Ce lundi 22 août, l'Observatoire des prix, des marges et des revenus, présentait son rapport intermédiaire relatif à l'état des lieux du marché de la distribution alimentaire à La Réunion. Et ce, deux années après la réalisation effective de l'opération de rachat des actifs de Vindémia par le groupe GBH. L'OPMR, sous le contrôle de Bertrand Huby, magistrat de la Chambre régionale des comptes, a demandé à Bolonyocte Consulting un rapport sur la situation deux années après le rachat de Vindémia par le groupe Bernard Hayot (GBH). Si le rapport définitif doit sortir en septembre, les premiers éléments laissent peu de place au doute, le groupe Make Distribution et les enseignes Run Market - qui ont racheté une partie des actifs de Vindémia à GBH -, sont en danger. Le groupe cumule d'ailleurs une dette estimée en 70 et 80 millions d'euros. (Photo : rb/www.ipreunion.com)
Depuis des semaines les clients le constatent, dans leur enseigne Run Market, que cela soit à Sainte-Marie, à Saint-André, au Chaudron ou à Saint-Paul, les hypermarchés sont vides. Vidés de leurs clientèles, vidés de leurs personnels de caisses et surtout vidés de leurs rayons… Un constat qui consterne Olivier, père de famille. "On vient faire les courses, il n’y a rien dans les rayons, c’est cher, et en plus on pas plus de temps à faire la queue en caisse qu’à faire nos courses ", s’indigne-t-il. Une situation que partage Nicole venue faire des achats avec sa fille. "Quand on voit qu’un samedi il y a cinq caisses d’ouvertes, on comprend pourquoi le groupe est en faillite."
Que cela soit donc du côté des clients, que de côté des professionnels et de l’Observatoire des prix, des marges et revenus (OPMR), le constat est sans appel : la situation des enseignes Run Market rachetées par Makes Distribution est alarmante.
- Une opération déjà risquée il y a deux ans -
Il y a deux ans, lors du rachat par le groupe GBH, l’OPMR et l’agence de consulting par le biais de Christophe Girardier, rapporteur de l’étude, avaient mis en exergue les risques de cette opération. Pour autant, l’Autorité de la concurrence avait donné son feu vert le 26 mai 2020. Toutefois, l’Autorité avait demandé au groupe GBH de céder une partie de ses actifs pour éviter une atteinte à la concurrence. Le groupe a donc cédé quatre hypermarchés à Make Distribution sous l’enseigne Run Market et deux au groupe Thien Ah Koon.
À la suite de cette opération de rachat et de cession de quatre hypermarchés au groupe Make Distribution, l’étude note une baisse drastique de l’activité dans les enseignes, alors que sous l’enseigne Jumbo Score, la clientèle était présente. La première raison, selon Christophe Girardier, "ces enseignes sont plus exposées à la concurrence des enseignes Leclerc et Carrefour".
Conséquences, chez Run Market, les parkings sont vides, tout comme les rayons. Alors que chez la concurrence, la clientèle afflue. "Je n’ai jamais vu cela de toute ma carrière", explique le rapporteur de l’étude. "Il y a une baisse de la fréquentation flagrante, la zone est presque déserte." Une absence d’attractivité qui impacte l’hypermarché mais également les commerces aux alentours.
L’effet de cet achat est également la création d’un véritable duopole Carrefour/Leclerc. Résultats, avant le rachat de Vindémia par le groupe GBH et la cession à Make Distribution, Jumbo avait 30% de part de marché, Leclerc 23% et Carrefour 17%. Désormais, Carrefour compte 36 à 39% de part de marché, Leclerc totalise 27 à 29%. "Ce duopole totalise 2/3 du marché à La Réunion", explique Christophe Girardier. "Une concentration défavorable au pluralisme concurrentiel", ajoute-t-il.
- Make Distribution en passe de disparaître -
"La défaillance de Make Distribution est imminente", avait alors commenté Christophe Girardier. Selon lui, de nombreux fournisseurs seraient impayés depuis près de six mois. "Il y a également une rupture des produits locaux et une paupérisation de l’offre", note le rapporteur de l’étude. "Une spirale", qui, selon Christophe Girardier, "aboutit toujours à un échec". Plusieurs risques sont donc à craindre du côté de la grande distribution, notamment sur l’impact des prix et la diversité de l’offre. "Ce qui mettrait à mal l’équilibre de l’économie de l’île. Autre impact majeur, l’avenir des 780 salariés qu’emploi le groupe Make Distribution et les enseignes Run Market.
Selon ces éléments, le groupe Make Distribution perdrait environ un million d’euros par mois. Toujours selon l'étude, le groupe cumulerait une dette estimée en 70 et 80 millions d’euros.
Conclusion, "la situation financière devenue critique du groupe, est le prélude de la disparition à très court terme du nouvel acteur de la distribution réunionnaise, le groupe Make Distribution", explique Christophe Girardier. Le rapport final de cette étude, tentera de trouver des pistes pour améliorer la situation de ce secteur.
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