Annulera, annulera pas ? La cour administrative d'appel de Nantes se prononce lundi aprĂšs-midi sur la validitĂ© d'arrĂȘtĂ©s autorisant les travaux de l'aĂ©roport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), une dĂ©cision cruciale pour l'avenir de ce chantier controversĂ©, suspendu depuis quatre ans.
Alors que Manuel Valls a confirmĂ© sa volontĂ© de lancer Ă l'automne les travaux prĂ©paratoires Ă la rĂ©alisation du nouvel aĂ©roport nantais, l'annulation d'un seul arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral, sur les cinq contestĂ©s en justice, porterait un coup d'arrĂȘt Ă ce projet quinquagĂ©naire, dĂ©clarĂ© d'utilitĂ© publique en 2008.
Les sept juges composant la cour feront connaßtre leur décision vers 14H00, lors d'une audience publique.
Ils peuvent, comme en premiĂšre instance le 17 juillet 2015, valider les arrĂȘtĂ©s indispensables au dĂ©marrage du chantier. Mais ils peuvent aussi suivre les prĂ©conisations du rapporteur public en annulant les jugements du tribunal administratif de Nantes, et invalider ces arrĂȘtĂ©s. Une telle dĂ©cision priverait d'Ă©ventuels travaux de tout fondement juridique, les rendant ainsi illĂ©gaux.
En fonction de l'arrĂȘt rendu, les parties pourront saisir le Conseil d'Etat, un pourvoi qui n'est pas suspensif, mais "sur des questions de droit uniquement", rappelle Thomas Dubreuil, l'un des avocats des requĂ©rants.
Le 7 novembre, le rapporteur public - dont l'avis est gĂ©nĂ©ralement suivi - avait demandĂ© Ă la cour l'annulation de quatre arrĂȘtĂ©s, dits "loi sur l'eau" et "espĂšces protĂ©gĂ©es", estimant qu'ils ne respectaient pas le Code de l'environnement.
Pris en dĂ©cembre 2013 par le prĂ©fet de Loire-Atlantique, ils autorisent le concessionnaire du futur aĂ©roport, une filiale de Vinci, et l?Ătat, Ă dĂ©roger aux interdictions de destructions des zones humides de Notre-Dame-des-Landes et de la centaine d'espĂšces protĂ©gĂ©es qui y vivent pour rĂ©aliser la plateforme aĂ©roportuaire et sa desserte routiĂšre.
Le rapporteur public, Christine Piltant, a estimé que ces destructions étaient illégales, en raison d'une "alternative avérée", voire "crédible" ou "satisfaisante" à la construction d'un nouvel aéroport, à savoir l'optimisation de l'infrastructure existante, celle de Nantes-Atlantique.
- 'La lutte va continuer' -
"La justice peut donner un coup d'arrĂȘt au projet, mais elle ne pourra le donner que parce que nous, nous avons empĂȘchĂ© le dĂ©marrage des travaux", souligne Françoise VerchĂšre, l'une des requĂ©rantes, ancienne Ă©lue (Front de gauche) de Bouguenais, oĂč est situĂ© l'actuel aĂ©roport nantais, qui espĂšre lundi "une bonne nouvelle".
ParallĂšlement Ă leur rĂ©sistance sur le terrain, les opposants sont engagĂ©s depuis une quinzaine d'annĂ©es dans un bras de fer judiciaire pour l'abandon du projet, qu'ils jugent nĂ©faste pour l'environnement, mais ont vu jusqu'ici leurs requĂȘtes rejetĂ©es.
Les préconisations du rapporteur public constituent "une bonne bouffée d'oxygÚne" pour Julien Durand, porte-parole de l'Acipa, principale association d'opposants. "Le rapporteur a validé la qualité des dossiers qu'on a défendus, (...) au moins on a un premier résultat", se réjouit-il. "La lutte va continuer" jusqu'à l'obtention de l'abrogation du décret déclarant d'utilité publique le projet, rappelle-t-il.
Pour l'avocat Thomas Dubreuil, les conclusions du rapporteur public sont "trÚs étayées" et "trÚs motivées en droit et en faits". Bien que Nantes-Atlantique ne soit "pas l'aéroport idéal", en raison de son unique piste et du bruit occasionné par le survol du centre-ville, son réaménagement "présente des inconvénients moins dommageables" sur la ressource en eau, que la construction du nouvel aéroport, avait mis en avant Mme Piltant.
Elle avait en revanche demandĂ© le rejet de trois requĂȘtes dirigĂ©es contre un cinquiĂšme arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral qui dĂ©clarait d'utilitĂ© publique le programme de travaux d'amĂ©nagement et de sĂ©curisation des voies existantes autour du futur site, dĂ©nommĂ© "programme viaire".
Dix recours au total ont été déposés par les principales associations opposées au projet, des associations de protection de l'environnement, des agriculteurs et des particuliers. Seul Europe Ecologie-Les Verts (EELV) n'avait pas fait appel des jugements de premiÚre instance.
Le projet d'aéroport du Grand Ouest, soutenu par les collectivités locales et cher à l'ancien Premier ministre et ex-maire (PS) de Nantes Jean-Marc Ayrault, est en suspens depuis l'automne 2012. Son ouverture, à une vingtaine de kilomÚtres au nord de Nantes, était initialement prévue en 2017.
Par Laurence COUSTAL - © 2016 AFP
