Le Smic à 1700 euros, est-ce possible?

Avec des sondages de plus en plus favorables et une cote de popularité en hausse, le candidat du Front de Gauche Jean-Luc Mélenchon affirme que s'il est élu à la présidence de la République, il augmentera le Smic à 1700 euros bruts, soit une hausse de 21%. Cette proposition concernerait plus de 3 millions de personnes en France. Si la mesure est utile socialement, économiquement est-ce faisable?

Proposer un Smic à 1700 euros, est-ce bien raisonnable? Pour Jean-Luc Mélenchon et le Front de Gauche, qui le proposent, bien sûr. Pour la CGT aussi. Pour leur part, les économistes et les organisations patronales sont bien moins enthousiastes. Et dans une économie dominée par les petites et moyennes entreprises comme celle de la Réunion, la proposition fait particulièrement débat. Ces petites structures supporteraient-elles un tel surcoût?

Si aujourd'hui, le salaire minimum plafonne à 1400 euros brut, une augmentation à 1700 euros brut donnerait aux salariés un pouvoir d'achat supérieur de plus de 200 euros. Et pour les pro smic à 1700 euros, c'est l'argument principal qui rend cette proposition économiquement viable : elle réinjecte de l'argent dans le système et relance la consommation.

" C'est une mesure nécessaire socialement et efficace économiquement. Elle permet de remettre de l'argent dans le circuit et beaucoup d'entreprises peuvent supporter le surcoût. La caractéristique des petites entreprises est un argument qui a toujours été avancé pour éviter de faire quoique ce soit au niveau des salaires. Mais nous retournons l'argument : comment fait-on aujourd'hui pour vivre avec 1000 euros? ", déclare Ivan Hoarau, de la CGTR.

Au niveau national, la CGT revendique un Smic mensuel brut de 1 600 ? depuis 2008. Mais depuis, l'indice de prix qui sert à l'indexation du Smic a augmenté de 4%. Ainsi, le syndicat de gauche, réclame lui aussi, depuis juin 2011, un passage du salaire minimum à 1700 euros brut. Au niveau national, le syndicat estime que plus de justice salariale est nécessaire pour sortir de la crise. Au niveau local, l'argumentation est plutôt centrée sur la vie chère, notamment pour les salariés les plus modestes.

Autre argument du candidat du Front de Gauche : le Smic a déjà été augmenté de 25% en 1981 et même de 35% en 1968. Et dans les années 90 à la Réunion, le SMIC a été indexé sur le Smic métropolitain et a augmenté de 22% pour combler l'écart. " Mais c'était dans un contexte beaucoup plus positif (une croissance forte) et avec un étalement sur près de 10 ans. Nous ne sommes pas du tout dans ce cas de figure aujourd'hui avec la proposition du Front de Gauche ", rappelle l'économiste Jean Yves Rochoux. S'il juge cette idée " peu réaliste ", il estime malgré tout qu'une telle mesure pourrait relancer certains secteurs. " Les ménages concernés peuvent consommer la totalité de l'augmentation de revenu du fait de leur très faible propension à épargner en situation normale ", poursuit-il.

Coté financement d'une telle mesure, la CGTR n'exclut pas de faire appel à la puissance publique qui pourrait " réorienter ses aides pour aider les entreprises à passer le cap ". Mais pour Jean-Yves Rochoux, la marge de manoeuvre est restreinte puisque les charges sociales sur les bas salaires sont déjà largement minorées, or proposer un allègement des charges serait une des seules mesures possibles visant à permettre cette augmentation. Et le débat n'est pas clos.

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