L'arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral a Ă©tĂ© suspendu

Tribunal administratif : coup de frein sur la pĂȘche aux requins

  • PubliĂ© le 29 mars 2022 Ă  05:19
  • ActualisĂ© le 29 mars 2022 Ă  15:25
requins

L'arrĂȘtĂ© visant Ă  autoriser la pĂȘche aux requins de 2022 Ă  2024 pris par le prĂ©fet de La RĂ©union le 28 dĂ©cembre 2021 est suspendu, suite Ă  une ordonnance du juge des rĂ©fĂ©rĂ©s du tribunal administratif de La RĂ©union rendue ce lundi 28 mars 2022. L'instance judiciaire avait Ă©tĂ© saisie le 22 fĂ©vrier par plusieurs associations, Sea Shepherd France, One Voice, Longitude 181 Nature, Vie OcĂ©ane et le Taille-Vent. Ces derniĂšres demandaient la suspension de l'arrĂȘtĂ©. Le juge leur a donnĂ© raison, invoquant un " doute sĂ©rieux quant Ă  la lĂ©galitĂ© de l'arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral du 28 dĂ©cembre 2021 ". Cette suspension vient mettre un nouveau coup de frein sur la pĂȘche aux requins sur les cĂŽtes rĂ©unionnaises.

Dans l’arrĂȘtĂ© en question,  le prĂ©fet de La RĂ©union avait autorisĂ© pour deux ans (de 2022 Ă  2024) le prĂ©lĂšvement de requins dans un rayon d’un mille nautique, soit  1852 mĂštres, " autour du lieu oĂč s’est produit chaque observation ". Cet arrĂȘtĂ© autorisait par ailleurs la pĂȘche de deux espĂšces de requin, Ă  savoir le requin bouledogue et le requin tigre. " Les prises accessoires et les espĂšces vivantes de requins autres que celles visĂ©es sont systĂ©matiquement relĂąchĂ©es ", assurait la prĂ©fecture.

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C’est cet arrĂȘtĂ© qui a donc Ă©tĂ© attaquĂ© par un collectif d’associations en demandant sa suspension en rĂ©fĂ©rĂ©. Pour ce faire, ils justifiaient de l’urgence en arguant que " la rĂ©itĂ©ration de ce dispositif de prĂ©lĂšvement de requins cause un prĂ©judice irrĂ©versible Ă  l’environnement, notamment au regard des intĂ©rĂȘts et objectifs de la RĂ©serve marine, et des atteintes Ă  des espĂšces vulnĂ©rables et protĂ©gĂ©es ".

Le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s a reconnu le caractĂšre d’urgence, reconnaissant que les requins bouledogues et les requins tigres sont des espĂšces " respectivement inscrites sur la liste rouge de l’UICN comme " vulnĂ©rables " et " quasi-menacĂ©es " et que leur prĂ©lĂšvement " affecte directement la zone de protection renforcĂ©e de la RĂ©serve naturelle nationale marine de La RĂ©union ainsi que les objectifs environnementaux inhĂ©rents au classement en rĂ©serve naturelle ".

Les demandeurs Ă©voquaient aussi des vices de procĂ©dures, la prise de cet arrĂȘtĂ© " n’ayant Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ© ni de consultation du public [
) dĂšs lors que la note de prĂ©sentation au public prĂ©sente un caractĂšre insuffisant, ni d’une consultation du comitĂ© consultatif et du conseil scientifique de la RĂ©serve marine ". Ils arguaient aussi que la mesure " n’apparaĂźt pas pertinente en vue de la diminution du risque d’attaques ", constituant une " erreur manifeste d’apprĂ©ciation ".

Sur ce point, le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s note que, si une consultation du public a bien eu lieu, elle n’a donnĂ© lieu Ă  " aucune synthĂšse qualitative des 751 avis et observations du public ". Il note Ă©galement l’absence de motivation " pour Ă©carter ces observations pourtant dĂ©favorables Ă  prĂšs de 90%.

La note de prĂ©sentation de l’arrĂȘtĂ© est aussi pointĂ©e du doigt, ne justifiant pas suffisamment de " l’utilitĂ© de cette mesure pourtant trĂšs controversĂ©e Ă  raison notamment des risques de prises accessoires et d’atteinte aux objectifs de la rĂ©serve marine ".

Le juge constate par ailleurs que, selon un bilan communiquĂ© par la prĂ©fecture,  de 2019 Ă  2021, " 942 jours de pĂȘches ont Ă©tĂ© comptabilisĂ©s occasionnant 515 prises dites accessoires et le prĂ©lĂšvement de 53 requins bouledogues et de 281 requins tigre, alors mĂȘme que cette espĂšce inscrite sur la liste rouge de l’UICN comme " quasi menacĂ©e " n’a Ă©tĂ©, selon les donnĂ©es de la prĂ©fecture, impliquĂ©e que dans une seule attaque et sans que la dĂ©fense ait Ă©tĂ© en mesure de prĂ©ciser les lieux ou circonstances de ces pĂȘches et prises ".

" Dans ces conditions, les moyens tirĂ©s de ce que l’arrĂȘtĂ© a Ă©tĂ© pris Ă  l’issue d’une procĂ©dure irrĂ©guliĂšre faute d’une information suffisante et pertinente du public et, qu’il est entachĂ© d’une erreur manifeste d’apprĂ©ciation eu Ă©gard Ă  son impact sur l’environnement et les objectifs de la rĂ©serve marine, au regard des objectifs poursuivis et de l’utilitĂ© du dispositif mis en Ɠuvre, sont de nature Ă  crĂ©er un doute sĂ©rieux quant Ă  la lĂ©galitĂ© de l’arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral du 28 dĂ©cembre 2021 ", conclut le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s.

Pour Didier Derand, reprĂ©sentant du collectif d’associations qui est Ă  l’origine de la saisine, c’est " une petite victoire, certes, mais qui je l’espĂšre en appellera d’autres bien plus grandes pour les requins et pour notre patrimoine marin ".

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