La réglementation reste à trouver

Intelligence artificielle : la crainte d'une (grande) dérive

  • Publié le 29 décembre 2023 à 05:47
  • Actualisé le 29 décembre 2023 à 09:23
intelligence artificielle ia

L'intelligence artificielle se développe à grande vitesse partout sur la planète y compris à La Réunion. Mais face à cette croissance, les avis sont partagés. Si certains considèrent cette technologie comme une grande révolution de notre monde, d'autres alertent sur l'urgence de mettre en place une réglementation spécifique pour éviter les dérives (Photo www.imazpress.com)

Depuis plusieurs mois, l'intelligence artificielle est partout et fait parler d'elle notamment avec l'arrivée de ChatGPT. Pour rappel, cette technologie cherche à imiter l’intelligence humaine par le biais d’algorithmes de calcul.

Sa création permet aux ordinateurs de réaliser des opérations et de penser comme un être humain ce qui peut vite faire écho à des films de sciences fictions qui ne se terminent pas toujours bien. Alors doit-on s'en méfier ?

Laurent Medea est à l'initiative du Futura Network, une manifestation organisée depuis deux ans à La Réunion, qui participe à "l’éveil des consciences" concernant l’importance des innovations technologiques dans le monde et particulièrement sur notre île. Il fait partie de ceux qui plaident en faveur du développement de l'IA.

"Un train passe et si La Réunion ne rentre pas dans le dernier wagon, elle restera encore à courir après les autres" affirme-t-il.

En novembre, Futura Network s'est d'ailleurs déroulé en parallèle de la toute première édition du salon Futura, dédiée au numérique et à l'intelligence artificielle au parc des expositions de Saint-Denis. Un salon qui mettait sur le devant de la scène Glados, un robot à intelligence artificielle. L’un des premiers du genre entièrement conçu à La Réunion.

Lire aussi - Glados, premier robot intelligent made in La Réunion

Son créateur, Yannick Picard, voit lui aussi ces avancées technologiques comme une bonne chose notamment pour les jeunes et l'emploi. "Ceux qui étudieront dans ce domaine trouveront du boulot. Ce sont des métiers d'avenir" a-t-il expliqué.

Et justement depuis août 2022, l'Afpar propose une formation inédite en partenariat avec Simplon Réunion, organisme de formation spécialisé dans les métiers du numérique, pouvant accueillir 16 apprentis développeurs en intelligence artificielle. La première sur l'île.

- "Changer le monde" -

"Il y a quinze ans lorsque les réseaux sociaux et les ventes en ligne sont arrivés, on a dit que tout était en train de mourir. Les agences de voyages étaient menacées. À l'arrivée des smartphones, on pensait qu'on n'aurait plus rien, que les gens resteraient chez eux, qu'ils ne se parleraient plus. Et aujourd'hui au contraire on ne peut plus vivre sans tout ça" expose Laurent Medea.

"Certes on a passé un cap avec l'intelligence artificielle mais maintenant qu'elle est là et il faut au contraire l'utiliser pour améliorer nos conditions de vie" poursuit-il.

Pour le créateur de Glados, l'intelligence artificielle va complètement "changer la vision du monde". "C'est quelque chose de bien pour le milieu de la santé, de la recherche ou encore du sport".

Une bonne chose qui peut en être une mauvaise "si elle n'est pas entre de bonnes mains" précise-t-il. Surtout, "il faut que ce soit évolutif et que l'intelligence artificielle soit surveillée constamment".

Mais Yannick Picard tient à rassurer. "L'IA ne prendra pas le dessus. Il y aura toujours l'existence d'un bouton rouge pour arrêter les systèmes problématiques. Elle ne pourra pas être non plus la relève de l'être humain" insiste-t-il.

Le virage semble donc être pris pour La Réunion. Cependant, les dangers autour de l'intelligence artificielle existent et sont déjà pour certains visibles dans nos sociétés.

Le lundi 1er mai 2023, Geoffrey Hinton, pionnier dans le domaine, démissionnait après 10 ans au service de Google. Dans un entretien publié dans le New York Times, il révélait peu de temps après les "graves risques pour la société et l'humanité" liés directement à l'IA. Parmi les dangers évoqués, la machine qui dépasse le créateur, la menace de "robots meurtriers", la suppressions d'emplois notamment pour les traducteurs et les assistants personnels ou encore la désinformation de masse.

Si ces derniers n'ont pas encore vraiment émergé, des failles se font déjà ressentir notamment dans le domaine de l'art.

- Une menace pour l'art -

Les progrès fulgurants de l'intelligence artificielle sont pour beaucoup perçus comme une menace dans le milieu artistique. Ai-Da, en est l'une des témoins.

