Un "entretien annuel d'évaluation" très particulier...

Quand une entreprise réunionnaise s'intéresse à la vie sexuelle de ses employés

  • Publié le 6 août 2014 à 05:00
clavier informatique

C'est un "entretien annuel d'évaluation" très particulier auquel ont été soumis les employés d'une entreprise basée dans l'Ouest de La Réunion. Au milieu de questions sur leurs conditions de travail en ont été glissées d'autres beaucoup plus intimes portant sur le mode de vie des salariés, leur vie conjugale voire même leur vie sexuelle. Une intrusion dans la vie privée inédite qui suscite de nombreuses interrogations et l'indignation de responsables syndicaux. "On touche à la liberté individuelle, c'est une dérive vers l'esclavage moderne !", estime Clara Derfla, secrétaire générale adjointe de l'Union régionale. Quant à Joël Dalleau, secrétaire général de la CFDT commerces et services, il est "outré que de telles questions puissent être posées à des salariés dans un cadre professionnel" et considère que "ça frise une condamnation au niveau pénal".

Fumez-vous plus de dix cigarettes par jour ? En rentrant chez vous, prenez-vous un verre pour vous détendre ? Prenez-vous des somnifères ? Prenez-vous des tranquillisants ? Êtes-vous satisfait de votre vie affective ? Votre vie conjugale est-elle source de contrariétés, d’agression, de frustration ? Votre vie sexuelle ne vous donne-t-elle pas entière satisfaction ? Votre appétit sexuel a-t-il diminué ?

Voilà un petit florilège des questions très personnelles contenues parmi les 60 qui ont été posées aux salariés de cette entreprise réunionnaise dans le cadre d’un "entretien annuel d’évaluation". Des questions sortant largement du cadre professionnel pour déborder pleinement dans le domaine de la vie privée, une pratique pour le moins inhabituelle.

De la subordination à la soumission

"C’est choquant !", s’indigne Clara Derfla. "On touche vraiment à la liberté individuelle du salarié. Se permettre de poser ce genre de questions sur la privée, c’est grave ! Ça revient à dire que le salarié appartient au patron qui se croit tout permis", estime la secrétaire générale adjointe de l’Union régionale. Elle va même plus loin : "On arrive à cette dérive où le lien de subordination devient un lien de soumission, et là on est vraiment dans l’esclavage moderne."

L’effarement est du même ordre du côté de Joël Dalleau, qui juge cette intrusion dans la vie privée "inadmissible". "Le questionnaire aborde un certain nombre de points vraiment personnels, je me demande si la direction a pris les devants en informant la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés, ndlr), puisque ce sont des renseignements qu’elle aura à recenser ou à informatiser concernant la vie privée de son personnel et je me demande si tout a été fait dans les règles", souligne le secrétaire général de la CFDT commerces et services.

L’un comme l’autre, les deux responsables syndicaux s’interrogent sur l’objectif recherché par la direction par le biais de ces questions intrusives. "J’aimerais bien connaître le but de ces questions, car je n’en vois pas l’intérêt...", confie Clara Derfla, qui a bien une petite idée : "Quand on regarde ce questionnaire, on l’impression que le but est d’asservir encore plus le salarié en connaissant tout de sa vie privée et pouvoir encore plus le soumettre."

"En quoi la vie amoureuse ou sexuelle d’un salarié va affecter sa productivité ou le fonctionnement de l’entreprise ? Je ne vois pas... si ce n’est avoir des informations personnelles sur les salariés qui pourraient éventuellement être utilisées dans de mauvaises conditions. Je m’interroge car je n’arrive pas à comprendre", abonde Joël Dalleau.

"C’est dangereux et ça risque de déraper"

Tout porte à croire que l’employeur a cherché à connaître les comportements sociaux des employés voire à en dresser un portrait psychologique, comme en témoignent d’autres questions étonnantes : Est-ce que vous vous déplacez, marchez et mangez rapidement ? Vous impatientez-vous, si en voiture, vous êtes assis à côté d’un conducteur trop lent ? Pensez-vous que c’est une perte de temps de rechercher le sens des mots inconnus dans le dictionnaire ?

Quoi qu’il en soit, il s’agit là d’une première, de mémoire de syndicaliste. "Depuis que je suis à la CFDT, c’est la première fois que je vois ce genre de questionnaire qui aborde avec tant de précision la vie privée des salariés. Je ne sais pas dans quel but c’est fait, mais c’est dangereux et ça risque de déraper", confie Joël Dalleau. "Si demain d’autres entreprises font la même démarche, les salariés concernés doivent se rapprocher des services compétents pour alerter sur ce genre d’enquête. C’est vraiment du n’importe quoi, ça frise même une condamnation au niveau pénal", ajoute-t-il.

