L'Ukraine a ouvert la voie Ă une participation aux Jeux olympiques de ses sportifs, dĂ©sormais autorisĂ©s, sous certaines conditions, Ă affronter Russes et BĂ©larusses, mĂȘme si la disqualification jeudi de son escrimeuse Olga Kharlan montre que le chemin sera cahoteux.
La sabreuse a vécu une journée agitée. Dans la matinée, les instances de son pays lui ont donné le feu vert pour affronter une Russe, une premiÚre depuis l'invasion de l'Ukraine par les troupes russes en février 2022. AprÚs avoir surclassé son adversaire Anna Smirnova, elle a refusé de lui serrer la main, ce qui lui a valu une disqualification.
Une décision "absolument scandaleuse" selon la présidence ukrainienne.
Mais aux yeux du Comité international olympique (CIO), cet incident ne doit pas occulter le fait qu'en allégeant les contraintes pesant sur ses ressortissants sportifs, Kiev les autorise "à participer aux compétitions internationales" ce qui "leur permettra de se qualifier pour les Jeux olympiques de Paris 2024".
Jusqu'Ă prĂ©sent, Ă l'exception du tennis oĂč les joueurs concourent Ă titre individuel et ne reprĂ©sentent pas leur pays, les Ukrainiens Ă©taient purement et simplement interdits de prendre part Ă des compĂ©titions oĂč s'alignaient des ressortissants russes ou bĂ©larusses.
Mais mercredi soir, le dĂ©cret a Ă©tĂ© modifiĂ©. L'interdiction s'applique dĂ©sormais aux compĂ©titions oĂč s'alignent des sportifs "reprĂ©sentant la FĂ©dĂ©ration de Russie ou la RĂ©publique du BĂ©larus". En clair, si ceux-ci s'alignent sous banniĂšre neutre, l'objection est levĂ©e.
Cette disposition est conforme Ă la recommandation du CIO, prise en mars et mise en Ćuvre par plusieurs fĂ©dĂ©rations internationales, dont l'escrime (FIE), pour rĂ©intĂ©grer Russes et BĂ©larusses dans le sport mondial, sous plusieurs conditions dont celle de la banniĂšre neutre.
Cette inflexion est de nature à dissiper la menace d'une absence de l'Ukraine aux JO de Paris, une hypothÚse qui prenait de plus en plus corps avec les absences de sportifs ukrainiens dans plusieurs compétitions qualificatives pour les JO.
- 'Slava UkraĂŻni' -
Mais la route est encore longue comme le montre le déroulé de la journée des Mondiaux d'escrime de Milan: aprÚs sa facile victoire, rythmée par les "Slava Ukraïni" (Gloire à l'Ukraine) descendus des tribunes, Kharlan a refusé de serrer la main de son adversaire. Celle-ci est longuement restée assise sur la piste en signe de protestation, le refus de saluer étant passible d'une disqualification dans les rÚglements de la FIE.
De fait, la FIE a exclu de la compétition l'Ukrainienne de 32 ans, quadruple championne du monde et médaillée de bronze à Londres et Rio (2012 et 2016).
Ce qui a suscitĂ© la colĂšre de MikhaĂŻlo Podoliak, proche conseiller du prĂ©sident Volodymyr Zelensky. Podoliak a tweetĂ© une photo non datĂ©e de Smirnova faisant un V de la victoire en compagnie d'un homme vĂȘtu d'un treillis militaire: "Comme vous pouvez le voir, elle (Smirnova, nldr) admire ouvertement l'armĂ©e russe, qui tue les Ukrainiens et dĂ©truit nos villes."
Mais les Ukrainiens ont reçu le soutien du CIO qui a appelé à faire preuve de "sensibilité" dans le traitement qui est réservé à leurs sportifs.
L'Ukraine n'a officiellement pas pris de décision sur un boycott ou non des Jeux de Paris. "Nous attendons la décision finale et de savoir si (les Russes et Bélarusses) seront autorisés à participer ou non", avait indiqué au Monde mardi le ministre ukrainien des Sports et président du comité national olympique Vadym Gutzeit.
- 'AthlĂšte neutre' -
Le CIO n'a pas inclus Russes et Bélarusses dans l'invitation rituelle aux sportifs du monde entier à prendre part aux Jeux, faite mercredi à Paris. Son président Thomas Bach n'a pas donné de calendrier sur sa décision sur ce point.
De leur cÎté, de nombreux sportifs ukrainiens exprimaient de plus en plus ouvertement leur désir de prendre part aux Jeux. "Je suis vraiment fiÚre de nos joueurs de tennis et je m'imagine à leur place, affronter les gens dont le pays bombarde et tue nos compatriotes", avait livré il y a quelques semaines Olga Kharlan à l'AFP, plaidant pour obtenir l'autorisation d'affronter les Russes.
L'escrime a été le premier sport à rouvrir la porte aux Russes et Bélarusses en mars. Tennis de table, canoë-kayak ou encore aviron lui avaient notamment emboité le pas suivant les recommandations du CIO qui avait préconisé leur retour en mars sous banniÚre neutre et à titre individuel.
En escrime, trente Russes et 51 Bélarusses se sont vus accorder en avril le statut d'"athlÚte individuel neutre" aprÚs examen de leurs dossiers par une société d'e-réputation, puis par un cabinet d'avocats avant l'approbation du comité exécutif de la FIE.
Mais aucun grand nom de la discipline parmi eux: a Ă©tĂ© retoquĂ©e par exemple la championne olympique en titre de sabre individuel et par Ă©quipes Sofia Pozdniakova, par ailleurs fille de Stanislav Pozdniakov, lui-mĂȘme ex-champion de sabre et prĂ©sident du comitĂ© olympique russe (ROC).
AFP


