À la Cité des arts samedi soir

Saint-Denis : carte blanche à Louïz pour la Journée de visibilité transgenre

  • Publié le 31 mars 2023 à 06:53
Louïz

À l’occasion de la Journée internationale de visibilité transgenre le vendredi 31 mars 2023, la Cité des Arts (Saint-Denis) donne ce samedi 1er avril, carte blanche à la chanteuse et comédienne réunionnaise Louïz, élue Miss Trans France en 2021, pour mettre en lumière la pluridisciplinarité de la scène queer à La Réunion, en collaboration avec le centre LGBTQIA+ de l’océan Indien. Elle présentera son propre répertoire et invitera d’autres artistes de la communauté Queer tels que MaFanny, Brandon Gercara, Chrys, Kayelo, Nymphea à performer à ses côtés.

Un show haut en couleurs destiné à divertir le public tout en le sensibilisant car ces dernières années, bien que toujours insuffisante, la visibilité des trans - personnes vivant sous un genre différent de celui de naissance - n’a jamais été aussi importante.

Des représentations positives de personnes trans notamment dans l’espace public ont permis de toucher le plus grand nombre à travers les médias, les séries, les personnalités à l’image de Louïz qui évoque ouvertement son parcours qui ne fut pas un long fleuve tranquille, loin de là… Interview

• En tant qu’artiste, estimez-vous participer à l’évolution des mentalités et au changement de regard sur la communauté trans ?

- À mon niveau, j’ai choisi d’en parler ouvertement car il y a quelques années j’ai manqué de repères. Très peu de personnalités osaient s’affirmer que ce soit en métropole ou à La Réunion.

Or j’estime qu’il est important de pouvoir s’identifier à des personnes, et en tant qu’artiste, on se doit justement de faire évoluer les mentalités ne serait-ce qu’en véhiculant des messages par rapport à l’acceptation de soi, travail primordial pour créer sa propre évolution et entamer sa (r)évolution.

D’ailleurs, si j’ai choisi d’appeler mes EP Évolution et (R)évolution, c’était pour montrer tout le travail que j’ai entamé pour devenir la femme que je suis aujourd’hui.

• La musique comme acceptation de soi et de tolérance, en somme ?

- Tout à fait. Beaucoup de gens m’ont connue en tant que chorégraphe. J’ai toujours fait ça pour passer un maximum de messages, et c’était tout naturel de continuer à utiliser la musique en solo pour sensibiliser.

Et ça marche plutôt bien puisque j’arrive à toucher un public intergénérationnel. En étant dans une forme de militantisme artistique, c’est plus facile de sensibiliser. Et si on va plus loin, je pense que les gens ne sont pas fondamentalement méchants envers les trans, beaucoup sont dans l’ignorance et la méconnaissance.

Il faut juste éduquer mais pas de manière frontale, c’est pour cette raison que j’ai choisi ce militantisme pour véhiculer mes messages de tolérance plus facilement.

• Parle-t-on de singularité ou de différence selon toi ?

Beaucoup de gens, même dans la communauté, parlent de différence. Certains le perçoivent ainsi car ils ont du mal à s’accepter et malheureusement, la tranphobie touche tous les milieux. Je préfère de loin le mot singularité, car on est tous des êtres humains.

La seule différence c’est qu’on a évolué dans une identité qui n’était pas la nôtre au départ. Donc, il n’y a pas de différence qui tienne ! On est dans une démarche d’affirmation de soi. Et pour parvenir à avoir le recul nécessaire, cela demande un gros travail de développement personnel.

J’ai cette chance d’être très bien entourée et d’avoir une communauté très bienveillante à mes côtés, ce n’est pas le cas de tout le monde et le manque de respect peut faire des dégâts. À mon niveau, je respecte les convictions des uns et des autres et je réclame juste le droit d’exister.

C’est aussi pour ça que je ne parle pas de combat dans mon engagement au quotidien pour la simple et bonne raison que je ne me bats pas contre les autres, je suis plutôt dans une volonté de vivre-ensemble.

• On est d’accord que l’invisibilisation de la transidentité doit cesser. Cette journée du 31 mars y participe-t-elle ?

- Complètement. Les gens ont tendance à dire que c’est un phénomène de mode, alors que non. Il y a 15-20 ans, on n’en parlait pas et on n’avait pas de modèle de représentation. J’ai mis deux ans avant de passer le cap et d’engager ma transition. C’est important pour les jeunes trans mais aussi leurs parents. D’ailleurs, certains me disent merci et me considèrent comme porteuse d’espoir.

• La tolérance démarre dans la cour d’école pour sensibiliser aux différences dès le plus jeune âge…

C’est très difficile dans le cadre de l’Éducation nationale. Jusqu’à l’an dernier j’étais coordinatrice du projet Démos à la Cité des Arts et les jeunes m’ont connue sous mon identité masculine. Quand j’ai démarré ma transition, j’ai dû, avec l’aide de  travailleurs sociaux, m’expliquer face à ces jeunes âgés entre 8 et 10 ans et répondre à leurs questions parfois directes.

Aujourd’hui si l’Éducation nationale acceptait qu’on puisse sensibiliser les jeunes adolescents sans verser bien entendu dans la propagande, il y aurait sans doute moins de problèmes de harcèlement. À mon avis, le travail de tolérance, de respect de chacun et de sensibilisation à la bienveillance devrait démarrer dès l’école primaire.

• À quoi doit-on s’attendre samedi soir ?

À un show musical parce que je suis issue du spectacle vivant. L’intégralité de mes tableaux sera chorégraphiée et j’aurai à mes côtés une dizaine de danseurs. On sera davantage dans la performance et le spectacle visuel que dans la formule concert. Mais surtout, ça sera un moment pour divertir les gens… tout en les sensibilisant !

Pour la petite histoire…

La Journée internationale de visibilité transgenre a été créée en 2009 par la militante américaine Rachel Crandall, pour combler le manque de moments de célébration consacrés aux personnes transgenres vivantes. Jusqu’alors, il n’existait que la Journée internationale du souvenir transgenre du 20 novembre, qui rend hommage aux victimes de crimes transphobes mais aucune n'était consacrée à la célébration des personnes trans vivantes.


vw/www.ipreunion.com/redac@ipreunion.com

• Carte Blanche à Louïz - De l’évolution à la (r)évolution, à la Cité des arts, samedi 1er avril, 20h

• Le jeudi 30 mars à 19 h 30 : avant-première du film de Florian Cioffi Louïz de l’Évolution à la [R]Évolution pour Canal+Réunion au Cinepalmes Sainte-Marie

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