Justice - Affaire Théo Hilarion

Acquittement pour les gendarmes

  • Publié le 26 juin 2008 à 00:00

Ce jeudi 26 juin 2008 la cour d'assises a acquitté les deux gendarmes accusés d'avoir éborgné le docker Théo Hilarion le 7 mars 1994. Lavocat général avait requis une peine de cinq ans de prison avec sursis. Le verdict a été rendu dans l'après-midi au terme de quatre jours de débats qui, s'ils n'ont pas fait la lumière sur le rôle exact des deux gendarmes dans l'affaire, ont bel et bien révélé l'existence d'une conspiration du silence orchestrée en haut lieu et l'implication de puissants dignitaires de l'Administration et de la justice.

La cour d'assises n'avait que deux personnes à juger, alors que ces quatre jours du procès ont clairement mis en évidence qu'elles n'étaient pas les seules responsables du drame qui se joue depuis quatorze ans. S'il est avéré qu'Alain Michelot a bien tiré sur Théo Hilarion avec une arme non autorisée et que Charles Gamet dirigeait les opérations de maintien de l'ordre ce jour-là, il paraît aujourd'hui évident que les supérieurs hiérarchiques du capitaine ont également joué un rôle non négligeable dans l'affaire.
Ceux-là ont la chance de ne pas se trouver dans le box des accusés cette semaine. Le colonel Denis Guillaume, patron de la gendarmerie à l'époque, a directement mis en cause, dans son témoignage entendu mercredi, les différentes autorités en poste en 1994. D'après lui, le préfet Fournier, le procureur général Truchi, le procureur Legras et le juge Hoareau savaient tous que le tir provenait d'une arme interdite utilisée par un gendarme mais aucun n'a parlé, laissant volontairement traîner les choses au nom de l'ordre public et se rendant coupables d'une terrible entrave à la justice.

"Je vais vivre en paix"

Le jury a rendu son verdict en fin d'après-midi, prononçant l'acquittement des deux militaires. C'est bien sûr un soulagement pour l'adjudant Michelot et le capitaine Gamet mais aussi pour la victime elle-même. Avant que les jurés ne se retirent pour délibérer ce jeudi après-midi, Théo Hilarion s'est levé pour accorder une fois encore son pardon à Alain Michelot. " J'ai eu une partie du puzzle de la vérité. Maintenant, je peux continuer ma vie avec une certaine sérénité même si cela ne me redonne pas mon ?il a -t-il déclaré ". L'avocat de l'ex-adjudant chef Michelot avait plaidé la légitime défense et demandé l'acquittement pour son client tout comme l'avocat de Charles Gamet. Pour ce dernier, on ne condamne pas sur des hypothèses. Dans sa plaidoirie, il a rappelé également une règle de droit : la complicité c'est provoquer l'infraction. " Peut-on être complice de quelqu'un qui commet l'irréparable, indépendamment de sa volonté ? Vous ne pouvez condamner Gamet parce qu'il y a eu une complicité par omission. a-t-il déclaré aux jurés. Ne prenez pas le risque d'une erreur judiciaire. Je vous demande d'appliquer le principe du bénéfice du doute ".
Le jury, trois magistrats et neuf "jurés populaires (des citoyens tirés au sort) a été convaincu par ces plaidoiries. Le verdict d'acquittement a été prononcé dans un silence pesant. Les collègues dockers de la victime ne s'attendaient visiblement pas à cette absolution judiciaire. "Ce qui nous importe c'est le verdict de Théo. Il dit qu'il a pardonné, nous le soutenons" finira par commenter Michel Séraphine, dirigeant de la CGTR Ports et Docks. Quant à Théo Hilarion, il a conclut avec cette dignité dont il ne s'est jamais départi : "ce procès est fini, j'ai pu parler aux accusés, je suis libéré. Je vais enfin pouvoir vivre en paix".
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