La Pologne a enfreint la lĂ©gislation europĂ©enne sur la protection des sites naturels en ordonnant des abattages dans la forĂȘt de Bialowieza, l'une des derniĂšres forĂȘts primaires d'Europe, a estimĂ© mardi l'avocat gĂ©nĂ©ral de la Cour de justice de l'UE.
L'avocat général, dont les conclusions ne lient pas la Cour mais sont généralement suivies, considÚre que les coupes ordonnées par Varsovie pour des raisons sanitaires ne sont pas justifiées et sont susceptibles de "détériorer" les sites de reproduction d'espÚces protégées, indique un communiqué.
En juillet 2017, la Commission europĂ©enne avait introduit un recours contre la Pologne car elle craignait pour l'intĂ©gritĂ© de la forĂȘt, classĂ©e site Natura 2000. Bialowieza, forĂȘt millĂ©naire, abrite en effet des habitats naturels pour des espĂšces d'animaux et d'oiseaux dont la protection est jugĂ©e prioritaire.
Depuis le dĂ©but du conflit, le gouvernement polonais soutient que les opĂ©rations ont pour but d'assurer la sĂ©curitĂ© dans la forĂȘt en combattant la prolifĂ©ration d'insectes xylophages et qu'elles correspondent donc Ă une exception acceptĂ©e par la lĂ©gislation europĂ©enne.
Mais pour l'avocat général de la CJUE, Yves Bot, la Pologne "n'a pas mis en oeuvre les mesures nécessaires à la conservation du site", alors que les mesures prises "ont entraßné la perte d'une partie des peuplements forestiers".
Il a aussi constatĂ© la "divergence des avis scientifiques" sur la propagation du bostryche typographe, insecte colĂ©optĂšre ravageur, dans la forĂȘt.
L'avocat général a également mis en doute le fait que la Pologne ait effectué une "évaluation appropriée" avant de lancer les coupes, "au simple examen de la chronologie des décisions litigieuses et de la cohérence des piÚces justificatives produites".
M. Bot estime ainsi que le principe de précaution a été "méconnu".
"Nous allons analyser attentivement l'opinion de l'avocat gĂ©nĂ©ral de la CJUE mais dĂšs maintenant je peux confirmer que la Pologne respectera la dĂ©cision dĂ©finitive du Tribunal concernant la forĂȘt de Bialowieza", a dĂ©clarĂ© Henryk Kowalczyk, le nouveau ministre de l'Environnement dans le gouvernement conservateur polonais, dans un communiquĂ©.
Il a assurĂ© en mĂȘme temps que "toutes les actions prĂ©cĂ©dentes avaient Ă©tĂ© prises dans le souci de prĂ©server (Bialowieza) dans le meilleur Ă©tat possible, pour les gĂ©nĂ©rations actuelles et futures".
En novembre, dans un jugement en référé, la justice européenne avait déjà menacé Varsovie d'une astreinte d'au moins 100.000 euros par jour si elle ne cessait pas "immédiatement" les abattages.
Dans la foulée du jugement, le ministre de l'Environnement polonais de l'époque --débarqué depuis-- avait annoncé le retrait des engins forestiers et la poursuite des "coupes de sécurité" par d'autres moyens.
Conforté par le raisonnement de l'avocat général mardi, une coalition d'ONG écologistes, dont Greenpeace Pologne, WWF Pologne, ClientEarth, Greenmind, a appelé à un retrait de toutes les mesures.
"Nous attendons du ministre de l'Environnement qu'il annule immĂ©diatement les dĂ©cisions permettant d'augmenter l'exploitation et entreprenne les dĂ©marches en vue d'Ă©largir le parc national" au sein de la forĂȘt de Bialowieza, ont-elles dĂ©clarĂ©.
L'avocate Agata Szafraniuk, qui travaille pour l'ONG ClientEarth a confiĂ© Ă l'AFP ne pas ĂȘtre surprise par l'avis de l'avocat gĂ©nĂ©ral.
Le classement de la totalitĂ© de la forĂȘt en tant que site protĂ©gĂ© permettrait d'Ă©viter toute exploitation "pour de bon", a-t-elle ajoutĂ©.
"Rien ne changera le fait que la forĂȘt de Bialowieza a Ă©tĂ© dĂ©vastĂ©e", a toutefois dĂ©plorĂ© chef de Greenpeace Pologne, Robert Cyglicki.
2018 AFP

