Pour être soignés en Egypte

Guerre Israël-Hamas: de premiers blessés palestiniens quittent Gaza, des étrangers doivent suivre

  • Publié le 1 novembre 2023 à 16:04
  • Actualisé le 1 novembre 2023 à 16:10

Des dizaines de blessés palestiniens ont quitté mercredi en ambulance la bande de Gaza, soumise aux bombardements incessants de l'armée israélienne, pour être soignés en Egypte, et des centaines de binationaux et d'étrangers doivent suivre, une première dans la guerre entre Israël et le Hamas.

Cette annonce, rare développement positif en 26 jours de guerre, a été faite à l'AFP par un responsable égyptien sous couvert de l'anonymat vers 09H30 GMT. Des télévisions égyptiennes ont diffusé en direct l'entrée de ces véhicules du côté égyptien du terminal de Rafah, unique ouverture sur le monde de la bande de Gaza, où la situation humanitaire est jugée catastrophique pour les 2,4 millions d'habitants qui s'y entassent.

Des soignants et des secouristes égyptiens ont procédé au transfert des blessés palestiniens et les ont auscultés avant de les porter sur des brancards vers les ambulances égyptiennes. Au moins deux enfants étaient visibles dans ces ambulances, dont un portait un large bandage à l'abdomen, ainsi qu'une femme allongée sur un brancard, selon les images TV.

Du côté palestinien de la frontière, un journaliste de l'AFP a vu au moins 40 ambulances, transportant chacune deux blessés, se diriger vers le terminal hautement sécurisé.

Les blessés seront transportés, selon les télévisions égyptiennes, vers un hôpital de campagne à Cheikh Zoueid, à une dizaine de km de Rafah, ainsi qu'à Al-Arich, chef-lieu de la province du Nord-Sinaï et, pour les cas les plus critiques, vers des hôpitaux du Caire.

L'Egypte insiste pour que les près de 90 blessés autorisés à traverser mercredi sortent de Gaza avant les quelque 545 binationaux et étrangers apparemment autorisés à partir.

Une liste avec leurs nom, nationalité et numéro de passeport a été publiée par l'administration de la partie palestinienne du terminal.

Le porte-parole du ministère de la Santé du Hamas, Ashraf al-Qudra, a lui affirmé à l'AFP que ses services avaient soumis à l'Egypte une liste de 4.000 blessés nécessitant des soins ne pouvant être prodigués dans Gaza.

- "Ayez pitié de nous" -

Le territoire palestinien de quelque 360 km2 est soumis depuis le 9 octobre à un "siège complet" qui prive sa population, exsangue, de livraisons d'eau, de nourriture et d'électricité.

Selon le Cogat, l'organe du ministère israélien de la Défense supervisant les activités civiles dans les Territoires palestiniens, 70 camions d'aide humanitaire sont entrés à Gaza mardi. Le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'Onu (Ocha) a évoqué 143 camions entrés entre le 21 octobre et lundi soir, mais il insiste sur la nécessité absolue d'une aide beaucoup plus massive.

Mercredi matin, à l'intérieur du terminal, sur des images de l'AFPTV, on pouvait encore voir des familles transportant leurs affaires personnelles et quelques blessés en fauteuil roulant.

"Nous sommes submergés. Ayez pitié de nous. Nous sommes Egyptiens et on ne peut même pas rejoindre notre pays", a dit Oum Youssef, une binationale encore présente du côté palestinien. "Laissez-nous passer. Nous sommes exténués. On ne peut ni dormir ni manger".

- 11 soldats israéliens tués mardi -

L'accord mis en oeuvre mercredi entre l'Egypte, le Hamas et Israël, et obtenu sous médiation du Qatar en coordination avec les Etats-Unis, selon une source diplomatique, est une rare éclaircie depuis le 7 octobre.

Selon les autorités israéliennes, au moins 1.400 personnes ont été tuées en Israël, en majorité des civils et la plupart le jour de cette attaque d'une ampleur et d'une violence inédites pérpétrée par le Hamas.

