Face Ă des bailleurs privĂ©s trĂšs "sĂ©lectifs", des personnes exposĂ©es aux discriminations en raison de leur handicap, leur couleur de peau ou leur situation familiale renoncent Ă faire valoir leurs droits et se tournent vers le logement social, montre une enquĂȘte publiĂ©e jeudi.
PrĂšs d'une personne sur deux (46%) juge les discriminations "frĂ©quentes" ou "trĂšs frĂ©quentes" dans l'accĂšs au logement, selon le 5e volet de l'enquĂȘte "AccĂšs aux droits" du DĂ©fenseur des droits, consacrĂ©e aux discriminations dans le logement locatif privĂ© et social.
Et parmi les personnes ayant cherché un logement à louer dans les cinq années écoulées, 14% déclarent avoir été victime de discrimination, un taux qui bondit à 40% pour les hommes "perçus comme noirs", 30% pour les hommes "perçus comme arabes" et 24% pour les mÚres seules avec des enfants de moins de six ans.
Or parmi celles-ci, seule une sur dix (11%) entreprend des démarches pour faire valoir ses droits, car la "difficulté de la preuve, la complexité des procédures et des délais souvent dissuasifs restent souvent des obstacles insurmontables en l'absence d'un solide accompagnement".
Des avancées ont toutefois eu lieu. à l'image de la reconnaissance du testing (candidatures avec différents profils pour faire apparaßtre d'éventuelles discriminations)comme mode de preuve en matiÚre civile. Ou encore la cotation (qui attribue des points aux candidats en fonction de critÚres établis) dans le logement social, ainsi que l'encadrement, renforcé par la loi Alur, des professionnels de l'immobilier, qui ont désormais un code de déontologie "interdisant expressément les discriminations".
Mais la mise en oeuvre concrÚte de ces avancées reste "à consolider" estime le Défenseur, Jacques Toubon, qui a publié un guide pratique destiné aux bailleurs privés : "Louer sans discriminer".
Car aujourd'hui, certains candidats à la location sont "particuliÚrement exposés à des discriminations au vu de leur situation familiale, d'une origine immigrée, parfois du seul fait de leur couleur de peau, ou de leur situation de handicap".
En butte aux exigences et aux pratiques "particuliĂšrement sĂ©lectives" des bailleurs privĂ©s, ils peuvent, tout comme les personnes en situation de prĂ©caritĂ© financiĂšre, ĂȘtre "contraints Ă limiter leurs recherches au seul parc social, oĂč les dĂ©lais d'accĂšs sont plus longs".
- Précaires, les mÚres seules stigmatisées -
Les familles monoparentales, à 85% des mÚres seules avec enfants, sont en particulier "victimes d'un cumul d'inégalités".
"Plus précarisées financiÚrement que leurs ex-conjoints par la baisse de niveau de vie qu'occasionne la séparation du couple (de 20% contre 3%)", les femmes devenues mÚres isolées sont "surexposées au risque de pauvreté", car plus souvent inactives que les hommes et victimes d'"inégalités professionnelles persistantes (temps partiels, emplois peu qualifiés et mal rémunérés)".
Ainsi le taux de pauvreté est-il trois fois plus élevé (39,6% contre 13,5%) pour les familles monoparentales avec au moins un enfant mineur que pour les familles "traditionnelles".
Cette "prĂ©carisation des mĂšres isolĂ©es contribue Ă leur forte stigmatisation en tant que locataires Ă risques", a rĂ©vĂ©lĂ© l'enquĂȘte. Elles sont ainsi confrontĂ©es Ă des stĂ©rĂ©otypes qui "s'expriment spĂ©cifiquement dans le logement", tant "dans leur rĂŽle de mĂšre et leur capacitĂ© Ă assurer seules l'Ă©ducation de leurs enfants, que dans leur capacitĂ© Ă payer rĂ©guliĂšrement un loyer".
Ces difficultés apparaissent dans un taux de recherches inabouties (29% contre 21% en moyenne) et de discriminations déclarées (24% pour les mÚres d'enfants en bas ùge, contre 14%) particuliÚrement élevés.
"Plus vives dans le parc privĂ©", celles-ci sont aussi prĂ©sentes dans le parc social. Car certaines pratiques des bailleurs sociaux, "visant Ă apprĂ©cier des ressources de maniĂšre restrictive et Ă rechercher la mixitĂ© sociale", peuvent "retarder, voire faire obstacle Ă leur accĂšs au logement social, alors mĂȘme que celui-ci "peut leur Ă©viter de basculer dans la pauvretĂ©".
Par Rodrigo ALMONACID - © 2017 AFP

MĂȘme en ayant un bon boulot c'est compliquĂ©, alors lĂ .