Quand la chute de l'ambitieux Jean-François Copé éclabousse l'ex-candidat Sarkozy, l'UMP serre les rangs et se dote d'un triumvirat inédit. Rebondissements dans une guerre de succession qui n'a jamais cessé depuis l'échec de mai 2012. Les "barons" prennent le pouvoir avec Alain Juppé, Jean-Pierre Raffarin, François Fillon, et les magistrats s'apprêtent à jouer les arbitres. Pendant ce temps, Jean-Luc Mélenchon pleure la victoire du FN à la télévision, et Jérôme Lavrilleux, bras droit de Copé, sanglote, en direct lui aussi, sur toutes les chaînes d'info continue, d'inutiles aveux de circonstances, et la fin d'une carrière politique.
Le président de l'UMP, Jean-François Copé, vient d'annoncer sa démission qui prendra effet à compter du 15 juin. Le bureau politique du parti, et ses 30 membres représentatifs des diverses mouvances de l'UMP, avec des personnalités telles que Xavier Bertrand, Nathalie Kosciusko-Morizet, Bruno Le Maire, Valérie Pécresse et François Baroin, a dans la foulée annoncée sa prochaine dissolution, la tenue d'un congrès extraordinaire pour l'automne et un intérim de la présidence fondé sur le triumvirat Alain Juppé, Jean-Pierre Raffarin, François Fillon.
Avec la démission de Jean-François Copé, sur fond d'échec électoral redoublé d'affaires judiciaires, c'est à la chute d'un ambitieux que l'on assiste. Copé victime de l'effet Pygmalion, c'est aussi quelque part une manifestation de ce que les anciens Grecs nommaient le juste retour des choses… A trop vouloir réaliser sa prophétie auto-réalisatrice, forcer son destin, dominer son parti, le brillant Jean-François Copé a cédé à  l'hubris (Ndlr : la démesure, l'orgueil chez les anciens Grecs), et s'est en conséquence attiré de gros ennuis. Que la sanction tombe du ciel via l'affaire dite "Bygmalion", une forme commerciale et superlative de Pygmalion, n'en est que plus ironique !
Bastien Millot, de tous les bons coups de la carrière de "Jeff"
La trajectoire du présidentiable Copé a débuté parallèlement à celle de Nicolas Sarkozy. Dès l'élection de ce dernier à la présidence de la République, Jean-François Copé a décidé de se mettre sur les rangs des futurs locataires de l'Elysée. Elu président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, il use de cette position stratégique pour s'imposer comme l'homme fort de l'Union face au président, quitte à user de méthodes jugées irritantes par l'Elysée. Une stratégie qui s'avère payante, puisque l'ambitieux se trouve début novembre 2010, en situation d'exiger le contrôle du parti auprès de Nicolas Sarkozy, aux dépens d'un Xavier Bertrand plus rusé et légaliste.
Jean-François Copé refusera le ministère de l'Intérieur que lui propose Nicolas Sarkozy pour prendre la maison UMP. Le 17 novembre il démissionne de sa présidence de groupe, revêt par le fait du Prince la responsabilité de secrétaire général du parti, tout en restant député, et réussit à imposer en lieu et place de son auguste personne, son missus dominicus, Christian Jacob. Ce faisant il contrôle tout à la fois le groupe parlementaire UMP, le parti éponyme et un parti dans le parti, avec Génération France, où les élus UMP adhèrent parfois sans le savoir ; à l'instar de l'actuel maire de Reims, Arnaud Robinet, proche de Xavier Bertrand, qui avait appris par la presse qui citait Jean-François Copé, avoir adhéré à Génération France, quand il n'en était rien.
Vinrent les moments clé de la campagne présidentielle et de l'élection. Copé à la manœuvre, ses amis aux affaires, dont le fidèle Bastien Millot, qui fut de tous les bons coups de la carrière de "Jeff" comme le nomment ses amis, et ennemis : directeur de cabinet et de communication du maire de Meaux, assistant parlementaire, directeur du cabinet du secrétaire d'État en charge des Relations avec le Parlement (gouvernement Raffarin), chef de cabinet et conseiller auprès du ministre délégué à l'Intérieur, directeur-adjoint de cabinet au ministère délégué du Budget et de la réforme de l'État…
Favoritisme entre France Télévision et Bygmalion
Une belle carrière d'homme de l'ombre, écornée par une condamnation pour détournement de fonds publics, complicité de faux et usage de faux en 2004, alors qu'il était premier adjoint de la mairie de Beauvais. Bastien Millot sera par la suite propulsé dans l'aristocratie audiovisuelle, au sein du groupe France Télévisions, où il exercera de très hautes responsabilités. Il ne quittera la sinécure France Télévision en 2008 que pour créer Bygmalion, agence de conseil et de communication, tout en demeurant élu UMP en région Picardie.
On connaît la suite, l'échec de Sarkozy, la ruine de l'UMP provoquée par le refus des comptes de campagne du candidat à la présidentielle, la révélation de soupçons de mouvements de fonds privilégiés et de favoritisme entre France Télévision et Bygmalion, le scandale toujours pendant des surfacturations de la même Bygmalion à l'endroit de l'UMP, voire de facturations de prestations fictives…
La haine Fillon/Copé
Mais avant ce déchaînement d'affaires à tiroir, qui mêlent quête du pouvoir, millions d'euros, escroqueries et règlements de comptes partisans, Jean-François Copé avait forcé son destin au-delà du raisonnable, le 18 novembre 2012, vers 23 heures, en s'imposant à toute force comme président auto-proclamé de l'UMP. Un genre de pronunciamiento mou, qui a vu Jean-François Copé annoncer les résultats des primaires de l'UMP, sans même attendre leur communication officielle par une commission ad hoc au sigle ridicule : la COCOE ; et que dire de l'impartialité de la non moins ridicule Commission nationale des recours, CONARE, tenue par un féal de ce même Copé ?
Dans sa hâte à se couronner et pour forcer la décision, Jean-François Copé avait éludé les résultats des fédérations de Nouvelle-Calédonie, Wallis & Futuna et Mayotte. Il s'en suivit une crise aigüe, qui suscita en sus de la haine Fillon/Copé, la scission éphémère du groupe UMP à l'Assemblée nationale, et l'affaiblissement durable de la crédibilité de l'UMP dans l'opinion.
L'échec de l'UMP aux récentes européennes, battu par le FN, n'est que la dernière touche apportée au tableau de cette dégringolade. Pour mémoire, en 2009, l'UMP de Xavier Bertrand avait remporté ces élections  avec 27,88 % des suffrages et 4,7 millions de voix.
Reste que la chute de l'ambitieux Jean-François Copé, en dépit du sacrifice larmoyant de son fusible Jérôme Lavrilleux, éclabousse Nicolas Sarkozy. Pour se défendre, Bygmalion accuse l'UMP de lui avoir facturé nombre de prestations qui découlaient de la campagne présidentielle…
Philippe Le Claire pour www.ipreunion.com

COPĂ© ne vaut pas mieux que FILLON
FILLON ne vaut pas mieux que COPĂ©
2 loosers de la politique française