À l’occasion de l’anniversaire des 120 ans de la loi de 1905 célébré ce 9 décembre, l’UFAL Réunion tient à rappeler avec force en quoi la laïcité est le ciment de notre société, pourquoi et comment la défendre et la faire vivre dans notre île.
Pourquoi, en 2025, ce qui devrait être évident pour toutes et tous, car inscrit dans la loi, doit-il être rappelé ici à la Réunion ?
"Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde", disait Camus. Il est aujourd’hui important et même indispensable de rappeler la valeur des mots, pour empêcher que la laïcité continue à être utilisée par certains comme un glaive ou comme un moyen d’exclure. La laïcité est le contraire absolu de tout cela. C’est une loi d’égalité, une valeur à la fois émancipatrice et de concorde. Elle doit être réaffirmée comme telle.
Certains, tentent encore de faire passer les lois divines avant les lois civiles de la République. Ils sont capables d’aller très loin, ils sont capables de décapiter un professeur devant son collège. Il est encore temps de réagir, d’empêcher que ce qui est devenu aujourd’hui une triste réalité, ne devienne un réel danger pour notre société insulaire qui n’est à l’abri de rien du tout.
Nous ne pouvons nous contenter d’un hommage et retourner à nos petites habitudes, comme nous le faisons chaque année. Nous ne devons renoncer à rien, nous ne pouvons tolérer aucun accommodement avec ce principe au risque de voir reculer la République et les libertés.
- "La laïcité est un principe de droit politique qui recouvre un idéal universaliste d’organisation de la Cité" disait si bien le philosophe Henri Peña-Ruiz.
Le principe de laïcité, se fonde sur trois exigences indissociables : la liberté de conscience, l’égalité de tous les citoyens quelles que soient leurs convictions spirituelles, leur sexe ou leur origine, et à travers le principe de Neutralité ABSOLUE, la visée de l’intérêt général, du bien commun à tous, comme seule raison d’être de l’État.
Certains essaient de qualifier la laïcité d’ouverte, de fermée, d’accommodante, de positive, à la française, à la réunionnaise... de la dévoyer, permettre qu’elle soit détournée de son sens originel, laisser le champ libre à celles et ceux qui la récusent, la contestent, ceux qui habilement, font en privé des courbettes devant les représentants de l’état, tout en critiquant en public les lois de La République.
Une offensive oecuménique, réseautage et force financière à l’appui, tisse depuis plusieurs années déjà dans l’île, une véritable toile d’araignée d’influence, avec la complicité ou la faiblesse des institutions étatiques, publiques et universitaires, de certains médias et de pseudo associations de défense de la loi 1905.
La question Laïque se retrouve ainsi noyée dans un zambrokal indigeste de religiosité omniprésente, présentée comme incontournable voire essentielle, comme l’alpha et l’oméga d’une société qui se sécularise comme partout ailleurs.....
Une cérémonie à caractère historique marquant l’engagisme à La Réunion, pour ne prendre que cet exemple, qui devrait rassembler tous les citoyens divers et multiples réunionnais autour de la question essentielle du peuplement de l’île, se retrouve ainsi parasité par des rituels religieux imposés à l’ensemble du public présent, mélangeant origine, culture, religion, histoire et citoyenneté, dans un fouillis indescriptible et dommageable au plan scientifique.
Sous couvert du "vivre ensemble", terme valise à la mode, on ne se pose aucune question, on fait l’autruche, chacun y va de sa musique, y met ce qu’il veut bien y mettre, entend ce qu’il veut bien entendre, met sous le tapis ce qu’il ne veut pas voir ou montrer...
Nombreux sont ceux, et ils ne s’en cachent pas ici et ailleurs, persuadés que l’esprit saint qui les pénètre est au-dessus des lois, que leur enthousiasme est la seule loi qu’ils doivent entendre.
- "Que répondre à un homme qui vous dit qu’il aime mieux obéir à Dieu qu’aux hommes, et qui, en conséquence, est sûr de mériter le ciel en vous égorgeant ?" questionnait déjà Voltaire, visionnaire malgré lui, dans son Dictionnaire philosophique portatif, traitant du fanatisme en 1764 !!!
La laïcité consiste à affranchir l’ensemble de la sphère publique de toute emprise exercée au nom d’une ou de plusieurs religions ou d’une idéologie particulière. Elle protège l’éducation en séparant l’instruction civique républicaine, nécessité absolue, de l’activité religieuse.
Cet héritage, nous devons le défendre et c’est ce que font les professeurs qui n’ont pas encore renoncé dans leurs classes quand ils transmettent aux élèves l’héritage des Lumières, de Voltaire, de la Révolution, de Jaurès et de Clémenceau.
Il faut plus que jamais les soutenir, les former, les aider, être fermes contre toutes celles et ceux qui professent des discours anti femmes, anti homosexuels, anti avortement, anti sciences... Il faut les soutenir contre toutes celles et ceux qui s’attaquent à la liberté d’enseigner, aux programmes scolaires, au dispositif EVARS pour ne citer que celui-ci, etc, etc....
Il faut les soutenir tout comme il faut soutenir les autres professionnels, notamment ceux de la santé, confrontés à des comportements nouveaux et problématiques...
Il faut les soutenir contre toutes celles et ceux qui légitiment les comportements, prises de position et crimes les plus atroces contre la liberté de conscience...
A l’occasion des 120 ans de la Loi 1905, loi de SÉPARATION des églises et de L’ÉTAT, est-il nécessaire de rappeler qu’une journée Laïcité à l’école, ne peut être l’occasion d’une tribune offerte aux différents ministres des cultes pour y faire au sein de l’école publique, la promotion des religions.
Rappeler qu’une municipalité respectueuse de l’égalité des citoyens et de la neutralité républicaine, ne peut imposer à tous et financer une célébration religieuse lors d’une fête foraine populaire.... qu’une collectivité n’a pas à programmer et financer ne serait-ce que par respect des convictions, une messe en ouverture d’un rassemblement de personnes âgées... qu’une autorité religieuse n’a pas le droit d’appeler publiquement à la désobéissance civique... etc, etc...
Les entorses à la loi 1905 sont profusion ici à La Réunion, sans cesse dénoncées par l’UFAL 974. Paradoxalement et on le regrette, aucun déféré Laïcité n’a encore été pris à notre connaissance par la Préfecture de La Réunion !!!
À l’occasion de cet anniversaire, nous exigeons de l’État, des pouvoirs publics, vigilance, responsabilité, fermeté, rappel des limites, pour nous, pour l’avenir de nos enfants, pour cette société qui montre chaque jour un peu plus ses fragilités et sa perméabilité.
La laïcité, qui est consubstantielle au triptyque « liberté, égalité, fraternité », est le ciment de notre société, au-delà du genre, des convictions, des opinions, de la religion ou des origines de chacun.
Elle mérite que des moyens suffisants lui soient alloués pour mieux la faire connaître, l’expliquer, la défendre et la promouvoir véritablement.
Pour l’UFAL de la Réunion
Le président : Daniel Cadet
