À la veille de Noël, le samedi 24 décembre 2022, 53 Sri-Lankais ont accosté au Port-Est de La Réunion. À bord de leur navire immatriculé « Imula 0559 CHW », trois femmes et trois enfants. Il s’agit du quatrième bateau sri-lankais arrivé à La Réunion en 2022. Mercredi 28 décembre, 26 migrants ont été auditionnés par le juge des libertés et de la détention. À l’exception de trois mineurs, qui ont été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance, les 23 autres personnes ont été renvoyées en zone d’attente. Ce jeudi 29 décembre, les autres passagers du navire, actuellement en zone s’attente, passeront à leur tour devant le juge. Des arrivées de migrants Sri-Lankais qui se succèdent et mettent en lumière les difficultés d’accueil dans notre île.
Le placement en zone d’attente de ces migrants Sri-Lankais leur permet de faire une demande d’autorisation d’entrer en France au titre de l’asile à l’OFPRA (l’Office français de protection des réfugiés et apatrides).
Toutefois, la demande est une procédure particulièrement complexe. Comme nous l’expliquait Maître Xavier Belliard, l’accueil des migrants se fait en plusieurs étapes. Concernant la demande d’entrer en France au titre de l’asile, cette procédure vise à autoriser ou non l’entrée sur le territoire de l’asile. Dans ce cadre, l’OFPRA auditionne les personnes concernées et transmet au ministère de l’Intérieur un avis motivé portant sur le caractère irrecevable ou infondé de leur demande. Cela s’apprécie au regard des déclarations du demandeur, explique l’OFPRA.
Si l’OFPRA juge la demande recevable, alors elle donne autorisation à la personne d’entrer sur le territoire. Dans ce cas, le migrant peut effectuer une demande d’asile auprès de la préfecture. Une demande instruite par l’OFPRA qui donne une décision favorable ou défavorable.
Dans le cas où la personne ne satisferait pas aux conditions d’entrée, elle est maintenue en zone d’attente pour une durée maximale de 20 jours, sous contrôle du juge des libertés et de la détention. Elle peut également demander un recours devant le tribunal administratif.
À l’issue de ces 20 jours maximum, le réfugié est reconduit vers son pays.
D’ailleurs le préfet de La Réunion, n’a pas hésité à dire un mot à ce sujet. « J’ai deux responsabilités, celle de l’action en mer et celle de préfet sur terre ». À l’avenir, il le dit, « pour toutes les personnes non autorisées à entrer sur le territoire, on mettra toute notre énergie pour les faire repartir ».
- Quatre navires ont accosté en 2022 -
Depuis le début de l’année, quatre navires ont accosté dans notre île.
Le dernier en date donc, l’Imula 0559 CHW, arrivé le samedi 24 décembre au port de La Réunion. Il est arrivé à quai à 18h15. Ce navire avait été repéré dans les eaux françaises dans la nuit du vendredi 23 au samedi 24, comme nous vous le révélions. Les 53 migrants ont été pris en charge par les services de l’État.
Ce navire, comme dit antérieurement, est le quatrième à avoir accosté sur notre île. L’avant-dernier navire à être arrivé à La Réunion remonte au 20 octobre. Un bateau de pêche avec à son bord 17 personnes. Trois femmes et un enfant se trouvaient à bord. Le 7 novembre, treize de ces migrants dont la demande d’entrée sur le territoire français a été refusée, ont été reconduits vers la frontière. Quatre ont pu rester à La Réunion.
Le 17 septembre, ce sont 46 migrants qui ont trouvé refuge dans notre île. Le 26 septembre, la cour d’appel a autorisé 39 des 46 migrants sri lankais à quitter la zone d’attente. Le 6 octobre, sept Sri-Lankais sont reconduits en avion à destination du Sri Lanka.
Le 31 juillet, un navire a également accosté à la Pointe des Galets. Après avoir été pris en charge et placés en zone d’attente à l’aéroport Roland-Garros, tous ont demandé l’autorisation d’entrer en France au titre de l’asile. Sur ces six personnes, une seule a initialement obtenu l’autorisation d’entrer en France. Les cinq autres ont d’abord été déboutés de leur demande, avant d’être finalement autorisés à rentrer sur le territoire.