"J’invite ces salariés à porter l’affaire devant le tribunal. Chacun a le droit au respect de sa vie privée et ce patron-là ne respecte pas la loi ! Il faut le condamner à des dommages et intérêts. Il faut arrêter ça, car demain ce sera quoi ? Trop c’est trop !", s’emporte également Clara Derfla.

Les salariés de l’entreprise ont, eux, déjà répondu à ce questionnaire qui leur était imposé lors de cet "entretien annuel d’évaluation". Et c’est désormais à leur tour de se poser de nombreuses questions...

www.ipreunion.com

guest
10 Commentaires
T42
T42
11 ans

Il est loisible de ne pas répondre à ce genre de questionnaire. Quand c'est un questionnaire écrit, on ne répond pas tout simplement. Quand c'est une question orale (ça m'est arrivé) je réponds toujours par une question du genre :
1) Ne pensez-vous pas que ce sujet est du domaine de ma vie privée ? Et après je laisse un gros blanc jusqu'à ce que la personne réponde.
2) Pourquoi me demandez-vous cela ? Un gros blanc encore.
3) A quel titre vous intéressez-vous à ma vie privée ? Un gros blanc encore.

Il arrive parfois que je sois de mauvaise humeur (si, si...) alors direct je salue mon interlocuteur par une phrase du genre : "Notre entretien est maintenant terminé. Je ne vous salue pas, ce ne serait pas de bon coeur."

james97, depuis son mobile
james97, depuis son mobile
11 ans

SVP tenais nous au courant car si la societe en question a raison ce serait un drame pour la liberte et la vie prive courage au employes concernes a vous lire merci

totor
totor
11 ans

Moi j'ai vu ...on m'a rapporté ... un copain m'a dit ..... selon des sources .....
C'est trop vague et suit les tendances d'une certaine radio polémiste commençant par Free !
Des noms ? une localisation ? un témoignage non pas d'un syndicaliste mais d'un employé ou d'un dirigeant ... et votre article sera digne de ce nom ??

danyboy
danyboy
11 ans

J'en pense qu'il est désolant que les salariés (tous???) aient répondus jusqu'au bout à ces questions et n'aient pas eu le bon sens à un moment de dire STOP vous dépassez les bornes, je veux l'avis de mon responsable syndical avant de poursuivre !
Il serait intéressant de savoir quelle officine à fourni cette démarche au DRH de l'entreprise ( ça vient de France ou d'ailleurs ?) et accessoirement si ce DRH avait bien pris connaissance des questions qu'il contenait.
Enfin je pense qu'un responsable syndical devrait garder son sang froid et ne pas abuser des références à l'esclavage : il a pour rôle de défendre les salariés selon le droit du travail ... d'aujourd'hui !

carole97419, depuis son mobile
carole97419, depuis son mobile
11 ans

Scandaleux inadmissible de quelle societe s agit il il faut que le syndicat de cette societe aille en justice pour atteinte a la vie prive et d informer les leurs collegues afin qu ils fassent pression aupres de leurs direction pour boycotter cette societe

neo
neo
11 ans

Il semble que vous connaissez cette entreprise et son dirigeant! vous êtes un syndicaliste!!! et vous ne bougez pas?? a quoi sert votre post? non seulement il ne respecte pas la loi comme vous dites, mais c'est un malade ! ces employés ont-ils si peur de lui qu'ils répondent à ce genre de question sans piper mot?? ces questions sont perverses et il faut être pervers pour les poser et exiger une réponse. Ce dirigeant est un malade n'attendez pas qu'un incident arrive pour agir monsieur le syndicaliste.

Raoul , depuis son mobile
Raoul , depuis son mobile
11 ans

Pourquoi donner le nom de l'entreprise ? Je trouve juste de ne pas cibler cette societe mais si cette pratique existe dans d'autres societe il faut que les employees les denonces

Geraldine
Geraldine
11 ans

C'est bien de mettre au jour ces pratiques scandaleuses, surtout qu'elles sont appliquées dans plusieurs entreprises

T42
T42
11 ans

Vous relatez des faits ayant eu lieu dans une entreprise.
Donnez-nous donc le nom de cette entreprise.
Allez interroger les dirigeants de cette entreprise.
Sinon je vais croire que vous racontez juste une belle histoire pour meubler les vacances.

raja
raja
11 ans

Donnez le nom de l'entreprise et après on verra.