Dans la bande de Gaza, dirigée par le mouvement islamiste, près de 8.800 Palestiniens ont été tués depuis le 7 octobre dans les bombardements massifs de l'armée israélienne, selon un nouveau bilan communiqué mercredi à la mi-journée par le Hamas. Des milliers d'autres ont été blessés et les hôpitaux du territoire sont submergés, opérant parfois "à même le sol".

Après une première phase de sa riposte axée sur ces bombardements massifs, Israël, qui veut "anéantir" le Hamas, a aussi entrepris, depuis vendredi, d'envoyer un nombre grandissant de chars et de soldats dans le nord de la bande de Gaza, où des combats féroces au sol l'opposent désormais, au milieu des ruines, aux combattants du Hamas.

Mercredi, l'armée israélienne a annoncé la mort de 11 soldats, la veille, portant à 326 le nombre de ses soldats morts depuis le début de la guerre. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réagi en promettant la "victoire" malgré les "pertes douloureuses".

Lundi et mardi, l'armée israélienne avait affirmé avoir tué "des dizaines" de combattants du Hamas. Le mouvement islamiste palestinien n'a fourni aucun bilan sur ses pertes.

- "Tremblement de terre" -

Dans le territoire palestinien, selon les autorités israéliennes, au moins 240 otages, enlevés lors de l'attaque du 7 octobre, sont toujours aux mains du Hamas, qu'Israël, les Etats-Unis et l'Union européenne considèrent comme une organisation "terroriste".

Alors que leurs proches, en Israël et à l'étranger, vivent dans l'angoisse de leur sort, la branche militaire du Hamas a assuré mardi qu'elle se tenait prête à libérer "un certain nombre d'étrangers dans les prochains jours".

Mercredi, le Hamas a affirmé que sept otages, "dont trois détenteurs de passeport étrangers", avaient été tués la veille dans un bombardement israélien sur le plus grand camp de réfugiés de Gaza, à Jabaliya (nord). Cette affirmation était invérifiable dans l'immédiat de source indépendante.

Selon Israël, ce bombardement a permis d'"éliminer" un haut dirigeant du Hamas, Ibrahim Biari, présenté comme un des responsables de l'attaque du 7 octobre et qui se trouvait dans "un vaste complexe de tunnels souterrains".

Mais il a fait "des dizaines de morts et des centaines de blessés", d'après le ministère de la Santé du Hamas.

Dans une vidéo de l'AFPTV, il a été possible de dénombrer au moins 47 corps drapés de linceuls allongés au sol dans la cour d'un hôpital après avoir été extraits des décombres.

"C'était une scène de tremblement de terre", a rapporté à l'AFP un habitant du camp, Ragheb Aqel, 41 ans.

- RSF saisit la CPI -

Dénonçant un "nouveau massacre", le Qatar, impliqué dans les tentatives de résolution de la crise des otages, a mis en garde contre des opérations susceptibles de "saper les efforts de médiation".

La Bolivie a annoncé rompre ses relations diplomatiques avec Israël, pour dénoncer "son offensive (...) disproportionnée", selon elle. Le Chili et la Colombie ont annoncé rappeler leurs ambassadeurs à Tel-Aviv.

La guerre, qui fait craindre un embrasement régional, a également exacerbé les tensions en Cisjordanie occupée, où au moins 125 Palestiniens ont été tués depuis le 7 octobre par des tirs de soldats ou de colons israéliens, selon le ministère de la Santé de l'Autorité palestinienne.

Les journalistes paient aussi un lourd tribut depuis le 7 octobre. L'ONG Reporters sans frontières (RSF) a annoncé mercredi avoir saisi la Cour pénale internationale (CPI) pour "des crimes de guerre commis contre les journalistes" dans les Territoires palestiniens et en Israël.

Selon le décompte de RSF, 34 journalistes ont été tués depuis le début de la guerre, dont au moins 12 dans l'exercice de leur activité (dix à Gaza, un en Israël et un au Liban).

AFP

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