Prévention du risque requin

Les pistes possibles pour éviter de nouveaux accidents

  • PubliĂ© le 21 septembre 2011 Ă  09:00
Mardi 20 Septembre 2011

Recherche du corps  de l'ancien champion de bodyboard Mathieu Schiller

Une quarantaine d'attaques de requins, dont vingt mortelles, ont Ă©tĂ© recensĂ©es Ă  La RĂ©union depuis 1972. C'est environ une par an et plus d'une sur deux est fatale. Pour rĂ©pondre Ă  cet enjeu, des pays comme l'Afrique du Sud, l'Australie ou encore les Seychelles ont dĂ©jĂ  tentĂ© d'apporter des Ă©lĂ©ments de rĂ©ponse. Drumline, filets, shark shield, pĂȘche... A La RĂ©union, on rĂ©flĂ©chit encore aux avantages et inconvĂ©nients de chacune. Revue de dĂ©tail.

* Shark shield : Ce bracelet à porter à son pied envoie des ondes électriques dans un rayon de 8 mÚtres sensées faire fuir les requins. TrÚs utilisé en Australie, ce systÚme brouille les sens des requins qui préférerait se tenir éloigné. Son inconvénient? Son prix : plus de 500 euros. La mairie de Saint-Leu a annoncé au mois d'août avoir le projet d'équiper les surfeurs du club de la ville de ces dispositifs dont l'efficacité semble prouvée. Mais, il présente un autre inconvénient : en faisant fuir les squales loin de ceux qui portent un shark shield, il les oriente vers ceux qui n'en ont pas.

* Filets : utilisés en Australie et en Afrique du Sud, les filets anti-requin ont montré leur efficacité. Déployés autour de la ville de Durban, dans l'est de l'Afrique du Sud, ils ont permis de passer d'une dizaine d'attaques annuelle, à zéro dans la zone protégée. A la fin des années 50, 5 personnes perdirent la vie en quelques mois, tuées par des requins. La décision d'installer des filets anti-requins autour des plages de la ville fut alors prise pour sauver l'industrie touristique de la région. Mais avec cette solution, sauver le tourisme implique de sacrifier la faune sauvage. Dans les filets se prennent aussi des tortues, des dauphins, des oiseaux et des requins inoffensifs. Aujourd'hui, de nombreuses associations écologiques militent pour leur retrait.

* Les drumline : Ces sortes d'ancres auxquelles sont reliĂ©es des grosses bouĂ©es permettent de capturer les requins grĂące Ă  un hameçon et de les garder vivants jusqu'Ă  leur capture. Les requins rĂ©cupĂ©rĂ©s sont marquĂ©s et peuvent ĂȘtre suivis dans le cadre de programme scientifiques. Cette technique utilisĂ©e en Afrique du Sud et en Australie est la plus consensuelle : elle ne dĂ©truit pas la faune marine comme les filets et protĂšge efficacement les plages. Lorsqu'un requin a Ă©tĂ© attrapĂ©, en gĂ©nĂ©ral, il ne revient pas au mĂȘme endroit. Les drum line empĂȘchent ainsi la sĂ©dentarisation de requins cĂŽtiers dans une zone balnĂ©aire. Cette solution avait Ă©tĂ© envisagĂ©e par la mairie de Saint-Pierre il y a quelques annĂ©es, suite Ă  plusieurs attaques successives qui avaient eu lieu sur le spot de surf du Pic du Diable. Elle n'avait finalement jamais Ă©tĂ© mise en oeuvre.

* La pĂȘche : cette solution radicale a Ă©tĂ© adoptĂ©e par les Seychelles suite Ă  deux attaques mortelles sur une mĂȘme plage d'un Ăźlot paradisiaque il y a un mois. Une quarantaine de squales a Ă©tĂ© tuĂ©e au dĂ©but du mois de septembre en espĂ©rant trouver l'animal qui avait agressĂ© les touristes. Peu de temps aprĂšs l'opĂ©ration, un spĂ©cialiste sud-africain des requins avait indiquĂ© que les requins tuĂ©s Ă©taient pour la plupart, inoffensifs. Cette solution plutĂŽt dĂ©criĂ©e ressemble pourtant Ă  celle envisagĂ©e par le prĂ©fet, Michel Lalande. Il a annoncĂ© lundi 19 septembre avoir demandĂ© au directeur de la DEAL (direction de l'environnement de l'amĂ©nagement et du logement) de faire, d'ici jeudi, des propositions sur les " conditions de prĂ©lĂšvement de requins appartenant aux espĂšces dangereuses et non protĂ©gĂ©es (requin tigre, bouledogue et mako)". Selon lui, "Ce n'est pas une chasse au requin. Ce sont des prĂ©lĂšvements dont j'Ă©tablirai les conditions. Je m'appuierai sur des expertises professionnelles et dans le cadre lĂ©gal".

* La science : Les connaissances scientifiques concernant les requins autour de la RĂ©union sont proches de zĂ©ro. Un projet proposĂ© par une Ă©quipe de l'IRD sur les requins cĂŽtiers a Ă©tĂ© retoquĂ© Ă  deux reprises, en 2007 et 2008, et n'a pas obtenu les financements nĂ©cessaires (voir ITV). Il faut remonter aux annĂ©es 90 pour trouver une Ă©tude sur les attaques. GĂ©ry Vangrevelinghe, mĂ©decin de formation et passionnĂ© de requins, avait rĂ©digĂ© une thĂšse sur les attaques de squales sous l'angle de l'accidentologie. Il avait, entre autres, rĂ©vĂ©lĂ© la prĂ©sence sur les cĂŽtes rĂ©unionnaises du requin bouledogue, accusĂ© aujourd'hui d'ĂȘtre Ă  l'origine de plusieurs attaques. " Si on avait pu Ă©viter ces prĂ©lĂšvements, je pense que cela aurait Ă©tĂ© mieux. Mais je comprends les pressions qui pĂšsent sur le prĂ©fet et les Ă©lus. Je supposee que ce sera une rĂ©ponse trĂšs ponctuelle Ă  cette suite malheureuse d'accidents ", indique Gery Vangrevelinghe, qui milite depuis longtemps pour la tenue d'Ă©tudes approfondies visant Ă  mieux connaĂźtre les populations et les comportements des requins autour de l'Ăźle. Selon lui, " il ne faudrait pas commettre l'erreur de mettre en place des solutions pĂ©rennes sans en savoir plus sur les populations de requins ", indique-t-il.
Des études sont d'autant plus nécessaires qu'en leur absence, les hypothÚses vont bon train. AprÚs la présence de tortues lùchées en masse dans les années 80, un effet " réserve marine " est maintenant évoqué. Les défenseurs de la réserve arguent que la mise en place de la réserve en 2007 est encore trop récente pour avoir un quelconque effet.

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