Le Tampon : un couple de nonagénaires privé d'allocation solidarité, la CGSS fait appel après sa condamnation à 50.000 € d’indemnités

  • Publié le 19 novembre 2025 à 02:59
CGSS

Au Tampon, un couple de personnes âgées vit avec seulement 1.000 euros par mois. Madame P., 93 ans, touche l’ASPA, une allocation réservée aux retraités aux faibles ressources. Monsieur P., son époux, en est privé. La CGSS estime que le versement d’une retraite unique en 2011 lui en interdit l’accès. En juin, la justice leur a accordé 50.000 euros d’indemnités. Mais la CGSS a fait appel. (Photo rb/www.imazpress.com)

Monsieur et Madame P. vivent modestement, avec un total de 1.000 euros par mois, bien loin des 1.500 euros qui leur permettraient de couvrir leurs besoins essentiels. À 93 ans, Madame P. perçoit l’Allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), un minimum social versé aux retraités disposant de faibles ressources. Son époux, pourtant dans la même tranche d’âge et ayant lui aussi travaillé une partie de sa vie, se voit refuser cette aide par la Caisse générale de sécurité sociale (CGSS) de La Réunion.

"Ils font comme si Monsieur n’existait pas", s’insurge Antoine Fontaine, de l’association Respect 974 Démocratie, qui les accompagne. Il rappelle que la Constitution garantit aux travailleurs âgés des conditions de vie décentes, notamment à travers le dispositif de versement forfaitaire unique pour ceux qui ont peu cotisé.

 - Un contexte historique défavorable -

Le couple a travaillé dans les années où le système de sécurité sociale n’était pas encore généralisé à La Réunion. Ils n’ont donc pas cotisé suffisamment pour percevoir une retraite confortable. Madame P. a pu bénéficier de l’ASPA, mais pas Monsieur P. Celui-ci a en effet touché en 2011 une retraite forfaitaire unique, versée en une fois par la CGSS, au titre de l’inaptitude au travail. Mais il n’avait pas été informé que cette décision obérerait ses droits futurs à l’ASPA.

N'obtenant aucune réponse de la part de la CGSS dans ce dossier, Antoine Fontaine a saisi le président de la République en 2023 dans un courrier où il dénonçait l’injustice du traitement réservé à ce couple. À l'issue de cette démarche, une procédure devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis, pôle social, a été initiée.

- Une reconnaissance judiciaire… puis un appel de la CGSS -

Le tribunal qui a rendu son jugement le 11 juin 2025. Les juges reconnaissent que Monsieur P. ne pouvait à la fois obtenir le versement de sa pension de retraite et bénéficier de l'ASPA. Mais la juridiction a estimé que la CGSS a manqué à son devoir d’information, créant pour Monsieur P. "une perte de chance" de bénéficier de la solidarité nationale. Le tribunal a condamné la caisse à indemniser le couple à hauteur de plus de 50.000 euros.

Mais la CGSS a décidé de faire appel. L’affaire a été appelée ce mardi 18 novembre 2025 devant la chambre sociale de la cour d’appel de Saint-Denis. La CGSS a demandé un délai supplémentaire pour préparer sa défense. L’audience de plaidoirie est désormais fixée au 2 décembre prochain.

Pour Respect 974, ce dossier va bien au-delà d’un simple litige administratif : “Cette affaire est un symbole : elle dit tout d’un système social qui se referme sur lui-même, et d’une solidarité qui n’a plus la mémoire de ceux pour qui elle a été créée.”

Sollicitée par nos soins, la CGSS n’a pas souhaité commenter ni répondre à nos questions.

is/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

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