Economie

Défiscalisation et Outre-Mer : la porte étroite

  • Publié le 10 avril 2013 à 10:30
Défiscalisation

Victorin Lurel, ministre des outre-mers, consulte actuellement, à Paris, les principaux élus ultramarins sur des sujets aussi consensuels que l'octroi de mer, la défiscalisation et l'acte III de la décentralisation. Sur les deux premiers thèmes il est question de finances, les représentants des collectivités territoriales sont donc pour le moins prudents et circonspects, la nécessité de faire des économies se combinant difficilement au gel des dotations d'Etat, imposé depuis 2010, et reconduit par le gouvernement Ayrault... Il est peu probable que de grandes annonces ponctuent les consultations parisiennes de M. Lurel, qui sera de retour à La Réunion très prochainement...

Si l'on en croit Victorin Lurel, et même François Hollande, la défiscalisation des investissements en Outre-mer serait un "choix politique", doublé d'une nécessité, en aucun cas un "privilège" ou "une manne indue" (sic). Reste que les dispositifs relatifs à ces avantages fiscaux, même rabotés et plafonnés, se sont trouvés consécutivement dans le collimateur de la Cour des comptes, du Conseil constitutionnel et plus récemment du rapport Berger-Lefebvre sur "l'épargne longue", quand bien même les travaux de ces deux députés s'avèrent plus conciliants que ne l'ont été les magistrats du Palais Cambon… En effet, la Cour des comptes, présidée par l'excellent Monsieur Migaud, qui a toujours été très critique à l'endroit de la défiscalisation, en estimait l’efficacité "incertaine", le résultat "inéquitable", recommandant de mettre un terme définitif au système initié du temps de François Mitterrand. La loi de Finances 2013 a été sévèrement censurée par le Conseil constitutionnel en décembre dernier, le plafonnement de l'avantage fiscal ayant été fixé à 18 000 euros en matière d'investissement, excluant la part variable de 4% initialement prévue au dispositif. Le rapport des députés Berger et Lefebvre prône la métamorphose des niches ultramarines de défiscalisation en crédit d'impôt au entreprises ; ce qui reviendrait en somme à supprimer les actuels dispositifs de soutien à l'investissement productif et locatif, jugés par trop dispendieux… Le président de la République avait déploré la sanction du Conseil constitutionnel appliquée à la loi de Finance 2013, qu'il s'était engagé à contourner via le redéploiement de montants équivalents à ceux prévus par la loi censurée, soit un peu plus de 200 millions d'euros, sous la forme de subventions directes… 

Début mars, le ministre Lurel, qui défendait son budget et ses dotations, plaidait pour le maintien des avantages de la défiscalisation, rappelant que le système avait été jusqu'à induire de 2 à 4,8 milliards d’investissements… C'est à cette date qu'il avait pris l'engagement de consulter les élus d'Outre-mer pour envisager avec eux les alternatives à ce dispositif, entre autres financements… C'est ce qui se passe depuis deux jours à Paris. La première rencontre n'a pas produit de grand résultat, et il n'a été question que d'un point d'étape dans la réflexion sur une refonte du système d'aide aux économies ultramarines. L'alternative envisagée s'agissant de la défiscalisation se présente sous un jour relativement simpliste, avec soit la prorogation du système "raboté" existant, moyennant quelques aménagements symboliques, soit sa liquidation au profit d'une subvention directe du logement social par l'Etat, quand le secteur privé bénéficierait d'un crédit d'impôt compétitivité…
 
Mais l'urgence en matière de finances porte plus sur le devenir de l'octroi de mer, de sa requalification pour éviter la fin d'un régime fiscal d'importance, rapportant plus d'un milliards d'euros par an aux "quatre vieilles", bien que dérogatoire et mal jugé par Bruxelles, quand la défiscalisation ne connaît d'autre impératif que la présentation d'un rapport, devant le parlement, dans le courant du mois de mai… Tant en matière de défiscalisation que d'octroi de mer, les élus ultramarins, conscients des économies que l'on voudrait leur faire endosser ont tendance à se montrer très conservateurs.
 
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