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Courrier des lecteurs de Wilfrid Bertile

La plus mauvaise des politiques, à l'exception de toutes les autres...

  • Publié le 15 décembre 2014 à 04:26
Wilfrid Bertile

Il est de bon ton de dénoncer le Gouvernement au vu de certains résultats pourtant trop prévisibles en raison des politiques d'austérité : une croissance atone, le chômage qui se tient à un niveau élevé, des déficits qui se résorbent trop lentement. Mais, ce dont il faut lui savoir gré, c'est de tenter de sauvegarder au mieux le " modèle social français ".

La France et l’Europe n’en finissent pas de sortir de la crise financière de 2008. En dépit des difficultés économiques et des souffrances sociales, il est admis que notre pays l’a plutôt mieux traversée que d’autres grâce à son modèle social qui a servi d’air-bag.

Liée au capitalisme financier, la crise est celle de l’endettement, privé et public. Au fil des années, la baisse de la part des salaires dans la richesse produite a conduit les ménages à maintenir leur niveau de dépenses par l’endettement. La crise de cet endettement privé aux Etats-Unis (subprimes) s’est transformée  en  crise bancaire, puis financière et économique qui a gagné le monde entier. Les Etats sont intervenus massivement pour sauver le système bancaire alors qu’ils étaient déjà endettés. Cet endettement public est principalement lié aux politiques fiscales qui ont pendant longtemps préservé le capital et les hauts revenus. Il a augmenté aussi en même temps que la baisse des revenus des ménages et les conséquences sociales de la crise pesaient sur les dépenses de solidarité.

Le Gouvernement français cherche la recette magique pour sortir du cercle vicieux  dans lequel le pays est enfermé : l’Etat doit emprunter pour couvrir ses dépenses ; pour emprunter à des taux supportables et répondre aux injonctions de Bruxelles, il doit diminuer son déficit budgétaire ; pour diminuer son déficit, il doit diminuer les dépenses publiques ; pour diminuer ces dépenses publiques, il doit tailler dans les dépenses sociales, dans le fonctionnement des services publics, reculer l’âge de la retraite…. Ces mesures d’austérité appauvrissent les ménages, brident la croissance économique, secrètent du chômage. Or, une croissance économique trop faible met l’Etat dans l’impossibilité de tenir ses engagements financiers, ce qui incite les agences de notation à dégrader sa dette souveraine.  La boucle est bouclée.

Il faut renouer avec la croissance, nécessaire à la création d’emplois, à la rentrée de recettes fiscales et à la sortie du piège de la dette. Mais du fait de la construction européenne, le Gouvernement n’a plus tous les leviers pour la promouvoir. Certes, les politiques budgétaires et fiscales restent de sa compétence, mais elles sont encadrées par le Pacte européen de stabilité et de croissance qui impose d’atteindre au plus vite l’équilibre des finances publiques. A trop faire appel à la fiscalité, il se heurte au " ras le bol " de l’impôt et au dumping fiscal d’autres pays responsable de l’évasion fiscale. Avec l’euro, l’Etat a cédé sa souveraineté monétaire à la Banque Centrale Européenne. Il ne peut plus, ni créer de la monnaie pour relancer son économie, ni dévaluer sa monnaie pour favoriser les exportations.

Au plan  intérieur, le Gouvernement, malgré la rigueur budgétaire, joue sur le levier de l’offre (CICE, pacte de responsabilité) plus que sur celui de la demande, sans doute de peur de favoriser les importations. Il mène aussi la bataille au niveau de l’Europe. Après un premier plan de relance de 120 milliards d’euros, un autre de 300 est annoncé. L’idée  de plus de croissance n’est plus taboue au niveau européen. Et surtout, en agissant comme prêteur en dernier ressort, à l’instar la Banque Centrale japonaise ou la Réserve Fédérale  américaine, malgré les textes qui s’y opposent, la Banque Centrale Européenne a montré sa volonté de mettre fin à la spéculation  contre l’euro, ce qui a calmé les marchés. Une taxe sur les  transactions financières est, enfin, instaurée même si son taux est trop bas.  On avance vers une Union bancaire européenne. Il faut encore aller vers une harmonisation européenne  de l’impôt sur les sociétés, des systèmes sociaux et une réelle réciprocité dans les échanges mondiaux.  Sans doute le gouvernement français devrait-il peser davantage pour que l’Europe aille plus vite et plus loin dans ces directions.