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– De nombreux bateaux arrivés à La Réunion depuis 2018 –
Depuis 2018, six bateaux ont accosté sur notre île, avec un total de 356 sri-lankais ayant foulé le sol réunionnais. Là encore des demandes d’asile ont été faites, certaines acceptées, d’autres rejetées. Quelques dizaines de migrants ont finalement pu rester à La Réunion. Tous les autres ont été renvoyés au Sri Lanka.
Les bateaux arrivés à La Réunion en provenance du Sri-Lanka :
• Le 13 avril 2019, à bord d’un bateau en mauvais état, 120 de personnes tentent d’accoster dans le port de Sainte-Rose. Elles sont interceptées. Parmi elles se trouvent trois ressortissants indonésiens soupçonnés d’être des passeurs. 60 des 120 migrants seront ensuite expulsés vers leur pays. Les passeurs seront jugés le 15 mai par le tribunal correctionnel de Saint-Denis. Ils sont condamnés à des peines de prison allant de 12 à 18 mois de prison ferme pour “aide à l’entrée ou au séjour irrégulier en bande organisée”. Ils feront appel mais finiront par se désister de leur requête. Leurs condamnations sont donc définitives
• Le 4 février 2019, un bateau avec à son bord environ 70 personnes dont 5 enfants et 8 femmes, est intercepté au large à 5 kilomètres au large de la côte de la commune de Saint-Philippe. Le 14 février, 64 des 70 migrants sont expulsés de La Réunion et renvoyés dans leur pays à bord d’un avion spécialement affrété.
• Le 14 décembre 2018, 62 personnes, dont une dizaine de femmes et d’enfants, arrivent à bord d’un bateau de pêche. D’abord placés en zone d’attente, tous les migrants ont été remis en liberté par le tribunal au motif que leurs droits ne leur avaient pas été notifiés à leur arrivée dans l’île.
• En octobre 2018 à bord d’un bateau en relatif bon état, huit Sri-lankais, d’une moyenne d’âge plutôt jeune, entre 20 et 30 ans, dont un mineur d’environ 16 ans sont interceptés. Le bateau aurait navigué plusieurs jours en pleine mer. Ils sont expulsés vers leur pays quels jours plus tard.
• En septembre 2018 la marine sri-lankaise arrête au large de la côte ouest du Sri-Lanka, 90 personnes qui voyageaient illégalement dans un chalutier à destination de l’île de la Réunion.
• En mars 2018, six Sri Lankais sont retrouvés au large de Saint-Gilles à bord d’un radeau de fortune. Ils entament ensuite une procédure de demande d’asile. Certains ont depuis regagné leur pays
=> Les bateaux interceptés au départ au Sri-Lanka :
• Le mercredi 6 novembre 2019, onze personnes ont été interceptées par les autorités sri lankaises alors qu’elles tentaient de venir illégalement La Réunion.
• Le 7 mars 2019, au moins 30 migrants ont été arrêtés ce jeudi 7 mars 2019 dans la matinée par la marine sri-lankaise à 74 kilomètres au sud du Sri-lanka, rapporte le Daily Mirror. Deux patrouilleurs ont intercepté un chalutier transportant des migrants illégaux. “Nous soupçonnons qu’ils tentaient de rejoindre l’île de La Réunion,” a déclaré le porte-parole de la Marine Isuru Suriyabandara.
• Le 14 février 2019, les forces spéciales d’intervention et la marine du Sri Lanka ont arrêté 21 personnes, dont trois femmes et quatre enfants qui s’apprêtaient à quitter illégalement le territoire, rapporte le Daily Mirror. Ils étaient cachés dans une maison située à Siyambalanduwa. Peu de temps après, trois hommes, les présumés passeurs ont été interpellés dans une Résidence à une centaine de kilomètres plus au sud, à Pannegamuwa avec deux véhicules et près de 627 000 roupies (environ 3100 euros). Selon le Daily Mirror, les 21 personnes s’apprêtaient à quitter le Sri Lanka pour La Réunion.
• Le 11 septembre 2018 : un chalutier transportant 90 personnes, 89 hommes et une femme est arrêté au large du Sri-Lanka
• Le 8 août 2018 un bateau avec 21 occupants (19 hommes et deux femmes) est intercepté, à 117 milles marins de Chilaw (Ouest du Sri-Lanka), dans les passagers, deux déserteurs de l’armée.