Cette machine à l'apparence humaine au bras robotisé, peut créer à elle toute seule des œuvres allant du portrait à l’art abstrait qui se vendent à des milliers d'euros. Son père, un ancien galeriste a justement voulu montrer par sa création que le domaine de l'art, qu'on croyait réservé à la créativité humaine, était lui aussi menacé par l'évolution des technologies. De quoi faire frémir les artistes peintres.

Lire aussi - Un robot doté d’une intelligence artificielle menace le monde de l’art

Du côté d'Hollywood, la grève de plusieurs mois des scénaristes et acteurs n'a échappé à personne cette année. Un mouvement inédit pointant du doigt le rôle grandissant de l'intelligence artificielle dans l'industrie amplifiant une nouvelle fois la crainte du "remplacement".

Dans leurs revendications, les acteurs redoutaient de voir leur image ou leur voix clonée, tandis que les scénaristes craignaient que l'IA puisse être utilisée pour des scripts et qu'ils soient moins payés, ou même que leurs scénarios servent à entraîner des robots.

Lire aussi - Accord à Hollywood pour mettre fin à la grève des acteurs

À La Réunion, le Futura Network proposait justement une table ronde autour du sujet en novembre afin de désamorcer les craintes à l'échelle locale.

- Deepfake en plein essor -

Autre phénomène qui inquiète, le deepfake. Cette technique de synthèse permet réaliser ou modifier un enregistrement vidéo ou audio grâce à l'intelligence artificielle. Des contenus faux qui sont pourtant profondément crédibles.

Habituellement utilisée pour des documentaires ou film notamment pour recréer des visages de stars, la technique est désormais accessible au grand public qui n'en fait pas toujours bon usage.

Les femmes restent les principales victimes de ces faux avec des applications photo qui les déshabillent numériquement, des messages sexualisés les mettant en scène, de l'hypertrucage pornographique et de la sextorsion. Certaines célébrités, très exposées sur les réseaux sociaux, en ont d'ailleurs fait les frais comme Taylor Swift et Emma Watson. Un dénudage par intelligence artificielle qui ne fait qu'augmenter ces derniers mois et qui ne concerne plus seulement les personnalités publiques.

Face à ce constat, la réglementation se retrouve souvent dépassée et certains politiques cherchent à rendre la diffusion de ces "deepfakes" délictueux.

- Encadrer l'intelligence artificielle -

La marche arrière n'étant plus possible, l'Union européenne a fini par s'accorder au début du mois de décembre sur une législation inédite au niveau mondial pour réguler l'intelligence artificielle après plusieurs jours de négociations.

Globalement, ce texte devrait favoriser l'innovation en Europe, tout en limitant les possibles dérives de ces technologies très avancées.

Pour ce faire, des règles s'imposeront à tous pour s'assurer de la qualité des données utilisées dans la mise au point des algorithmes et pour vérifier qu'ils ne violent pas la législation sur les droits d'auteur. Les développeurs devront par ailleurs s'assurer que les sons, images et textes produits seront bien identifiés comme artificiels.

De plus, le cœur du projet consiste en une liste de règles imposées aux seuls systèmes jugés à "haut risque", essentiellement ceux utilisés dans des domaines sensibles comme les infrastructures critiques, l'éducation, les ressources humaines, le maintien de l'ordre....

Ces systèmes seront soumis à une série d'obligations comme celles de prévoir un contrôle humain sur la machine, l'établissement d'une documentation technique, ou encore la mise en place d'un système de gestion du risque.

- Les interdictions resteront rares -

La législation prévoit également un encadrement particulier des systèmes d'IA qui interagissent avec les humains. Elle les obligera à informer l'utilisateur qu'il est en relation avec une machine.

Les interdictions resteront rares. Elles concerneront les applications contraires aux valeurs européennes comme les systèmes de notation citoyenne ou de surveillance de masse utilisés en Chine, ou encore l'identification biométrique à distance des personnes dans les lieux publics pour éviter une surveillance de masse des populations.

Les Etats membres de l'Union ont toutefois obtenu des exemptions pour certaines missions des forces de l'ordre comme la lutte contre le terrorisme.

En 2024, la coopération internationale s'accélerera avec plusieurs sommets sont prévus sur le sujet de l'intelligence artificielle. L'un d'eux se tiendra dans six mois en format virtuel en Corée du sud, un autre en présentiel à Paris à l'aube de 2025.

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1 Commentaires
Yabloport
Yabloport
1 an

Envoyé l'aire terminator i ariv plu vit ke prévu
..