En outre, le Gouvernement s’est refusé à mettre en œuvre  une politique d’austérité  de l’ampleur de celles qu’ont subies  la Grèce, l’Espagne, l’Italie ou le  Portugal. Le coût social et politique en a été énorme sans que les problèmes ne soient véritablement résolus: baisse des salaires, des prestations sociales  et des pensions, réduction drastique du nombre des fonctionnaires, dégradation des services publics, montée des extrémismes... En France, des mesures  sociales sont toujours édictées, même si elles sont de portée souvent limitée. 60 000 postes sont créés dans l’Education, redevenue le premier budget national… C’est avec raison que, pour l’essentiel, le modèle social français est conservé car il assure la solidarité et la cohésion dans un monde où croissent les inégalités.

Ce modèle social ne résisterait pas au programme de l’opposition si elle revenait au pouvoir, et les conséquences seraient catastrophiques, notamment pour La Réunion. L’opposition critique les actions menées, mais ses propositions vont plus loin que ce qu’elle dénonce (voir Le Monde, 21 mars 2013) : alors que le Gouvernement  veut réduire de 50 milliards d’ici à 2017 les dépenses publiques, elle envisage de les diminuer de 130 milliards sur 5 ans. Pour cela, elle propose de baisser les dotations de l’Etat  aux collectivités locales non pas de 11 milliards comme le veut le Gouvernement, mais de 20 milliards ! (qu’en pensent les maires qui ont fait grève contre la baisse de la dotation gouvernementale ?),  de diviser par deux le coût des niches fiscales pour l’impôt sur le revenu (qu’en pensent tous ceux qui ont recours à la défiscalisation ?) ; de diminuer de 15 milliards les aides au logement (qu’en pensent les 23 000 ménages réunionnais qui attendent un logement social ?); de supprimer les emplois aidés dans le secteur public sauf pour les personnes handicapées (qu’en pensent les milliers de jeunes Réunionnais qui en bénéficient dans les collectivités?); de baisser de 20 milliards les dépenses de sécurité sociale avec les conséquences sur la santé et la solidarité; d’augmenter de 3% le taux de TVA, cet impôt indirect qui pénalise les plus pauvres. L’opposition propose encore de reculer l’âge de la retraite à 65 ans et 44 années de cotisations ; l’instauration des 39 heures dans la fonction publique, le non remplacement de 2 fonctionnaires sur 3 partant à la retraite...

Ne lâchons pas la proie pour l’ombre. Ne coupons pas la branche sur laquelle nous sommes assis. La politique  actuellement menée est sans doute la plus mauvaise, mais à l’exception de toutes les autres.

Wilfrid Bertile

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2 Commentaires
Sijaurésu
Sijaurésu
10 ans

Wilfrid recycle l'adage sur la démocratie qui serait le "moins pire" des systèmes politiques, histoire d'appliquer les vertus dudit système à la politique hollandouillaise… Piètre procédé qui laisse à croire que la médiocrité ambiante serait soit une panacée, soit un effet de la providence dont il faudrait se satisfaire. Alors certes, Hollande vaut bien le soliveau de la fable, mais les Français ne sont ni des grenouilles, ni des veaux et s'il en est un qui a cru pouvoir se faire aussi gros qu'un bœuf, c'est bien notre capitaine de pédalo enflé au point de revêtir les attributs d'un président de la république quand il n'était qu'un petit premier secrétaire en mal d'émois champêtres. Le PS et la gauche, molle aussi bien qu'extrême, dévoient le système social français en méprisant la notion de citoyenneté qui est le ciment de la République. Le pseudo universalisme décliné par le gouvernement en matière de droits sociaux est une des causes premières de l'austérité qui nous est appliquée, avec de bonnes doses de moraline, en guise de mortification politique. Et il faudrait dire merci !

contestataire 1600
contestataire 1600
10 ans

Demander à un fonctionnaire socialiste de trouver une solution pour relancer ou booster l'économie d'un pays, c'est surement de la démagogie intense; il pourrait bien aller se former en chine capitaliste (croissance à 2 chiffres) pour apprendre la gestion ; il reviendra probablement moins gras d'absurdités