- Trois passeurs interpellés -
L'hypothèse d'une migration organisée vers notre région française ne fait plus aucun doute.
Plus de 4.200 kilomètres séparent les deux îles. Aux commandes de ces navires, des hommes, des passeurs. « Ce qui est certain, c’est qu’il y a manifestement des filières d’immigration illégales qui sont à l’œuvre, actives depuis le mois de mars 2018. Elles organisent ces afflux », indiquait la préfecture fin 2018, interrogée par Imaz Press.
Pour la première fois en 2019, des hommes ont clairement été soupçonnés d’être des passeurs. Les trois marins indonésiens avaient ainsi été déférés devant le tribunal de Champ Fleuri pour “aide à l’entrée ou au séjour irrégulier en bande organisée et condamnés à des peines de prison allant de 12 à 18 mois de prison ferme. Le bateau dans lequel ils se trouvaient transportait 120 migrants sri-lankais.
Avant eux, identifier les passeurs ou les capitaines s’avérait très compliqué. Le doute planait pourtant autour d’un homme, et de sa famille pour le “Prashansa”, bateau arrivé en février 2019. Une journaliste sri-lankaise du Daily Mirror, nous avait indiqué que ce Chaminda Kumara Fernando était soupçonné d’avoir volé l’embarcation à son propriétaire pour emmener sa famille et des dizaines de personnes à La Réunion. L’histoire en était restée là pour nous, l’homme avait été renvoyé en charter dans son pays natal.
- 4.200 kilomètres plein d’espoir -
Ces hommes, femmes et parfois enfants quittent leur pays dans l’urgence. Des migrants qui souvent utilisent toutes leurs économies pour faire la traversée. Une traversée de plus de 4.000 kilomètres et de plusieurs semaines pour arriver vers notre île.
Mais pourquoi La Réunion est-elle devenue le cap à atteindre pour ces réfugiés ? Tout simplement car notre île est la porte d’entrée en France et donc en Europe. La présence rassurante d’une communauté tamoule a pu également jouer un rôle dans un territoire connu pour sa diversité.
Auparavant, ces réfugiés se dirigeaient vers le sud en direction de l’Australie, mais depuis 2013 le pays a mis en place une politique extrêmement restrictive à l’encontre des migrants, tout comme la Nouvelle-Zélande, la Malaisie ou encore Singapour.
Le Sri-Lanka est un pays en proie aux conflits depuis plusieurs années, sur fond de persécutions contre les minorités, que cela soit pour des raisons ethniques, politiques ou encore religieuses.
Sur le plan économique, Sri Lanka est pris à l’heure actuelle dans une spirale de l’endettement avec une dette colossale. Cette crise sociale et économique depuis mars 2022 a d’ailleurs poussé le président sri-lankais Gotabaya Rajapaksa à démissionner le 12 juillet 2022.
Les migrants, qui, une fois renvoyés dans leur pays si leur demande d’entrée en France au titre de l’asile est refusée, risquent par ailleurs la prison, dans un pays où l’on est peu enclin à accepter la fuite de ces hommes.
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- Des arrivés qui divisent la population -
À La Réunion, ces arrivées divisent la population. Dans un contexte économique et social difficile, une partie des habitants voit d’un mauvais œil ces nouveaux venus. Il n’y a qu’à lire le flux de commentaires sur les réseaux sociaux pour s’en apercevoir.
Nous sommes là bien loin de l’esprit de "vivre-ensemble" dont parle souvent la population réunionnaise. Fort heureusement, la solidarité et le vivre ensemble règne encore chez certains. Le milieu associatif se mobilise pour aider ces migrants.
Toutefois, un problème se pose, celui de leur accueil. On le sait, lorsqu’ils arrivent, ces migrants sont hébergés dans un hôtel du chef-lieu. Cependant, les places manquent. Des places qui manquent déjà pour les Réunionnais sans logement. La Maire de Saint-Denis, elle-même, avait lancé un appel publiquement, le 27 septembre dernier, à l’association des maires de la Réunion pour l’aider à trouver des logements pour ces migrants. Un problème qu’avait d’ailleurs soulevé le député Jean-Hugues Ratenon, interpellant Élisabeth Borne.
Que l'on soit d'accord ou pas avec l'arrivée de ces navires, rien ne peut empêcher ces hommes, femmes et enfants à tenter la traversée.
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