyenne – La Réunion

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