Plus puissants, plus addictifs et surtout très faciles à commander sur internet, les cannabinoïdes de synthèse - ou cannabis 2.0 - ont fait une entrée fracassante sur le marché des drogues. Débarqué il y a deux ans à Mayotte, où il est désormais produit localement, le cannabis de synthèse est toutefois encore loin de supplanter le zamal à La Réunion. Mais la dangerosité de ces nouvelles substances chimiques a de quoi inquiéter.
Elles s’appellent Spice, K2, Aroma, Mr Smiley, Zohai, Eclipse ou encore Blaze ou Black Mama. Ce sont de nouvelles drogues de synthèse, apparues il y a quelques années, ayant trouvé le moyen de contourner la loi. Ces cannabinoïdes synthétiques sont des substances chimiques créées en laboratoire qui reproduisent les effets du THC, le principe actif du cannabis. Sous forme de poudre ou pulvérisées sur des herbes aromatiques, elles peuvent être 100 fois plus puissantes que leur homologue végétal. Et se retrouvent en vente libre sur le net au nez et à la barbe des autorités.
Se présentant comme de l’encens, le Spice est lui interdit à la vente en France depuis 2009. Mais les cannabinoïdes de synthèse profitent du flou juridique existant. Selon un article paru dans le Journal du Dimanche en juillet dernier, seules trois formules sur plusieurs dizaines connues sont ainsi interdites. Et ce alors que de nouvelles formules apparaissent chaque mois sur le marché, souvent vendues comme parfum d'intérieur, herbes à brûler ou sels de bain. Ainsi, selon le JDD, près de 700 sites internet effectuent des livraisons en Europe.
Ces drogues de synthèse sont également devenues monnaie courante à Mayotte, où s’est même développée une filière de production locale, comme le relate France Mayotte Matin, citant le cas de ce dealer qui "s’est mis en tête d’acheter les produits sur le net, en les faisant venir séparément, ce qui n’avait rien d’illégal", alors que leur association le devient. Ce cannabis de synthèse étant plus puissant et plus addictif, le producteur mahorais a vite vu son petit commerce prendre de l’ampleur et faire des émules.
"Du simple tabac ou d’autres herbes à fumer comme l’eucalyptus sont aspergés de THC de synthèse acheté sur internet en toute légalité. Il suffit ensuite de le vendre en dosettes très recherchées puis de mélanger la drogue à du tabac pour un joint explosif et pas cher", indique le quotidien mahorais. Au point que de nombreux incidents ont été relatés en lien avec cette drogue. "Les cas d’hystérie, d’agressivité sont multiples, tout comme les hémiplégies, ces paralysies localisées ou ces comas que certains ont cru éthyliques...", rapporte France Mayotte Matin.
Le phénomène n’a toutefois, semble-t-il, pas encore massivement touché La Réunion. "Nous n’avons pas vraiment constaté d’augmentation à ce sujet", confie ainsi le commissaire Martinez, chef de la Sûreté départementale. "Je ne dis pas qu’il n’y en a pas, mais les volumes ne sont pas très parlants. D’une manière générale, nous n’avons pas beaucoup de lisibilité sur ces nouvelles drogues", ajoute-t-il.
Ce dernier n’est d’ailleurs pas certain que ces produits chimiques fassent un jour recette sur l’île. "Je ne suis pas sûr que l’on soit vraiment impacté à La Réunion, où le Rivotril, l’Artane et le zamal sont déjà accessibles et peu coûteux", souligne-t-il.
Des propos confirmés du côté de l’ANPAA (Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie), à Saint-Denis, où l’on n’a pas encore relevé de problèmes liés à ce cannabis 2.0. "On a eu affaire à d’autres molécules, comme la MDMA, mais pas au cannabis de synthèse. La consommation de cannabis à quelque chose d’un peu traditionnel à La Réunion, où le produit naturel est valorisé", note l’association.
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