Viande transformée

L'Anses confirme un lien entre nitrites et risque de cancer

  • PubliĂ© le 12 juillet 2022 Ă  12:48
  • ActualisĂ© le 26 juillet 2022 Ă  13:40
Les locaux de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), le 7 juillet 2015 à Maison-Alfort (Val-de-Marne)

Les autorités sanitaires françaises confirment "l'existence d'une association entre le risque de cancer colorectal et l'exposition aux nitrates et nitrites", notamment via la viande transformée, dans un avis publié mardi à l'issue de plusieurs mois de travaux.

L'agence nationale de sécurité alimentaire (Anses) affirme que l'analyse des données des publications scientifiques parues sur le sujet "rejoint la classification du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC)".

En 2015, le CIRC de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a classé la viande transformée, notamment la charcuterie, comme cancérogÚne (catégorie 1). Elle favoriserait, entre autres, les cancers colorectaux qui tuent prÚs de 18.000 personnes par an en France. Les nitrites ingérés sont quant à eux considérés comme des cancérogÚnes probables (catégorie 2A).

L'Anses "préconise de réduire l'exposition de la population aux nitrates et nitrites par des mesures volontaristes en limitant l'exposition par voie alimentaire".

Historiquement, les charcutiers recourent aux composants nitrés pour allonger la durée de conservation des produits et prévenir le développement de bactéries pathogÚnes à l'origine notamment du botulisme, une affection neurologique grave largement oubliée du fait des progrÚs sanitaires. Ce sont aussi ces composants qui donnent sa couleur rose au jambon, naturellement gris.

"Bien que la rĂ©duction du taux d'additif soit de nature Ă  accroĂźtre de façon significative le risque microbiologique", et donc le dĂ©veloppement de maladies comme la salmonellose, la listĂ©riose ou le botulisme, l'Anses "considĂšre qu'elle peut ĂȘtre envisagĂ©e moyennant la mise en oeuvre de mesures compensatrices validĂ©es de maĂźtrise de ce risque".

Par exemple en raccourcissant les dates limites de consommation des produits ou en agissant au niveau des étapes de fabrication (mesures de bio-protection dans les élevages et les abattoirs).

- Les extraits végétaux apportent aussi des nitrates et nitrites -

Certains fabricants utilisent des extraits vĂ©gĂ©taux ou des bouillons de lĂ©gumes comme substituts aux additifs nitritĂ©s. Cela ne constitue pas une rĂ©elle alternative dans la mesure oĂč ils contiennent naturellement des nitrates qui, sous l'effet de bactĂ©ries, sont convertis en nitrites. Ces produits dits " sans nitrite ajoutĂ© " contiennent donc des nitrates et des nitrites cachĂ©s.

Cet hiver, des débats musclés avaient opposé d'une part les charcutiers qui défendaient un savoir-faire centenaire dans le respect de la loi et d'autre part des associations de consommateurs et la Ligue contre le cancer, qui plaidaient pour l'interdiction pure et simple des additifs controversés.

En février, l'Assemblée nationale avait voté le principe d'une "trajectoire de baisse" des doses maximales d'additifs nitrés dans la charcuterie. De son cÎté, le gouvernement avait dit vouloir "attendre le retour" de l'Anses avant de prononcer des mesures de mise en oeuvre du texte, et s'était engagé "à suivre l'avis" de l'agence.

L'Anses estime aussi important de mieux dĂ©finir les "doses journaliĂšres admissibles" (DJA) de nitrates et nitrites. Car elle constate un paradoxe: l'existence d'un lien entre consommation de viandes transformĂ©es et risque de cancer, alors mĂȘme que les doses maximales recommandĂ©es (150 grammes de charcuterie par semaine en France) sont respectĂ©es (par 99% de la population).

Les DJA sont "définies séparément pour chacune de ces substances, alors que les mécanismes biochimiques en jeu constituent une suite de transformations vers des composés nitrosés", souligne l'avis.

En clair: les nitrates, présents naturellement dans les sols, peuvent voir leur concentration renforcée par les activités agricoles (engrais, effluents d'élevage). Ils se retrouvent dans les végétaux que l'on consomme et l'eau que l'on boit.

Dans notre bouche, sous l'effet d'enzymes bactériennes, les nitrates ingérés se transforment en nitrites. Et ces derniers, instables, peuvent, quand ils sont présents en excÚs, générer la formation de "composés nitrosés", "connus pour leur caractÚre génotoxique et cancérogÚne".

L'Anses recommande donc de poursuivre les recherches, pour "établir la valeur toxicologique de référence prenant en compte la co-exposition" aux additifs, mais aussi de lancer de nouvelles études épidémiologiques pour améliorer les connaissances sur le lien avec le risque de différents cancers.

En attendant, l'agence française conseille de limiter sa consommation de charcuterie à 150 grammes par semaine et appelle à avoir une alimentation diversifiée, avec au moins cinq portions de fruits et légumes par jour.
 

AFP

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1 Commentaires
Antipode
Antipode
3 ans

lol, l'ANSE qui donne son avis sur un sujet acquis depuis le début du siÚcle dernier ^^ mieux vaut tard que jamais !