Le comptage quotidien des morts du Covid-19, dont le nombre officiel a dépassé les 200.000, est un exercice délicat, le recueil des données en temps réel n'étant que parcellaire et les méthodes variables selon les pays.
- HĂŽpitaux et maisons de retraite -
L'Espagne, l'Allemagne, le Luxembourg et la CorĂ©e du Sud comptabilisent tous les dĂ©cĂšs de personnes testĂ©es positives au Covid-19, que ce soit Ă l'hĂŽpital ou en dehors. En Belgique, oĂč les maisons de retraite concentrent officiellement plus de la moitiĂ© des cas mortels liĂ©s Ă cette maladie, les chiffres incluent la mort des victimes du coronavirus non testĂ©es mais suspectĂ©es d'avoir Ă©tĂ© atteintes. Les chiffres français recensent eux aussi les morts survenues dans les maisons de retraite (plus d'un tiers du total).
Mais d'autres pays, comme l'Iran et la Chine, ne font état dans leurs bilans quotidiens que des décÚs à l'hÎpital. C'est aussi le cas au Royaume-Uni. Des chiffres plus complets sont rendus publics chaque semaine par le Bureau national des statistiques, mais avec une latence d'une dizaine de jours et ils ne prennent pas en compte l'Ecosse et l'Irlande du Nord.
En Italie, le pays officiellement le plus endeuillé en Europe, les morts dans les maisons de retraite ne sont pas toutes prises en compte. Si un gros foyer épidémique est détecté dans un établissement, des tests sont réalisés et les décÚs comptabilisés, mais si un établissement est moins touché, il est vraisemblable que ce ne sera pas le cas, explique la Protection civile.
Aux Etats-Unis, qui affiche officiellement le bilan des cas mortels le plus lourd dans le monde (plus de 50.000), les décÚs pris en compte varient d'un Etat à l'autre : celui de New York comprend les maisons de retraite, la Californie non.
- Covid-19 ou une autre maladie ? -
Certains pays, comme la CorĂ©e du Sud, l'Italie, l'Espagne, le Royaume-Uni, le Luxembourg et la Belgique, intĂšgrent dans leurs chiffres toutes les personnes ayant Ă©tĂ© testĂ©es positives au coronavirus (ou dans certains pays suspectĂ©es de l'avoir Ă©tĂ©), mĂȘme celles mortes des suites de complications d'une maladie prĂ©existante. D'autres sont plus sĂ©lectifs. En Iran, sont exclus des bilans les patients testĂ©s positifs mais mourant d'une autre "maladie respiratoire grave".
Aux Etats-Unis, sont remontĂ©s des tĂ©moignages de personnes dont les proches sont morts, officiellement de pneumonie, avant que les tests ne soient disponibles. En Allemagne, les statistiques ne font pas la distinction entre les personnes dont le dĂ©cĂšs a Ă©tĂ© directement causĂ© par le Covid-19 et celles qui pourraient ĂȘtre mortes d'une maladie prĂ©existante ou des deux maladies combinĂ©es. Cela Ă©tĂ© un sujet de controverses entre l'institut national chargĂ© du suivi des Ă©pidĂ©mies et certaines rĂ©gions qui prĂ©sentaient des bilans infĂ©rieurs car elles rĂ©alisaient des autopsies afin de dĂ©terminer l?origine prĂ©cise de la mort.
- Manque de tests et délais -
Pendant une Ă©pidĂ©mie, "la remontĂ©e et le traitement des informations, mĂȘme accĂ©lĂ©rĂ©s, se font avec quelques jours de dĂ©calage et ne couvrent pas tous les dĂ©cĂšs. Il faut plusieurs semaines ou plusieurs mois pour pouvoir dĂ©compter prĂ©cisĂ©ment tous les morts", estimaient dĂ©but avril Gilles Pison et France MeslĂ©, dĂ©mographes Ă l'Institut français des Ă©tudes dĂ©mographiques (Ined).
Aux Etats-Unis, mĂȘme en l'absence de test, les certificats de dĂ©cĂšs doivent mentionner si le Covid-19 est la cause "probable" de la mort, mais ces certificats mettent du temps Ă remonter et ne peuvent ĂȘtre pris en compte pour les bilans en temps rĂ©el. Par manque de tests, l'Espagne rĂ©alise trĂšs peu de dĂ©pistages post-mortem. Ainsi, si une personne n'a pas Ă©tĂ© testĂ©e avant de mourir, elle n'est pas comptabilisĂ©e par les autoritĂ©s sanitaires.
Les données judiciaires, moins restrictives, laissent entrevoir un bilan bien supérieur : par exemple, le tribunal supérieur de Castille-La Manche a enregistré en mars 1.921 actes de décÚs "dus au Covid ou à une suspicion de Covid", soit prÚs de trois fois plus que les 708 morts (positifs au Covid-19) recensés au 31 mars par les autorités sanitaires.
Autre illustration : à Bergame, en Lombardie, dans le nord de l'Italie, ont été recensés, au cours de la premiÚre quinzaine de mars, 108 morts de plus (+193%) qu'un an plus tÎt... mais seulement 31 décÚs liés au Covid-19.
- Chine et Iran accusés de mentir -
Parfois, la sincĂ©ritĂ© mĂȘme des autoritĂ©s est remise en cause. En Iran, les bilans officiels ont Ă©tĂ© contestĂ©s, notamment au dĂ©but de l'Ă©pidĂ©mie, par des responsables provinciaux et des parlementaires. A l'extĂ©rieur de ce pays, Washington, notamment, a reprochĂ© Ă TĂ©hĂ©ran de maquiller ses chiffres.
La Chine, critiquĂ©e par plusieurs responsables occidentaux pour sa gestion de la crise, a revu Ă la hausse, de prĂšs de 40%, le bilan des morts le 17 avril. La ville de Wuhan, le berceau de la pandĂ©mie, a comptabilisĂ© 1.300 morts supplĂ©mentaires, expliquant que certains patients avaient pĂ©ri chez eux faute d'avoir pu ĂȘtre pris en charge par les hĂŽpitaux.
AFP



